Examen indépendant - Fusillade de Moncton - 4 juin 2014
Présenté par le sous-commissaire Alphonse MacNeil (à la retraite)
Note :
Dans l'ensemble du document, les ***** indiquent que la partie correspondante du contenu a été caviardée conformément à la Loi sur l'accès à l'information, L.R.C. 1985, c. A-1 et à la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. 1985, c. P-21.
Certaines photos ont également été retirées par respect des droits d'auteur.
En raison du caviardage du contenu et du retrait de photos, le rapport a été modifié et, par conséquent, il diffère de la version originale transmise à la GRC.
Introduction
La soirée du mercredi 4 juin 2014 était chaude et ensoleillée à Moncton (Nouveau-Brunswick). Des enfants jouaient dans les cours et dans la rue, des familles préparaient le souper et des gens circulaient en voiture. Qui aurait pu prédire que cette belle soirée d'été laisserait bientôt place à une tragédie qui transformerait la vie de nombreuses personnes à jamais?
Cette soirée-là, en moins de 20 minutes, les gendarmes David Ross, Fabrice Gevaudan et Douglas Larche ont été assassinés, les gendarmes Eric Dubois et Darlene Goguen ont été blessés, la gend. Martine Benoit a survécu à de nombreux coups de feu tirés en direction de son véhicule de police et de nombreuses autres personnes ont été exposées aux balles d'une carabine de fort calibre. Les gestes impensables posés par un individu ont privé trois familles de leur mari, de leur fils, de leur père et de leur frère. La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a perdu trois de ses membres et les résidents de Moncton et des environs ont cessé de se sentir en sécurité. Cet événement insensé a ébranlé les citoyens de partout au Nouveau-Brunswick et ailleurs au pays.
Le 25 juin 2014, le commissaire de la GRC Bob Paulson a envoyé un message à tous les employés de la GRC, affirmant que « le fait que trois de nos membres aient été tués dans l'exercice de leurs fonctions et que de nombreux autres aient failli connaître le même sort met toutefois en relief la nécessité de nous employer à bien comprendre les faits, à en tirer des leçons et, s'il y a lieu, à modifier nos pratiques sans tarder ».
Le 30 juin 2014, le commissaire a nommé le commissaire adjoint Alphonse MacNeil (à la retraite) examinateur afin qu'il procède à un examen indépendant des circonstances entourant la fusillade. Le commissaire lui a donné 90 jours pour produire un rapport. Le comm. adj. MacNeil devait examiner 13 éléments précis et formuler des recommandations pour chacun d'eux.
À titre d'examinateur, j'ai formé une équipe qui apporta son soutien à cette mission de documentation et qui se pencha sur les 13 éléments mis en évidence par le commissaire. L'équipe était composée d'employés de la GRC provenant de partout au pays et possédant une expertise dans de nombreuses disciplines. L'équipe a également pu compter sur le soutien de différents collaborateurs qui sont des experts dans leurs domaines respectifs. Dès le départ, notre objectif était de tirer des leçons de cette tragédie afin qu'à l'avenir, nos membres, qui exercent leurs fonctions en prenant d'énormes risques, aient accès à la meilleure formation, aux meilleurs outils et aux meilleures méthodes de fonctionnement que la GRC puisse offrir.
Les examens de cette nature sont loin de se résumer simplement à la tenue d'une enquête et à la rédaction d'un rapport. L'équipe a procédé à un examen minutieux et détaillé, mais elle n'a jamais perdu de vue le fait que des membres de la Gendarmerie ont été tués et blessés et que de nombreux autres ont été touchés d'une façon que la plupart d'entre nous ne comprendrons jamais.
Nous avons rencontré les familles des gendarmes disparus et nous avons parlé avec des centaines de personnes, notamment les membres qui étaient présents pendant que les coups de feu étaient tirés et de nombreux autres qui sont intervenus dans les jours suivants. Nous avons discuté avec des témoins et avons arpenté leurs quartiers à maintes reprises pour reconstituer les événements. Ce processus n'a pas été facile pour les personnes à qui nous avons parlé. Les plaies étaient vives, la guérison ne faisait que débuter et les personnes commençaient seulement à se rétablir et à aller de l'avant. L'empressement des résidents de Moncton à nous parler et à nous fournir de l'information en dépit de souvenirs douloureux a été remarquable et nous ne sommes pas près de l'oublier.
Cet examen a comporté son lot de défis prévus et imprévus. La durée de l'examen (90 jours) a été dictée par la nécessité de déceler les lacunes le plus tôt possible dans le but d'atténuer les risques pour les autres membres de la Gendarmerie, cependant la période allouée a limité le temps que nous avons pu accorder à l'examen de certains problèmes. Nous sommes néanmoins persuadés que nous avons eu le temps, les ressources et l'indépendance nécessaires pour évaluer les 13 éléments du mandat de l'examen afin de relever les principaux problèmes et de proposer des améliorations.
Afin de mener l'examen, l'équipe a d'abord dû déterminer avec exactitude ce qui s'est passé le 4 juin 2014 et dans les jours qui ont suivi. À cette fin, nous avons examiné les aspects pertinents de l'enquête sur les crimes majeurs et avons passé en revue les transmissions de la STO, les communications radio et téléphoniques entre les membres, les appels au 911, les enregistrements vidéo, les déclarations des civils et des membres ainsi que les preuves judiciaires. L'équipe a aussi interrogé de nouveau de nombreux membres et civils et elle s'est rendue sur les lieux avec les membres directement concernés pour obtenir un compte rendu de première main. L'information que nous avons utilisée pour comprendre les événements reposait en grande partie sur les souvenirs des personnes mises en cause, y compris les citoyens et la police. À la suite d'un événement traumatisant, les souvenirs sont bouleversés par le traumatisme, le temps, les discussions subséquentes avec les autres ainsi que par les reportages des médias, les photographies et les vidéos. Il existe de nombreuses publications de psychologie et de recherches scientifiques sur la faillibilité de la mémoire dans des situations très stressantes et celles-ci viennent appuyer ce que nous avons observé pendant l'examen. Selon la documentation récente, les perceptions des policiers qui interviennent lors d'un même incident sont souvent différentes. Les altérations peuvent prendre la forme d'une vision tubulaire ou de pertes de mémoire relativement à des parties de l'événement. Il est normal que des policiers qui interviennent lors d'un événement traumatisant ne se souviennent pas de ce qui s'est passé ou qu'ils en aient un souvenir imprécis.
Compte tenu de ce qui précède, les positions de certaines personnes à des moments clés de l'incident sont des approximations établies à partir de la totalité de l'information mise à la disposition de l'équipe d'examen. On s'attend à ce les souvenirs des personnes touchées par cet incident et qui lisent ce rapport puissent évoluer à mesure qu'elles assimilent l'information qu'il contient.
Bien que nous ayons analysé la déclaration de Justin Bourque, le fait qu'il était toujours engagé dans le processus judiciaire m'a empêché de l'interroger, ce qui a limité notre capacité à lui poser des questions clés qui auraient pu nous permettre d'en savoir davantage sur ses gestes et ses antécédents. Il serait utile d'interroger Justin Bourque pour déterminer ses motivations et mieux comprendre comment cette tragédie aurait pu être évitée.
Le rapport commence par une description narrative de ce qui s'est passé, à partir du premier appel 911 jusqu'à l'arrestation du sujet 29 heures plus tard. Nous examinons par la suite les 13 questions dans l'ordre présenté par le commissaire : Tactiques employées et intervention effectuée à la suite du premier appel, Prise de décisions et évaluation des risques à la suite du premier appel, Supervision durant tout l'incident, Déroulement de l'intervention, Équipement et armes, Formation des membres et compétences en sécurité du policier, Communications opérationnelles, Communication et médias, Examen plus vaste de la politique, Armes à feu en la possession de l'accusé, Informations ou renseignements sur le tireur et possibilités de prévention, Assistance post-traumatique offerte aux employés et Mise en œuvre des recommandations formulées à la suite de l'incident de Mayerthorpe.
J'aimerais profiter de la présente pour souligner le travail exceptionnel de l'équipe qui a procédé à cet examen. Les membres de l'équipe ont travaillé de longues heures et ont eu peu de congés afin de produire un rapport dans lequel ils se sont investis à fond. Ils ont été exposés à tous les détails de cet horrible incident et ils en resteront marqués pour longtemps. En tant qu'employés de la GRC, cette tragédie les a motivés pendant toute la durée de l'examen.
J'ai bon espoir que les recommandations que j'ai formulées dans le présent rapport contribueront à améliorer la sécurité des membres et à rehausser la qualité des services de soutien offerts à tous les employés de la GRC ainsi qu'aux membres de leur famille.
Je tiens également à souligner l'extrême bravoure de ceux qui ont donné et risqué leur vie pour protéger les résidents de Moncton et, surtout, j'offre mes plus sincères condoléances aux familles des disparus.
Description narrative
Du 4 juin à 19 h 18 au 6 juin à 0 h 20
Réponse initiale à l'appel 911
À 19 h 18, la station de transmissions opérationnelles (STO) de Moncton a un reçu un appel 911 concernant un sujet de préoccupation (SP) : un homme portant des vêtements de camouflage marchait au milieu de la rue en direction d'un boisé sur l'avenue Pioneer et il transportait deux armes d'épaule et des balles. Il est entré dans le boisé à l'extrémité ouest de Pioneer. La première appelante a mentionné qu'elle n'a pas vu son visage, mais que l'homme semblait avoir quelque chose en tête; il semblait en mission. Une autre appelante a déclaré que la démarche du sujet lui permettait de croire qu'il était une menace.
Cet appel a été transmis à 19 h 20 au gend. Jay Doiron, et les gend. Mathieu Daigle et Shelly Mitchell agissaient à titre de renforts. Le gend. Eric Dubois répondait agissait aussi en renfort. Au moment où l'appel a été acheminé, le gend. Rob Nickerson, le gend. Fabrice Gevaudan, le gend. Andrew Johnstone, le gend. Eric White et le cap. Jacques Cloutier, serg. intérimaire, terminaient une réunion au Détachement de Codiac. Les membres du Détachement de Codiac ont par la suite mentionné à l'équipe d'examen qu'il n'était pas rare de recevoir un appel concernant un homme à l'allure suspecte muni d'une arme à feu à Moncton. Cependant, dans l'affaire qui nous intéresse, on a reçu de nombreux appels à propos de cet individu, notamment des descriptions du comportement du suspect. Le gend. Nickerson, le gend. Gevaudan, le gend. Johnstone et le gend. White ont tous participé à l'établissement d'un périmètre (on a d'abord demandé au gend. Nickerson d'effectuer des patrouilles dans le secteur). Le cap. Peter MacLean et le gend. Michel Martel ont fait équipe et sont aussi intervenus; le gend. Martel a emprunté un fusil avant de partir. Le gend. Dave Verret ***** lorsqu'il a entendu de nombreux membres être dépêchés sur les lieux. Il est retourné sur la route et s'est rendu à la position ordonnée par la STO.
Établissement du périmètre
Le gend. Doiron s'est rendu sur l'avenue Pioneer à la recherche de plus amples renseignements sur le sujet et il a parlé à un plaignant qui se trouvait à l'extérieur et toujours en ligne avec un préposé du 911. Il a obtenu des renseignements supplémentaires sur la direction empruntée par le suspect et sur son comportement. Il a immobilisé sa voiture à l'extrémité ouest de Pioneer (un cul-de-sac), où le suspect a été vu pour la dernière fois et, son pistolet en main, il a marché dans le boisé jusqu'à une clairière assez étroite. Cette clairière est en fait un chemin de terre situé à l'extrémité barricadée de l'avenue Mailhot. Le sujet a semblé emprunter un chemin dans le boisé du côté ouest de la clairière. Après l'avoir suivi sur quelques mètres, Doiron a réévalué le risque, est retourné à la clairière et s'est mis à l'abri derrière un poteau de téléphone. Ce secteur du boisé est très dense et la visibilité y est mauvaise, si bien qu'une personne en tenue de camouflage pourrait être difficile à apercevoir à 20 m de distance. Doiron a maintenu sa position et a demandé l'établissement d'un périmètre sur les rues résidentielles autour du boisé ainsi que l'envoi de renforts et des Services cynophiles.
Le gend. Eric Dubois s'est dirigé vers l'avenue Pioneer en renfort au gend. Doiron. Le gend. Daigle a été dépêché dans le secteur de Rennick Road et de Shannon Drive, à l'endroit où le sujet devrait apparaître s'il poursuivait le même chemin. Daigle est sorti de son véhicule et s'est positionné près d'une clôture derrière un immeuble à logements situé au 185 Rennick Road. D'autres policiers ont répondu à l'appel et ils se sont aussi dirigés à cet endroit. La gend. Mitchell s'est d'abord rendue sur Lonsdale Drive, mais elle s'est par la suite dirigée vers le secteur Shannon/Rennick, tout comme le gend. Gevaudan. Le gend. Nickerson effectuait toujours une patrouille dans le secteur à ce moment. Le cap. James MacPherson travaillait en civil à une enquête sur des crimes majeurs lorsqu'il a entendu l'évolution de la situation à la radio. Comme il connaît bien le secteur, il a informé les membres que le secteur boisé près de Bromfield Court donne sur Willshire Way.
Le gend. Johnstone s'est rendu en véhicule à l'extrémité de l'avenue Mailhot où il pouvait voir le gend. Doiron. Doiron a demandé l'heure d'arrivée prévue (ETA) des Services cynophiles et, par la suite, le cap. Cloutier l'a informé que l'arrivée des Services cynophiles était retardée. Johnstone a fait équipe avec Doiron.
Le cap. MacLean a demandé à la STO d'envoyer quelqu'un parler avec le témoin afin d'obtenir la meilleure description possible du suspect dans le but d'essayer de l'identifier. Le gend. Dubois s'est chargé de cette tâche et s'est repositionné à l'extrémité de Pioneer. La STO a demandé au gend. Dave Verret de prendre position sur Lonsdale Drive, au nord du secteur boisé. Le cap. MacLean et le gend. Martel approchaient du secteur dans le même véhicule. Le gend. Eric White était en route. Comme de nombreux membres approchaient avec les sirènes actionnées, le sujet devait savoir que la police s'en venait.
Établissement d'un contact avec le sujet
Le gend. Daigle a entendu des craquements provenant du boisé et il a aperçu le sujet, transportant quelque chose, sortir du boisé du côté nord de Bromfield Court et traverser rapidement la rue pour se rendre dans le boisé du côté sud de Bromfield Court. Daigle a plus tard déclaré que le suspect marchait de manière furtive, comme s'il chassait (il s'arrêtait, écoutait, etc.).
Le gend. Daigle a déclaré à la radio qu'il a vu le suspect marcher près d'un nouveau projet immobilier et que celui-ci semblait transporter quelque chose (Daigle ne connaissait pas le nom de la rue, mais la STO confirme qu'il s'agit de Bromfield Court). Il a ensuite déclaré à la radio avoir vu le suspect traverser la rue et entrer dans un secteur boisé en marchant en direction de la rue Ryan. Il s'agit du secteur boisé qui borde les cours arrière des résidences sur Bromfield, l'avenue Mailhot, Bellerose Court et Willshire Way. À ce moment, le gend. Daigle a tenté de s'approcher du suspect tout en gardant un contact visuel. Le sujet ne semblait pas avoir aperçu le gend. Daigle.
Après avoir parlé à des témoins sur l'avenue Pioneer, le gend. Eric Dubois a communiqué une description du sujet par radio : « male, late 20s, camouflaged all over, a brown headband, shoulder long brown hair, he has a bow on his back, maybe two rifles, a knife on one leg, and he was really bizarre to everyone, walking straight, possibly under the influence of something » (homme, fin de la vingtaine, tenue de camouflage complète, bandeau brun, cheveux longs aux épaules, un arc sur son dos, peut-être deux carabines, un couteau sur la jambe, tout le monde l'a trouvé bizarre, il marche et ses facultés semblent affaiblies par une substance). Il y a eu des bruits de friture à la radio au moment où le gendarme décrivait le comportement du sujet, si bien qu'il fut difficile de comprendre ce qu'il disait.
Après que le gend. Daigle eut mentionné à la radio avoir vu le suspect pour la dernière fois, les membres ont commencé à adapter le périmètre en conséquence. Il importe de se rappeler que cet incident s'est produit un mercredi, par un début de soirée chaude et ensoleillée et que, après plusieurs jours de pluie, de nombreux résidents étaient dehors pour profiter du beau temps. Le gend. Gevaudan, la gend. Mitchell et le gend. Nickerson ont garé leur véhicule à proximité de l'immeuble à logements situé au 185 Rennick Road et se sont rendus à pied sur Bromfield en renfort au gend. Daigle. Ils ont parlé brièvement avec lui de l'endroit où le suspect était entré dans le boisé la dernière fois. Après avoir observé des enfants jouer dans des cours sur Willshire, les gend. Nickerson et Mitchell sont allés les avertir de rentrer dans la maison. Les résidents qui étaient dans leur cour à environ 45 m au sud de l'endroit où se trouvait le sujet pouvaient entendre les policiers crier aux gens de rentrer dans leur maison.
Les gend. Daigle et Gevaudan ont poursuivi leur route en bordure du boisé, du côté sud de Bromfield en direction de l'avenue Mailhot, en tentant de voir le suspect. Ils se sont rendus dans le boisé à côté du 15 Bromfield, tout juste au sud de la maison. À ce moment, le gend. Nickerson revenait de Willshire Way par le boisé et il était le membre le plus près de Daigle et de Gevaudan. On peut les entendre à la radio communiquer leurs positions respectives à mesure qu'ils s'approchent du sujet.
À peu près au même moment, le gend. White, le gend. Martel (armé d'un fusil) et le cap. MacLean approchaient de Willshire Way (en voiture). La gend. Mitchell revenait également de Willshire Way. Le gend. Doiron, dont le véhicule se trouvait toujours sur Pioneer, est monté à bord avec le gend. Johnstone et ils se sont rendus sur Bromfield avant de garer le véhicule dans l'entrée se trouvant de l'autre côté de la rue, face au 15 Bromfield. En tout, il y avait huit membres dans le petit secteur boisé ou à proximité. Les membres se trouvaient maintenant à moins de 100 m du sujet et ils tentaient d'obtenir un contact visuel en attendant l'arrivée des Services cynophiles. À plusieurs reprises, ils ont demandé des détails concernant l'arrivée du maître-chien. C'est pendant cette approche que le cap. Cloutier leur a mentionné que le maître-chien, le gend. Ross, arriverait dans quelques minutes.
Contact avec le sujet de préoccupation et fusillade qui a coûté la vie gendarme Fabrice Gevaudan
Le gend. Daigle a vu le sujet dans le boisé situé derrière le 15 Bromfield et il a déclaré à la radio que le sujet s'éloignait de lui à pied, ce qui voulait dire que le sujet était sur le point de sortir du boisé et d'entrer dans une cour. PHOTO
Les gend. Gevaudan et Daigle ont discuté brièvement et le gend. Gevaudan est ensuite passé derrière le 15 Bromfield, à moins de 30 m du sujet, tandis que Daigle est passé devant la maison, vers le côté le plus éloigné, selon les témoins oculaires et les preuves matérielles recueillies. Le gend. Gevaudan avait son pistolet en main et il pointait vers l'endroit où se trouvait le sujet. Le gend. Gevaudan était partiellement caché par les arbres, mais ces arbres lui offraient une protection minime. Le cap. MacLean et le gend. Martel, qui se déplaçaient à bord du même véhicule, ont annoncé par radio leur arrivée sur Willshire Way, juste au moment où le gend. Gevaudan demandait aux membres de « clear the air » (cesser d'utiliser la radio).
Dans sa déclaration, le sujet a affirmé qu'il a entendu quelqu'un crier « hey! ». Il s'est tourné, a aperçu un policier, puis a tiré trois coups rapides; ses balles ont touché de petits arbres environ 5 m devant Gevaudan, avant de frapper la résidence derrière Gevaudan. Le sujet n'a pas semblé remarquer d'autres policiers à part Gevaudan. À ce moment, le gend. Daigle arrivait au coin nord de la maison.
Après que les premiers coups de feu eurent été tirés, le gend. Gevaudan a couru vers le nord-est. Par radio, Gevaudan a déclaré : « he's shooting at me, he's shooting at me » (il tire sur moi, il tire sur moi). L'homme armé a tiré deux coups de feu de plus : l'une des balles a pris une trajectoire directe et l'autre a frôlé un bouleau. Les deux balles ont atteint le gend. Gevaudan sur le côté du torse à une distance d'environ 30 m et ont provoqué des blessures qui l'ont tué presque instantanément. Le gend. Nickerson, qui venait juste de rejoindre Daigle à la maison, a vu le gend. Gevaudan courir derrière le 19 Bromfield avant de le perdre de vue après le dernier coup, mais il n'a pas vu le tireur. Il était 19 h 47.
Le suspect s'échappe et tire sur le gendarme Dave Ross
Après que les premiers coups de feu très puissants furent tirés, le repositionnement tactique de chacun est devenu la priorité et la plupart des membres se sont positionnés en face et à côté du 15 Bromfield. Il n'était pas évident que le gend. Gevaudan avait été atteint de coups de feu. De la route, un membre a entrevu l'homme armé fuir les lieux de la fusillade et traverser les cours sur l'avenue Mailhot. L'homme armé a émergé au sud-est de la rue McCoy.
Pour en savoir plus sur le quartier et sur les emplacements relatifs des maisons, il convient de noter plusieurs aspects. Comme la plupart des maisons n'ont pas de clôtures, il est facile de traverser les cours rapidement. Même si on peut avoir une impression d'ouverture, les arbres, les éléments d'aménagement paysager et les remises qui se trouvent dans de nombreuses cours obstruent souvent le champ de vision. Certains des principaux champs de vision mentionnés dans le présent rapport n'existent plus puisque des clôtures ont depuis été construites et la végétation a poussé. Dans une grande partie du secteur, les numéros des adresses augmentent par tranches de six (p. ex. le 166 Mailhot se trouve juste à côté du 172 Mailhot), mais sur Bromfield, le numéro 15 est suivi du numéro 19.
À ce moment, le gend. Dave Ross ***** approchait rapidement du 15 Bromfield. Sa connaissance de la situation pouvait se limiter à la brève conversation téléphonique qu'il a eue avec le cap. Cloutier et la STO avant que les premiers coups de feu soient tirés. Il a peut-être entendu les messages radio « shots fired » et « he is shooting at me » (des coups de feu sont tirés) et (il tire sur moi), cependant il ne pouvait pas savoir qu'un membre avait été abattu. À bord de son véhicule sur McCoy, il a tourné à droite sur Mailhot en direction de Bromfield. Le gend. Johnstone, qui s'était déplacé au coin de Mailhot et Bromfield, a demandé à Ross de faire demi-tour. Le gend. Ross a effectué un demi-tour et affirmé à la radio : « got a visual, will be on takedown in a second » (j'ai un visuel, je descends de mon véhicule dans une seconde ». À ce moment, le suspect marchait calmement (en direction sud-est) sur l'avenue Mailhot en passant sa carabine d'une main à l'autre. Ross a accéléré rapidement vers l'homme armé qui se trouvait à ce moment à la hauteur d'un véhicule, et de ses deux occupants, immobilisé à un arrêt de l'autre côté de la rue. L'homme armé s'est tourné pour faire face au véhicule de police du gend. Ross qui s'en venait.
Le gend. Ross a actionné les gyrophares et dégainé son pistolet en s'approchant rapidement de l'homme armé. Ross a tiré deux coups à travers le pare-brise en direction du tireur. Une photo qui a abondamment circulé dans les médias montre un groupement de trous très rapprochés dans le pare-brise du véhicule de police. Deux de ces trous ont été faits par les balles tirées par le pistolet du gend. Dave Ross et un seul par une balle de l'homme armé.
Il se peut que Ross ait tenté de heurter le tireur avec son véhicule (le capteur du contrôle de l'accélérateur et le tuyau d'alimentation en carburant ont été touchés par un des premiers tirs de carabine, entraînant ainsi une perte de propulsion). Six balles ont été tirées en direction de Ross – les tirs ont commencé alors que le véhicule approchait du tireur et ils se sont poursuivis pendant que le véhicule roulait sur une courte distance après avoir dépassé le tireur. Le gend. Ross a été atteint de balles au pouce de la main qui tenait son pistolet, à la tête et dans la région de l'épaule gauche. La blessure à la tête l'a tué instantanément. Il était 19 h 49 min 51 s.
Entre le moment où les premiers tirs ont atteint le gend. Gevaudan et le meurtre du gend. Ross, les membres se sont mis à l'abri en face du 15 Bromfield. Des membres sont passé par la cour avant en direction de l'avenue Mailhot, tandis que d'autres ont pris position au coin nord-ouest de la maison, à côté d'un petit terrain de basketball se trouvant sur la propriété. On peut entendre le gend. Daigle essayer de communiquer avec le gend. Gevaudan par radio. Les membres n'avaient pas encore vu le corps du gend. Gevaudan lorsque le gend. Ross a commencé à essuyer des tirs. Il ne s'est écoulé que deux minutes entre le meurtre du gend. Gevaudan et le meurtre du gend. Ross.
Le cap. MacLean a franchi le terrain de basketball à pied jusqu'à ce qu'il découvre le gend. Gevaudan couché face contre sol derrière la cour du 19 Bromfield. Il s'est approché de Gevaudan, l'a retourné et a vu deux blessures par balle distinctes. Il a retiré la veste de Gevaudan, a appliqué une pression sur les blessures et a vérifié ses signes vitaux; il a cru détecter un faible pouls, mais pas de respiration. Le gend. Nickerson l'a rejoint et il a rapidement compris qu'il fallait se mettre à l'abri. Le gend. Daigle est arrivé et les trois ont déplacé Gevaudan vers une ravine peu profonde à côté d'une clôture en bois pour se mettre à l'abri. Le gend. Johnstone est arrivé et le cap. MacLean a demandé aux membres de faire tout ce qu'ils pouvaient pour Gevaudan avant de prendre la radio de Gevaudan et de quitter les lieux pour se lancer à la poursuite de l'homme armé. Les membres ont transporté Gevaudan devant le 19 Bromfield, puis dans le garage.
Le gend. White s'est rappelé avoir approché l'angle Bromfield-Mailhot et avoir observé le gend. Ross faire demi-tour sur l'avenue Mailhot. Il a entendu le véhicule des Services cynophile conduit par le gend. Ross accélérer sur l'avenue Mailhot, puis il a entendu des coups de feu alors qu'il arrivait au coin de la maison se trouvant à l'angle Bromfield-Mailhot. Il a vu le véhicule des Services cynophiles s'immobiliser en face du 166 Mailhot, à 240 m de l'endroit où il se trouvait. White a couru en direction du véhicule des Services cynophiles, passant d'une maison à l'autre pour se mettre à l'abri. Il s'est approché de la vitre du conducteur et a remarqué qu'elle était brisée, mais pas éclatée. Ross était effondré dans le siège du conducteur, il ne réagissait pas et il avait des blessures visibles au cou et au visage. Afin de mieux évaluer l'état de Ross, White a fracassé la vitre avec sa main pour déverrouiller la portière. Il a scruté les lieux du regard et a vu l'homme armé marcher sur l'avenue Mailhot à environ 100 m de lui, au sud-est, et commencer à le viser avec son arme. White s'est mis à l'abri derrière le véhicule de Ross et il a observé l'homme armé se rendre entre les résidences situées au 143 et au 149 Mailhot. Les limites de ces propriétés mènent à un boisé derrière le poste d'incendie Hildegard. White a mentionné à la radio l'endroit où il a vu l'homme armé pour la dernière fois. Il est par la suite retourné sur place pour chercher Ross et le traîner vers un endroit clôturé dans la cour arrière du 166 Mailhot. Il a rapidement constaté le décès du gend. Ross. En réponse à la question de Cloutier qui demandait qui était blessé, White a déclaré « Ross is down, Ross is down » (Ross est à terre, Ross est à terre). Le cap. MacLean et les gend. Mitchell, Martel et Doiron sont allés rejoindre White à cet endroit.
C'est à peu près à ce moment que le cap. MacLean a communiqué le message suivant par radio : « get ERT…call ERT, we need everything we've got! » (faites venir le GTI… appelez le GTI, on va avoir besoin de tout ce qu'on a).
Fusillades sur Hildegard
La gend. Martine Benoit et le gend. Nick Gilfillan étaient au bureau après un quart de travail de jour et ils écoutaient l'appel d'un homme suspect à la radio. Lorsqu'on a signalé que des coups de feu avaient été tirés, le cap. Cloutier est sorti de son bureau et a déclaré que tous les membres devaient aller sur le terrain. La gend. Benoit est immédiatement entré en service et le gend. Gilfillan, qui avait déjà revêtu sa tenue civile, est allé remettre son uniforme avant d'intervenir. À peu près au même moment, les membres du Groupe des crimes majeurs (GCM) le cap. MacPherson, le cap. Jean Belliveau, le cap. Michel Dupuis et le gend. Doug Larche, qui travaillaient en civil à une enquête distincte, sont retournés au détachement pour obtenir des fusils et intervenir en renfort.
La gend. Benoit a actionné les gyrophares et la sirène de son véhicule avant de se rendre dans le secteur, puis elle a tourné sur Hildegard Drive lorsque la STO a déclaré que le suspect était à l'angle Hildegard- Mailhot. Fait à souligner, la STO a reçu l'appel d'un témoin qui avait suivi l'homme armé sur Hildegard. Le témoin a d'abord aperçu l'homme armé couché sur la pelouse près du poste d'incendie Hildegard en train de pointer son arme vers le nord-ouest, en direction de Mountain Road. L'appelant a ensuite observé l'homme se relever et marcher en direction sud-ouest, vers l'intersection avec l'avenue Mailhot. L'homme armé a commencé à jogger lentement, il a traversé l'avenue Mailhot pendant que le civil le suivait à une certaine distance, et est entré dans le boisé à la hauteur du virage sur Hildegard, juste à l'ouest de l'avenue Mailhot. Cet appel a duré presque trois minutes et l'information concernant l'endroit où l'homme armé est entré dans le boisé a été diffusée. L'opérateur de la STO a informé le témoin qu'une voiture de police approchait de l'endroit où il se trouvait. L'appelant a répondu qu'il voyait la voiture de police et l'appel avec la STO a pris fin. Il était 19 h 54.
Plusieurs civils ont fait des signes à la gend. Benoit à l'angle Hildegard-Mailhot et ils pointaient l'endroit où l'homme armé est entré dans le boisé. Elle a garé son véhicule au coin des rues et a entrouvert la porte sans descendre du véhicule. Elle était en train d'évaluer la situation lorsqu'elle a commencé à essuyer des tirs. Elle s'est baissée rapidement pour utiliser le moteur du véhicule comme protection, puis elle a essayé de faire marche arrière, mais le véhicule ne bougeait pas, un tir l'avait endommagé. La gend. Benoit a déclaré à la radio qu'elle essuyait des tirs provenant de l'avant du véhicule. La gend. Benoit n'a jamais été en mesure de voir le tireur. Des témoins ont déclaré que la policière ne pouvait pas voir le tireur parce que ce dernier se baissait et ne relevait la tête que toutes les quelques secondes, à partir d'un fossé très ombragé et boisé. La gend. Benoit a aussi déclaré à la radio que sa voiture était en panne. À plusieurs reprises, la gend. Benoit a demandé à la radio s'il était sécuritaire qu'elle sorte de son véhicule et elle a demandé de l'aide.
Le gend. Eric Dubois, qui a quitté Bromfield Court pour récupérer son véhicule sur l'avenue Pioneer, était maintenant garé à l'angle Hildegard- Mountain pour bloquer la circulation. Lorsqu'il a entendu la demande d'aide de la gend. Benoit, il s'est dirigé vers elle et a garé son véhicule à côté de celui de la gend. Benoit pour fournir une protection supplémentaire contre le tireur. Il a demandé à la gend. Benoit de se repositionner derrière son véhicule à lui. L'homme armé a tiré plusieurs autres coups en leur direction et le gend. Dubois a été blessé en tentant de repérer la position du tireur. Le gend. Dubois a couru jusqu'à la caserne après avoir vu l'homme armé traverser Hildegard. La gend. Benoit, ne sachant pas que le tireur avait quitté les lieux, a décidé de demeurer à l'abri et elle a demandé que quelqu'un aille la chercher. Le gend. Nick Gilfillan, qui venait d'arriver à la caserne, s'est rendu en véhicule à l'endroit où elle se trouvait. Elle est montée dans sa voiture et ils sont retournés à la caserne de pompiers.
Les gend. Benoit et Dubois ont tous deux mentionné des pauses entre les tirs. Un photographe de presse a pris plusieurs clichés montrant Benoit et Dubois derrière le véhicule de Dubois (voir plus bas) ainsi que des véhicules de civils en arrière-plan. Sans le savoir, il prenait ces photos à partir d'un endroit sur Hildegard se trouvant au nord-est de l'emplacement du tireur, juste de l'autre côté de la rue.
La gend. Goguen travaillait dans le District du Sud-Est, qui borde le secteur du Détachement de Codiac. Le District du Sud-Est utilise une fréquence radio différente et les communications sont diffusées par l'intermédiaire de la STO au quartier général de la Division J à Fredericton. Les membres peuvent utiliser ***** qui leur permet d'entendre les communications radio sur les autres canaux, mais celles-ci sont mises en sourdine lorsqu'il y a des communications simultanées sur leur propre canal. La gend. Goguen a été mis au courant de la situation qui se déroulait à Codiac *****.
Elle a par la suite téléphoné à son superviseur, le gend. Donnie Robertson, et pendant qu'elle lui parlait, elle a actionné ***** de sa radio et a entendu la gend. Benoit à la radio dire qu'elle était la cible de coups de feu. La gend. Goguen a ensuite entendu le serg. Andre Pepin demander que les voitures du District du Sud-Est se trouvant à proximité de Hildegard soient envoyées en renfort. La gend. Goguen a répondu qu'elle se trouvait dans le secteur et on lui dit de se rendre au poste d'incendie Hildegard. Elle a remarqué plusieurs véhicules civils qui faisaient demi-tour sur Hildegard, puis elle a entendu des coups de feu à proximité. La gend. Goguen effectuait un demi-tour lorsqu'elle a entendu d'autres coups de feu et vu la vitre du côté passager voler en éclat; deux autres tirs ont atteint la portière du passager au-dessus de la poignée. Au moment où elle s'éloignait, une autre balle a fracassé la vitre du côté conducteur. Six balles ont atteint la voiture de la gend. Goguen et quatre d'entre elles sont passées extrêmement près de l'atteindre. Après le dernier coup de feu tiré en direction de la gend. Goguen, le coup de feu qui a blessé le gend. Dubois a été tiré.
La complexité de la situation – Évolution de plusieurs événements
Comme la gend. Goguen utilisait un canal différent et comme la STO de Codiac ne savait pas qu'elle se rendait sur les lieux, on ne savait pas exactement combien de membres avaient été abattus, où le suspect se trouvait et à quels endroits les ambulances devaient se rendre. Deux rapports erronés ont été signalés à propos de coups de feu tirés sur Lonsdale et de la présence de l'homme armé à l'angle Lonsdale-Mailhot (il ne s'agit pas d'une intersection réelle). Il y a également eu un signalement indiquant qu'il se trouvait sur Foxwood Drive et qu'il se déplaçait en direction de Ryan tandis qu'en réalité il avait déjà traversé Hildegard et se dirigeait vers Mailhot. La gend. Goguen s'est finalement rendue en véhicule sur la rue Penrose après avoir été aidée par le gend. Robertson. Ce dernier et le gend. Ugo Desjardins, également du District du Sud-Est, ont assuré sa protection et ont appelé une ambulance. À ce moment, les membres qui s'occupaient du gend. Gevaudan attendaient une ambulance au 15 Bromfield.
Une certaine confusion régnait concernant l'état du gend. Ross et, par conséquent, on croyait qu'une ambulance devait se rendre au 166 Mailhot. De plus, le gend. Dubois avait appelé une ambulance à la caserne de pompiers et maintenant les collègues de Goguen demandaient la présence d'une ambulance sur Penrose. Conformément à la politique en place, aucune ambulance ne peut entrer dans le secteur d'une fusillade en cours. La gend. Goguen a par la suite été transportée à l'hôpital par ses collègues qui ont compris que l'ambulance ne viendrait pas. Le gend. Dubois a été transporté à l'hôpital par la gend. Mitchell dans une voiture qu'il a réquisitionnée à un civil.
Poste d'incendie Hildegard
Le stationnement de la caserne est devenu une zone d'étape pour la police, tout juste à l'extérieur de la ligne de tir sur Hildegard. La cap. Lisa Whittington venait de commencer son quart de travail à 19 h comme superviseuse du quart de nuit; elle intervenait à partir de son bureau après que le cap. Cloutier lui ait demandé d'aider le cap. MacLean à superviser les lieux. Les gendarmes Doiron, Gilfillan, Martel, Benoit, Verret et Johnstone se trouvaient également à la caserne de pompiers. Après avoir transporté la gend. Goguen à l'hôpital, les gend. Robertson et Desjardins sont aussi revenus à la caserne de pompiers. Tout au long de l'incident, les résidents ont continué de circuler à pied et dans des véhicules. Étant donné que l'homme armé a eu de multiples occasions de tirer sur des civils, les membres ont commencé à supposer qu'il ciblait seulement des policiers. Pour cette raison, les membres se sont mis à l'abri dans la caserne.
Sur l'enregistrement vidéo de la scène qui s'est déroulée à la caserne de pompier pendant ce temps, on entend le son des coups de feu tirés lors de l'échange entre le gend. Larche et l'homme armé. On a entendu à la radio qu'un civil a été abattu sur Isington (il s'agit en fait du gend. Larche qui n'était pas en uniforme). Les gendarmes Doiron, Gilfillan, Martel et Verret ont déterminé qu'il s'agissait d'un élément qui changeait la donne et ils ont commencé à se déplacer en direction d'Isington. Gilfillan a revêtu son gilet pare-balles rigide (GPBR) et il a demandé aux autres membres de faire de même. Ils ont commencé à se déplacer en équipe sur l'avenue Mailhot en direction d'Isington.
Fusillade qui a coûté la vie au gendarme Doug Larche
Le gend. Doug Larche, un des membres du GCM en tenue civile qui est revenu au détachement pour prendre un fusil avant de se rendre sur les lieux, s'est garé au panneau d'arrêt sur Isington au coin de Mailhot en direction ouest. Il a communiqué par radio à la STO qu'il se rendrait à pied à l'angle Isington-Mailhot avec un fusil. Le gend. Larche n'a pas mentionné avoir vu l'homme armé. L'homme armé a été aperçu (par un civil) en train de marcher sur Mailhot en direction de la position de Larche et, en apercevant Larche, il s'est précipité vers les arbres derrière le 71 Isington (la maison à l'angle Isington-Mailhot). Lorsqu'il s'est aperçu que Larche était un policier parce qu'il portait un gilet pare-balles souple (GPBS), il a tiré quatre coups de feu en sa direction à partir de sa position cachée par les arbres du côté ouest de la maison. Larche a été blessé par des tirs de carabine qui ont traversé son véhicule et il est tombé au sol. L'homme armé est allé derrière le 71 Isington et est ressorti de l'autre côté de la maison. Larche a malgré tout trouvé la force de se lever et de tirer un coup de feu, mais il a été tué par une balle à la tête tirée à partir du côté est du 71 Isington. On sait que Larche a tiré un total de sept coups de feu à l'aide de son arme de service durant cet échange de coups de feu de 70 secondes. Il était 20 h 07.
Le gend. White a entendu l'appel disant qu'un agent avait été abattu au 16, avenue Mailhot. Comme il se dirigeait déjà à cet endroit, il a continué à pied en passant d'une cour à l'autre. Il a fait le tour d'une maison et a aperçu le véhicule criblé de balles du gend. Larche ainsi que plusieurs civils massés autour. Un des civils a pointé vers la rue Isington et a déclaré que l'homme armé se tenait debout à cet endroit cinq minutes plus tôt, mais qu'il avait pris la fuite derrière les maisons. Le gend. White et un civil ont déplacé le corps du gend. Larche à l'intérieur du 71 Isington. Le gend. White a pris la radio pour donner sa position et communiquer l'état du gend. Larche. Lorsque les civils ont commencé à se rassembler de nouveau autour du véhicule de Larche, White est allé à l'extérieur pour récupérer le pistolet, le fusil et la radio de Larche qui se trouvaient par terre.
Les fusillades ayant coûté la vie aux gendarmes Fabrice Gevaudan, Dave Ross et Doug Larche se sont déroulées en 20 minutes.
Après la dernière fusillade, on a observé l'homme armé s'enfuir dans le boisé derrière l'avenue Isington et traverser le boisé au sud de la rue Ryan. C'est la dernière fois qu'on a vu le tireur avant qu'il ne disparaisse pendant plusieurs heures. Lorsque l'homme armé est entré dans le boisé, les membres ont conservé leur position et ne l'ont pas poursuivi.
Chasse à l'homme après les fusillades
La description de cette partie de la chasse à l'homme est moins détaillée que le récit des fusillades. Voici un compte rendu sommaire des personnes responsables d'endroits clés pendant la chasse à l'homme, de la façon dont les structures de commandement ont été établies, des mesures prises lorsque les ressources ont été mobilisées et de l'arrestation du suspect.
Au départ, le cap. Jacques Cloutier, sergent intérimaire, a assuré le commandement à partir de son bureau au Détachement de Codiac et cet endroit est devenu le centre des opérations. Comme Cloutier était extrêmement occupé à faire venir et à affecter des ressources pour le bouclage, les membres sur les lieux ont en grande partie été laissés à eux-mêmes. Moins de trente minutes après les premiers tirs, les officiers brevetés et les sous-officiers supérieurs ont commencé à se rassembler au Détachement de Codiac. La structure de commandement est devenue moins claire pour certains membres du personnel à l'arrivée de l'officier des opérations du Détachement de Codiac, l'insp. David Vautour, à 20 h 20. Cloutier et Vautour ont continué de gérer différents aspects de l'incident à partir du même bureau. L'insp. Vautour est devenu commandant des interventions à ce moment, un préposé au registre des communications a été désigné et les membres du personnel se sont vus confier des tâches précises. Les premiers intervenants sur le terrain n'ont pas été mis au courant de la structure de commandement. Cloutier et Vautour étaient extrêmement occupés et la situation au Détachement de Codiac était mouvementée. L'information était acheminée par téléphone, par radio, par le CIIDS, par des rapports directs des membres sur place et par des rapports médiatiques. *****. Le surint. Tom Critchlow, commandant des interventions critiques (CIC), s'est présenté au Détachement de Codiac *****. Il a prêté main-forte à l'insp. Vautour et au cap. Cloutier, *****.
Aucun message n'a été diffusé par un commandant concernant la menace particulière pour les membres, quoique les membres aient été informés grâce au bouche-à-oreille. Certains membres sur place n'ont pas été informés de l'ampleur des pertes de vie avant plusieurs heures. De nombreux membres se sont rendus à pied ou à bord de véhicules de police identifiés au dernier emplacement connu du suspect, près de la rue Ryan et du boulevard Wheeler.
Comme ils ne connaissaient pas l'emplacement du suspect, on a par la suite déterminé qu'ils se sont trouvés dans une situation très vulnérable.
Les deux premiers membres du Groupe tactique d'intervention (GTI) de la Division en arrivant sur les lieux ont rejoint un membre des Services cynophiles. Ce dernier a cru que son chien avait trouvé un point de départ à partir duquel il pourrait traquer le suspect dans un secteur boisé entre la rue Ryan et la route 15. Lorsque deux autres membres du GTI sont arrivés, le membre des Services cynophiles a commencé à traquer le suspect dans le boisé avec les quatre membres du GTI en renfort. Lorsque le chef d'équipe, qui était toujours en route vers Moncton, a été informé de la poursuite, il a ordonné aux membres d'y mettre fin parce qu'il commençait à faire noir et que le risque d'une embuscade était trop grand.
À ce moment, c'est-à-dire moins d'une heure après les derniers coups de feu, des policiers provenant d'autres districts, détachements et organismes municipaux, de même que des membres de la Division H ont afflué à Moncton en réponse aux demandes de ressources du Détachement de Codiac. Aucun mécanisme de suivi et de coordination de ces ressources n'était en place et les membres ont commencé à arriver dans la région de Moncton sans savoir où ils devaient aller ou ce qu'ils devaient faire. *****.
Pendant toute la soirée, les membres ont répondu à des appels de personnes affirmant avoir aperçu l'homme armé, mais chaque fois il était impossible de vérifier s'il s'agissait bien du suspect et ces messages étaient diffusés à la radio sans être accompagnés d'informations suffisantes et d'un sens tactique. De plus, les membres n'ont pas maintenu les positions qui leur avaient été assignées à l'intérieur du périmètre semi-établi et plus ou moins étanche. De nombreux membres ont pris position et sont intervenus à la suite de la diffusion de l'information, et ce, sans en informer un responsable et sans demander de précisions sur la ou les personnes responsables. La STO, entre autres, a affecté les membres à des emplacements généraux du périmètre, cependant les membres n'ont pas été avisés de signaler leur position. Personne au Détachement de Codiac n'effectuait le suivi de ces emplacements, des identités des membres, des armes supplémentaires sur place ou de la durée des quarts de travail. Les membres qui ont répondu aux questions de l'équipe d'examen ont décrit cette période comme étant chaotique et désorganisée.
Peu après 21 h 15, des images de l'homme armé s'éloignant à pied des lieux de la fusillade sur Hildegard ont été diffusées dans des reportages et dans les médias sociaux. Le photojournaliste qui a été témoin de la fusillade contre la gend. Goguen a pris les photos à l'aide d'un téléobjectif peu après la fusillade. Des membres de la famille et des amis de l'homme armé ont rapidement appelé le 911 pour identifier le suspect comme étant Justin Bourque, un résident Moncton âgé de 24 ans qui habitait au 13, avenue Pioneer. *****.
Le personnel du Détachement de Codiac a tout d'abord désigné le Colisée de Moncton (un immeuble doté de vastes parcs de stationnement situé à environ deux kilomètres des fusillades) comme poste de commandement et les membres qui arrivaient étaient dirigés à cet endroit. L'inspecteur Kevin Leahy, le premier commandant des interventions critiques (CIC) accrédité qui a été affecté à l'intervention, a décidé qu'il s'agissait d'un emplacement inadéquat et le poste de commandement a été déménagé à la Garnison de Moncton, un détachement de la base des Forces canadiennes de Gagetown (anciennement BFC Moncton). En fin de compte, le poste de commandement des interventions critiques n'a pas été opérationnel avant 3 h le 5 juin.
Pendant la chasse à l'homme, diverses activités policières liées aux tactiques et à l'enquête se déroulaient simultanément à un endroit qu'on croyait près de l'emplacement où se terrait un tueur de policiers lourdement armé. Comme on ne connaissait pas l'emplacement de Bourque, il était impossible d'établir un périmètre définitif et un bouclage efficace, par conséquent, toutes les activités policières étaient extrêmement risquées. Les commandants des interventions, de même que tous les intervenants détachés, étaient confrontés au fait que Bourque possédait un net avantage tactique, y compris la capacité de faire feu sur un policier ou n'importe qui d'autre s'il le voulait.
En plus de la recherche active de Bourque, il y avait de nombreux lieux de crime à examiner dans le cadre de l'enquête criminelle en cours sur les meurtres et les tentatives de meurtre commis. Comme ces lieux étaient tous à proximité du dernier endroit où l'homme armé avait été vu, des périmètres protégés ont été établis autour des enquêteurs à ces endroits. Il a également fallu composer avec tout un défi logistique pour équiper et détacher des centaines de membres de la GRC et de policiers de différents services qui arrivaient des provinces de l'Atlantique et du centre du pays afin qu'ils soient prêts.
Parmi les centaines de policiers arrivés à Moncton, il y avait une centaine des membres d'équipes tactiques sur les lieux. Trois des quatre GTI des régions de l'Atlantique, de même que ceux des divisions C et nationale, ont été déployés. Les services de police municipaux de Bathurst, de Miramichi, de Fredericton et de Saint John ont également mis leurs équipes tactiques à contribution. Ces équipes ont pu compter sur le soutien direct de six préposés au registre des communications, de quatre radiotechniciens, de 14 membres du Groupe des interventions médicales d'urgence (GIMU), de 11 équipes cynophiles ainsi que des membres du Groupe de l'enlèvement des explosifs (GEE) et des Affaires spéciales I. Cinq véhicules tactiques blindés (VTB) de la GRC ainsi que des aéronefs du Service de l'air de la GRC (y compris des transporteurs commerciaux nolisés) et de Transports Canada ont fourni un soutien tactique et logistique.
Dès le moment où Bourque s'est enfui dans le boisé, il s'est toujours trouvé à proximité d'un grand nombre de policiers. Au cours de cette période de 29 heures, des membres, notamment des GTI, ont donné suite à de nombreux signalements du suspect à quelques kilomètres du dernier lieu de crime. Seulement deux des signalements ont semblé exacts.
Lorsque le GTI est intervenu à la suite du premier signalement apparemment fondé sur Isington, peu après minuit le 5 juin, Bourque avait disparu une fois de plus. Le deuxième signalement vérifié près de Mecca Drive a mené à son arrestation.
L'arrestation
Tard dans la soirée du 5 juin, un appel a été effectué depuis une résidence située à l'extrémité est de Mecca Drive par un résident qui a vu un homme accroupi à l'extérieur, sous la fenêtre de la cuisine, et qui portait une veste de camouflage et des pantalons bruns. L'homme a couru dans le boisé derrière la maison. Des membres du GTI à bord de VTB se sont rendus sur place et un aéronef ***** a été déployé *****.
*****.
*****.
*****. Il a donné l'ordre suivant : « come out with your hands up! » (sors les mains en l'air). Le suspect a répondu : « I give up, don't shoot! » (je me rends, ne tirez pas). Il a laissé ses armes derrière lui et est sorti de sa cachette les mains en l'air. Les membres ont rapidement confirmé qu'ils avaient arrêté Justin Bourque.
Dans la lettre de mandat destinée à l'agent de révision, le commissaire a décrit 13 éléments à examiner. Chacun des éléments sera traité séparément, à l'exception du numéro un : Tactiques employées et intervention effectuée à la suite du premier appel, et du numéro deux : Prise de décisions et évaluation des risques à la suite du premier appel. Ces deux sections seront combinées en une seule section en raison de leur interdépendance.
Dans le présent rapport, il est nécessaire de répéter certaines informations en raison de l'interdépendance des 13 sections. Bon nombre des sections n'existent pas isolément; voilà pourquoi il y a des chevauchements et une répétition de l'information entre certaines sections.
Section 1 : Tactiques employées et intervention effectuée à la suite du premier appel
Question du commissaire : En tenant compte de la façon dont les membres ont été dépêchés et coordonnés à la suite de cet appel, est-ce que des améliorations peuvent être apportées à la formation, aux politiques ou à d'autres secteurs de la GRC? Peut-on recommander des améliorations aux tactiques employées compte tenu des faits qui étaient connus à ce moment?
L'intervention tactique sera examinée dans cette section, cependant les améliorations à apporter à la formation et aux politiques seront examinées aux points correspondants dans les 13 sections.
Section 2 : Prise de décisions et évaluation des risques à la suite du premier appel
Question du commissaire : Avons-nous eu l'occasion de réévaluer l'appel et notre intervention au tout début de celle-ci?
Le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents (MIGI)
Le MIGI est une aide visuelle et un guide conçu pour aider un policier à exposer le processus de prise de décision associé au choix d'une option d'intervention donnée. Le MIGI n'est pas une politique ni une loi, et il ne doit pas servir à justifier les gestes posés par un policier. Il importe de comprendre qu'il ne s'agit pas d'une démarche étape par étape servant à justifier les gestes posés par le policier. L'option d'intervention choisie par un policier est déterminée par plusieurs variables, qui sont expliquées ci-dessous.
Le MIGI repose sur six principes fondamentaux :
La responsabilité première de tout policier consiste à préserver et à protéger la vie.
Le principal objectif de toute intervention est la sécurité publique.
La sécurité du policier est essentielle à la sécurité publique.
Le MIGI a été élaboré en tenant compte des lois et des politiques; il ne remplace pas les lois et les politiques, ni ne s'y ajoute.
Le MIGI est constamment lié à l'évaluation des risques.
L'évaluation des risques est continue et elle évolue tout au long de l'intervention/de la situation.
La terminologie faisant allusion à « l'intervention la moins musclée », au « moindre degré de force nécessaire » ou à « l'intervention qui cause le moins de blessures » a été retirée du Code criminel parce que les tribunaux ont estimé qu'il s'agissait d'une attente irréaliste pouvant mettre en péril la sécurité des policiers. Cette terminologie a été remplacée par la force « nécessaire » ou « raisonnable » pour maîtriser le sujet ou la situation.
Il n'existe pas de processus pas à pas pour évaluer les risques puisque leur évaluation est effectuée de façon continue tout au long de l'intervention. L'évaluation des risques est influencée par le type d'événement (planifié, en cours ou spontané). L'évaluation des risques repose sur les quatre catégories suivantes qui sont décrites dans le MIGI.
Éléments de la situation : les éléments de la situation peuvent changer durant un incident et avoir des répercussions directes sur l'évaluation menée par le policier. Les voici :
L'environnement : les conditions météorologiques (si la situation se déroule à l'extérieur), l'éclairage, l'emplacement, la présence d'éléments pouvant servir d'abri ou de cachette, la présence de risques biologiques, etc.
Le nombre de sujets (par rapport au nombre de policiers).
Les perceptions sur les capacités du sujet : affaiblies par une forme d'intoxication, accrues par une forme d'intoxication, taille/force/aptitudes athlétiques, état émotif.
Temps et distance : présence ou non de chemins de fuite (pour le policier et le sujet); la situation permet-elle au policier d'avoir un intervalle de réaction (temps/distance accru).
Indices de menace : verbaux et/ou non verbaux.
Connaissance du sujet (notamment les expériences personnelles antérieures avec le sujet; réputé armé et dangereux, etc.).
Comportement du sujet : il est essentiel de comprendre que l'intervention d'un policier tient compte de l'ensemble de la situation et que le seul comportement du sujet ne suffit pas à dicter l'option d'intervention appropriée.
Considérations tactiques (le modèle met l'accent sur le repositionnement tactique) :
Frapper/utiliser une option d'intervention et se déplacer (au moment d'utiliser une option d'intervention ou de frapper, il est recommandé de s'éloigner de la position initiale de façon à ce qu'un sujet concentré ne puisse pas simplement attaquer la dernière position connue du policier).
Gagner du temps et accroître la distance (plus le policier passe de temps à acquérir et à analyser de l'information, plus il a de chance d'utiliser l'option d'intervention appropriée).
Se mettre à l'abri (à supposer qu'un abri soit disponible, cette considération aura le même effet que si on gagne du temps et on accroît la distance. Une fois en sécurité, un policier devrait être en mesure de traiter l'information plus efficacement).
Se replier complètement (de manière à pouvoir endiguer la situation en attendant des renforts par exemple). Le policier doit comprendre et accepter que, parfois, il est impossible de se replier complètement (par exemple en présence d'un tireur actif) – il doit protéger et préserver la vie.
Perception du policier : l'ensemble de la situation est évalué par une personne qui possède des attributs qui lui sont propres (compétences, connaissance, sexe, expérience, peurs, confiance, fatigue/condition physique, etc.). Le policier doit continuellement évaluer les risques et choisir l'option d'intervention la plus adéquate compte tenu, selon sa perception, de toutes les circonstances entourant la situation. La perception du policier doit être raisonnable. Deux policiers confrontés à des situations en apparence identiques interviendront probablement de manière différente. L'intervention doit être examinée en regard des actions de policiers raisonnables, formés et prudents qui sont confrontés au même ensemble de circonstances.
*****. L'intervention initiale de plusieurs membres le 4 juin a été robuste et appropriée, en fonction de la plainte initiale, du MIGI et de la politique de la GRC sur les renforts. Un nombre suffisant de membres ont été dépêchés et dirigés lors de l'intervention. Lors de la rédaction du premier rapport, la fin d'un quart de jour et le début d'un quart de nuit se chevauchaient. Plusieurs membres qui avaient terminé leur quart étaient toujours au bureau et ont repris leurs fonctions lorsque l'incident s'est aggravé. *****. La STO a obtenu une description détaillée lors des deux premières plaintes provenant de l'avenue Pioneer. Cette information a été diffusée et les intervenants ont été désignés. Le processus d'évaluation des risques a débuté à ce moment.
Le Détachement de Codiac a une politique sur le bouclage et les périmètres en vertu de laquelle *****. Les membres ont efficacement été orientés vers les endroits appropriés par la STO afin de mettre en place un périmètre initial, ce qu'ils ont fait après avoir actionné les gyrophares et la sirène de leur véhicule. Sans connaître l'intention du sujet, l'établissement d'un périmètre dans le but d'obtenir un contact visuel était une intervention policière appropriée. Les membres qui connaissaient le quartier ont apporté leur soutien afin que le périmètre soit le plus efficace possible.
Les recommandations liées au fonctionnement de la STO se trouvent à la section 7 : Communications opérationnelles.
Le gend. Doiron a été le premier membre à arriver sur l'avenue Pioneer et il a été en mesure de recueillir des renseignements supplémentaires qu'il a ensuite transmis aux autres intervenants, dont le fait que le sujet de préoccupation semblait être irrité. Ce détail aurait dû alerter les intervenants lors de leur évaluation des risques. Le responsable de la circulation lors de cet incident a demandé à Doiron de rester à l'extérieur du boisé et d'attendre les Services cynophiles. Le cap. Cloutier a immédiatement déterminé que la présence des Services cynophiles était requise pour traquer le sujet et il a communiqué avec le membre des Services cynophiles en disponibilité. Le gend. Johnstone a été le premier membre à arriver sur l'avenue Mailhot. Il a demandé s'il devait ordonner aux civils de rentrer dans leur maison et le cap. Maclean a répondu que ce serait une bonne idée. Les résidents à qui on a demandé de regagner leur maison ont signalé que les membres prenaient clairement la menace au sérieux. Tous ces gestes étaient judicieux sur le plan tactique. Pendant toute la durée de l'incident, certains résidents ont ignoré les ordres de la police d'évacuer le secteur et sont devenus une distraction.
Deux mesures précises que les membres qui sont intervenus n'ont pas prises, malgré l'évaluation des risques et les éléments de la situation connus à ce moment, et qui constituent une source de préoccupation. Même si on avait clairement signifié que le sujet transportait des armes à feu, aucun intervenant n'a enfilé son GPBR et un seul membre qui est parti du Détachement de Codiac pour se rendre sur les lieux a pris l'initiative d'apporter un fusil. *****. Une discussion concernant les choix d'armes et de GPBR est décrite en détail dans une section ultérieure.
Les recommandations concernant les gilets pare-balles rigides et les armes à feu se trouvent à la section 5 : Équipement et armes.
Lors de la mise en place du périmètre, les intervenants utilisaient des communications radio appropriées. Leurs véhicules et leurs emplacements ont été confirmés par l'intermédiaire de la STO. On a demandé au gend. Dubois de parler avec un plus grand nombre de témoins dans le but d'identifier le sujet.
La situation a commencé à changer rapidement lorsque le gend. Daigle a aperçu le sujet. Lors du premier contact visuel, le gend. Daigle a demandé à tous les membres de cesser d'utiliser la radio (« clear the air ») afin qu'il puisse communiquer des renseignements à jour à tout le monde. Le gend. Daigle a déclaré avoir vu le sujet ainsi que l'endroit où il se dirigeait à pied. À ce moment, étant donné qu'il pouvait voir le suspect, il a assumé un rôle de premier plan lors de l'incident. Les autres intervenants ont commencé à se repositionner en tenant compte de cette information. Une intervention verbale était une option pour Daigle à ce moment, mais selon sa perception, le sujet n'était pas à portée de tir. Le fait de donner son emplacement aurait pu présenter un important désavantage tactique en cas de fusillade, étant donné que le sujet possédait une carabine. La décision de Daigle d'essayer de maintenir un contact visuel avec le sujet était également appropriée étant donné que le maître-chien n'était pas encore arrivé et que le sujet entrait dans un secteur résidentiel.
Peu de temps après, le gend. Daigle a perdu le contact visuel direct avec le sujet, mais il croyait savoir qu'il se dirigeait derrière les résidences du côté sud de Bromfield. À partir de leurs différentes positions à l'intérieur du périmètre, d'autres membres ont rapidement convergé à pied vers l'emplacement du gend. Daigle afin de lui fournir de l'aide et d'essayer d'établir un nouveau contact visuel avec le sujet. Au moment où ils approchaient de l'endroit où on croyait avoir aperçu le suspect pour la dernière fois à pied, les membres sont sortis de leur véhicule. Malheureusement, ils ont aussi laissé leur GPBR *****. Toute information concernant ces membres devait maintenant être transmise par radio. Cette situation a compliqué la tâche de la STO et des superviseurs de veille qui devaient déterminer où se trouvaient les membres en tout temps.
À ce moment, les membres avaient pour objectif d'établir un nouveau contact visuel avec le sujet afin d'effectuer une intervention verbale et de coordonner le bouclage avec efficacité. Voici certains facteurs situationnels ayant une incidence sur l'évaluation des risques réalisée par les membres appelés à intervenir :
la topographie du quartier;
la présence de nombreux passants civils;
les membres qui manquent d'armes d'épaule adéquates;
le délai inconnu avant l'arrivée des Services cynophiles;
le comportement et les intentions inconnues du sujet.
Chacun de ces facteurs a influencé leur décision de se rapprocher rapidement. La perception que les membres avaient du danger pour la population a eu une incidence sur leurs évaluations des risques et a créé un sentiment d'urgence compréhensible dans leur tentative de repérer le sujet. Le fait de le repérer de nouveau éliminerait le besoin d'attendre l'arrivée des Services cynophiles pour lancer l'opération de traque, permettrait la mise en œuvre des plans de bouclage et fournirait des renseignements indispensables sur ses gestes et son comportement.
Le gend. Daigle a rencontré brièvement le gend. Gevaudan quelque temps après avoir perdu le suspect de vue. Par la suite, en équipe, ils se sont servis de la couverture que leur procurait le secteur boisé derrière les résidences situées au 15 et au 19 Bromfield de la meilleure façon possible pour dissimuler leur approche vers l'endroit où ils croyaient que le sujet se cachait. Le gend. Gevaudan a informé les autres membres à la radio de l'endroit où le gend. Daigle et lui étaient positionnés. La communication radio entre le cap. Cloutier et le gend. Doiron révèle clairement que le membre des Services cynophiles (le gend. Ross) serait en poste dans quelques minutes. Au même moment, les gend. Mitchell, Johnstone et Doiron criaient aux résidents de rentrer dans leur maison sur Willshire, ce qui était une mesure prudente.
Les échanges précis entre le gend. Daigle et le gend. Gevaudan concernant le plan tactique qu'ils ont élaboré sont inconnus. Leur discussion n'a pas été diffusée à la radio et, par conséquent, aucun autre membre n'a été mis au courant des détails de leur stratégie visant à poursuivre leur traque du suspect ou de ce qu'ils feraient lorsqu'ils l'auraient repéré.
On a déjà mentionné dans le présent rapport que la fiabilité des souvenirs individuels et collectifs des membres n'était pas constante. Cette situation est compréhensible étant donné les incidents traumatisants qui ont suivi et parfaitement normale. Compte tenu de cette réalité, l'équipe d'examen doit procéder à une évaluation de ce qui s'est passé durant les secondes cruciales où les premiers coups de feu ont été tirés en combinant l'information réputée fiable avec les comptes rendus possiblement moins fiables des témoins oculaires. D'après une radiotransmission, on a déterminé que les gend. Gevaudan et Daigle étaient ensemble dans le secteur boisé derrière le 15 Bromfield. La présence du gend. Daigle a été captée par une caméra de surveillance en face du coin nord-ouest de cette résidence et le gend. Gevaudan n'est pas avec lui. Sur la vidéo, on voit le gend. Daigle effectuer une radio transmission à l'aide de sa radio portative, ce qui correspond à un enregistrement lors duquel il demande au gend. Gevaudan de lui dire à quel endroit il (Gevaudan) se trouve.
Aucun coup de feu n'avait été tiré à ce moment. Plusieurs autres membres sont par la suite apparus sur l'enregistrement vidéo. Plusieurs membres se sont dirigés vers Bromfield tandis que d'autres (notamment le gend. Daigle) se sont déplacés le long de la façade de la maison vers les garages du côté nord-est. Le gend. Gevaudan ne se trouvait dans aucun des deux groupes.
Le gend. Gevaudan a apparemment décidé d'aller derrière la résidence au 15 Bromfield. Nous ne connaissons pas les raisons précises qui l'ont incité à prendre cette décision; s'il a vu Bourque, il n'a pas communiqué ce fait à la radio. S'il a décidé de se repositionner après avoir évalué la situation, il ne l'a pas communiqué au gend. Daigle. Il s'est servi de la radio pour demander aux membres de cesser d'utiliser les ondes. Par la suite, pendant que les membres se déplaçaient devant la maison, des coups de feu ont retenti à l'arrière de celle-ci. Presque au même moment, on entend le gend. Gevaudan crier à la radio : « He's shooting at me! » (Il tire sur moi!).
À ce stade, il se trouve seul, armé de son seul pistolet tandis que le suspect est armé d'une carabine semi automatique puissante. Ce dernier se trouve en position de feu statique, ce qui lui offre une couverture contre un tir de pistolet (sous forme d'arbres et peut être de dépression dans le sol) et une dissimulation (arbres, feuillage et ses vêtements de camouflage). Le gend. Gevaudan, par contre, est plus visible dans son uniforme, qui se démarque nettement de son environnement. Le fait que des témoins dans les maisons avoisinantes étaient en mesure de voir l'uniforme des membres à travers le feuillage le confirme. Justin Bourque disposait donc d'un avantage tactique considérable.
On ne sait pas ce que le gend. Gevaudan a vu, ni ce qui l'a incité à rester derrière la maison pendant que le gend. Daigle la contournait pour se rendre à l'avant. Ce qui est certain, c'est que sa vie était en danger immédiat, et que sa priorité indubitable aurait été de chercher un abri. Ses actes répondent à ce raisonnement. Il a fait preuve d'une conscience aiguë de la situation en signalant à la radio qu'il était la cible de coups de feu. À défaut d'avoir une pleine compréhension de ces secondes cruciales, voilà les seules conclusions définitives que nous pouvons raisonnablement tirer.
Plusieurs coups sont tirés en rafale. La vidéo de surveillance montre des membres réagissant rapidement au tir. L'observation des trous de balle traversant plusieurs arbres, de douilles vides et des dommages causés par tir de carabine à la propriété derrière le 15, rue Bromfield et à l'arrière de la maison même nous renseigne sur la position de Justin Bourque au moment où il a ouvert le feu. Ces éléments nous informent en outre sur les mouvements exécutés par le gend. Gevaudan réagissant aux coups de feu dont il était la cible. Nous ne connaissons pas exactement sa position lorsqu'il a dégainé, mais nous savons qu'il a couru en direction d'un espace dégagé derrière la résidence adjacente (19, rue Bromfield). Nous ne saurons jamais avec certitude pourquoi il a décidé de se déplacer dans cette direction. Il réagissait à des coups de feu inattendus dirigés sur lui, et a été forcé de prendre une décision éclair pour essayer de sauver sa peau. Ce qui est certain, c'est l'endroit où il est finalement tombé au sol après avoir reçu deux balles au corps; nous pouvons donc retracer ses mouvements en fonction des cycles de tir du suspect.
En vertu du MIGI, si le sujet était conscient de la présence des policiers et se savait être la raison de leur présence, ceux-ci se seraient assurés que le sujet manifestait une résistance active. Ce comportement, allié au fait qu'on le savait armé, revêtu de vêtements de camouflage et caché parmi les arbres, relevait considérablement le degré de risque évalué par les membres intervenant.
Sur le plan tactique, les gend. Gevaudan et Daigle n'ont disposé que de très peu de temps pour discuter des options s'offrant à eux dans les circonstances. Ils étaient aussi en position désavantageuse en matière de puissance de feu (à la lumière de la description des armes du sujet).
Conformément au paragr. 25(1) du Code criminel, tout agent de la paix est, dans l'application ou l'exécution de la loi, fondé à employer la force nécessaire à cette fin. À la lumière des facteurs en jeu, tous les membres qui se sont approchés du sujet auraient dû être prêts à employer immédiatement une force meurtrière si cela devenait nécessaire.
Lorsqu'ils ont de nouveau aperçu le sujet, l'option d'intervention appropriée compte tenu de la situation globale était ***** une tentative d'intervention verbale.
*****.
De nombreux membres consultés par l'équipe d'examen ont dit que les appels mettant en cause un suspect armé n'étaient pas rares à Codiac. Si la réponse initiale et l'approche du sujet témoignent d'une évaluation judicieuse des risques et de la prise de décisions éclairées (armes dégainées et pointées vers le sujet), la perception qu'il pouvait s'agir d'un simple appel de routine aurait pu jouer dans le fait qu'aucun membre ne s'était mis en position de riposter.
1.1 Il est recommandé de fournir aux membres un complément de formation sur la position dominante armée.
Étant la cible de tirs dans un endroit où il pouvait difficilement se mettre à l'abri, le gend. Gevaudan a dû effectuer un repositionnement tactique. Faute de bien connaître le quartier, il ne pouvait pas se douter que le chemin qu'il avait choisi allait l'exposer à d'autres coups de feu. Le gend. Daigle a été le premier à arriver au coin du garage situé au 15 Bromfield, où le gend. Nickerson l'a rejoint quelques secondes plus tard. Les gend. White, Mitchell et Martel ainsi que le cap. Maclean étaient en route vers le 15 Bromfield quand des coups de feu ont été tirés. Le gend. Nickerson a entrevu le gend. Gevaudan qui courait, mais n'a pas aperçu le tireur. Les gend. Johnstone et Doiron se trouvaient à l'angle Mailhot-Bromfield.
On ignorait où se trouvait désormais le gend. Gevaudan, qui avait signalé être la cible de tirs et ne répondait plus aux appels radio. Les membres ont rapidement conclu que le tireur utilisait une arme puissante capable de tirer plusieurs balles en séquences rapides (ils venaient d'entendre de multiples coups de feu). Munis de pistolets de service et d'un fusil, les membres étaient, d'un point de vue tactique, dans une position désavantageuse par rapport au suspect, dont l'arme avait une portée et une puissance de feu supérieures. Il aurait été judicieux de leur part, à ce moment précis, de se mettre à couvert, de procéder à une analyse des risques et d'élaborer un plan pour sauver le gend. Gevaudan et neutraliser la menace.
Un peu moins de deux minutes se sont écoulées entre les tirs qui ont atteint le gend. Gevaudan et ceux qui ont atteint le gend. Ross. Après la première série de coups de feu, le tireur s'est dirigé vers Mailhot, pendant que les membres qui s'étaient rendus à l'avant du 15 Bromfield étaient entièrement occupés à chercher un abri et à retrouver le gend. Gevaudan. Le gend. Ross, qui venait tout juste d'arriver sur les lieux à bord d'un véhicule des Services cynophiles, s'est rapidement trouvé en position d'ouvrir le feu sur le tireur. Aussitôt engagé sur Bromfield, le gend. Ross s'est fait aiguiller sur Mailhot par un membre situé à proximité de l'intersection Bromfield-Mailhot. Il a aperçu le tireur et a tenté de l'arrêter. Des passants se trouvaient toujours sur Mailhot, non loin du sujet, et ce fait a peut-être influé sur le type d'approche choisi par le gend. Ross.
Le sous-officier des opérations a commencé à envoyer sur place des membres supplémentaires après avoir appris que des coups de feu avaient été tirés sur le gend. Gevaudan. Même après que le responsable de la circulation eut retrouvé le gend. Gevaudan, aucun message radio n'a été émis qui disait, dans un langage clair, que le suspect avait tiré sur ce dernier à l'aide d'une carabine de fort calibre. S'il avait été communiqué, cet important élément d'information aurait pu amener les membres arrivés en renfort sur les lieux à faire une évaluation des risques différente et à adapter leur intervention en conséquence. En dépit du fait qu'un membre avait été atteint par balles, aucun des membres faisant partie de cette deuxième vague de déploiement n'avait revêtu de GPBR. La question que le sous-officier des opérations pose sur canal radio, à savoir « Qui est blessé? », indique qu'il ignorait qu'un membre avait été abattu (ses confrères étaient toujours en train de lui prodiguer les premiers soins). De là une certaine confusion touchant le nombre d'ambulances requis et l'endroit où les secouristes devaient se rendre.
Ayant égaré son appareil radio, le responsable de la circulation n'a pas entendu la communication du gend. Ross, et comme en outre il s'employait à donner les premiers soins au gend. Gevaudan, il n'était pas en mesure de faire une évaluation tactique de l'ensemble de la situation. Le sous-officier des opérations, renseigné seulement par les messages radiodiffusés, était moins bien informé. Faute d'avoir connaissance de la situation, aucun superviseur, à ce point précis du cours des événements, n'avait la capacité de mener une intervention efficace.
On note que les membres, parce que la bande de fréquence n'était pas chiffrée et qu'ils ne souhaitaient pas informer le public par la voie des ondes des détails de l'opération en cours, ont eu tendance à éviter d'employer un langage clair dans leurs messages radio. Il y a à Moncton des personnes qui surveillent avidement les transmissions de la police, et les appels étaient affichés au fur et à mesure sur un site de chasseurs de nouvelles dans les médias sociaux. La GRC entraîne ses membres à utiliser les codes 10 (bien qu'ils soient aisément accessibles au public) précisément dans ce but. Il faut inciter les membres à user d'un langage clair et simple en situation de crise.
La recommandation relative à l'usage d'un langage clair se trouve à la section 7, « Communications opérationnelles ».
Après les coups de feu contre le gend. Ross, les membres et les opérateurs en télécommunication qui appelaient du renfort et informaient la haute direction ont commencé à parler d'un « active shooter » (tireur actif ). Dans le cadre de la formation sur le déploiement rapide pour action immédiate (DRAI), l'existence d'un tireur actif dicte aux membres la conduite suivante : *****. ***** chaque membre passe d'une position à couvert à une autre position à couvert. Même après avoir vu le gend. Gevaudan être la cible de tirs ou après avoir appris qu'il l'avait été, et malgré le danger évident que représentait le tireur pour la police, les membres ont continué à traquer celui-ci en vue de l'arrêter.
Il y a un membre, cependant, pour qui la manœuvre de DRAI n'est pas apparue comme l'intervention tactique adéquate. Il s'agit du gend. White, instructeur de tir de base et en DRAI. Aussitôt après avoir quitté Bromfield Court, il s'est engagé sur Mailhot, seul, passant avec célérité d'une position à couvert à une autre. Après avoir parcouru en quelques minutes les 260 m qui le séparaient du véhicule du gend. Ross, il a aperçu le tireur plus loin dans la rue. Le gend. White a pris une sage décision en ne tentant pas, avec son pistolet, d'user de force mortelle contre Bourque au moment où il l'a aperçu sur Mailhot : étant donné la distance entre lui et le sujet (environ 90 m) et le fait qu'il n'était armé que de son pistolet de service, il se serait retrouvé en grave désavantage en cas d'échange de coups de feu. Il s'est alors mis à l'abri derrière le véhicule des Services cynophiles et a signalé sa position par radio, informant ainsi les autres membres de l'équipe d'intervention du lieu où se trouvait le tireur. Ayant appris à son arrivée sur les lieux quelle était la puissance de feu du tireur, puis constatant le manque de préparation tactique des premiers intervenants, simples membres affectés aux services généraux, le responsable de la circulation a demandé le déploiement du Groupe tactique d'intervention.
La recommandation relative au ***** « Formation des membres et compétences en sécurité du policier ».
La gend. Martine Benoit s'est rendue sur les lieux via Mountain Road tous gyrophares et sirènes en marche. Elle tournait sur Hildegard Drive au moment où la STO a fait savoir que le suspect se trouvait à l'angle Hildegard-Mailhot. C'est sur ce renseignement que la gend. Benoit et le gend. Nick Gilfillan ont fondé leur choix tactique et leur évaluation des risques. Le cap. Cloutier leur avait ordonné de se rendre sur les lieux de la fusillade, sans leur donner de mission particulière. Un témoin ayant montré du doigt à la gend. Benoit les buissons par où était passé le sujet de la poursuite, celle-ci a garé le véhicule à l'intersection et a évalué la situation. Elle venait tout juste de conclure qu'il valait mieux rester dans l'auto lorsqu'elle a essuyé une première rafale. Elle a alors tactiquement réagi de la meilleure façon possible : *****. Puis elle a calmement signalé par radio qu'elle était la cible de tirs dont le point d'origine faisait face à son véhicule, donnant ainsi aux autres intervenants une bonne indication de l'emplacement du tireur. Une fois son véhicule mis hors d'état, elle l'a clairement fait savoir et a demandé s'il était sûr pour elle de descendre de voiture. Elle a ensuite demandé de l'aide. Sa demande était concise et contenait des renseignements utiles à son évaluation des risques comme à celles de ses collègues.
C'est le gend. Eric Dubois qui a répondu à l'appel d'aide de la gend. Benoit. Il s'est rendu en voiture à l'endroit où elle était et a immobilisé son véhicule près du sien d'une manière qu'il a jugée propre à mieux les protéger du tireur. Il a ensuite pris une sage décision tactique en allant se poster avec la gend. Benoit derrière le véhicule de police, dont le châssis complet formait un abri s'interposant entre eux et le tireur. Le gend. Dubois, qui relevait périodiquement la tête pour essayer de repérer le sujet, a été atteint par des éclats de balles ou des projectiles incidents. Il a ultérieurement attribué cette infortune au fait qu'il avait trop souvent sorti la tête au même endroit. Ayant vu l'homme armé traverser Hildegard et supposant qu'il avait quitté les lieux, le gend. Dubois a couru jusqu'à la caserne de pompiers. La gend. Benoit a décidé de rester à couvert et appeler pour qu'on vienne la chercher. L'évaluation des deux gendarmes était raisonnable étant donné les circonstances du moment. La gend. Benoit n'avait pas vu le suspect quitter les lieux et n'était pas convaincue qu'il en avait fini avec eux. Sachant que la gend. Benoit avait besoin d'aide pour se mettre à couvert à la caserne de pompiers, le gend. Gilfillan est venu garer son véhicule juste à côté de celui derrière lequel elle s'abritait. Une fois qu'elle fut montée à bord de son véhicule, il a pu la transporter en toute sécurité jusqu'à la caserne.
Pendant que des coups de feu étaient tirés à l'angle Hildegard-Mailhot, les intervenants arrivés les premiers sur les lieux continuaient à se déplacer en fonction des renseignements radiodiffusés sur les endroits où le tireur avait été aperçu. Les gend. Mitchell, Doiron et Martel ont descendu Mailhot en équipe jusqu'à Kenview Drive, puis ont remonté la rue jusqu'à l'arrière de la caserne de pompiers, c'est-à-dire là où était présumé se trouver le tireur peu après qu'ils eurent entrepris leur poursuite. La gend. Mitchell a réquisitionné un véhicule civil qui, a-t-elle pensé, allait lui servir de camouflage et lui permettre de progresser plus vite et, peut-être, de renverser l'homme armé. Réquisitionner un véhicule civil était une sage décision tactique de sa part : cela montre qu'elle avait compris que la police était l'unique cible du tireur. La gend. Mitchell a transporté le gend. Dubois à l'hôpital et n'est jamais entrée en contact avec le tireur.
La gend. Goguen, du district du Sud-Est, roulait sans le savoir en direction du lieu où se trouvait Bourque pendant que celui‑ci tirait en rafales sur les autopatrouilles stationnées à l'angle Hildegard-Mailhot. Le district du Sud-Est, qui se sert d'une radiofréquence différente, est desservi par la STO des quartiers généraux de la Division J, à Fredericton. Les membres ont la possibilité d'utiliser un dispositif de balayage qui leur permet de capter des communications effectuées sur d'autres canaux, lesquelles sont supplantées par toute communication effectuée sur leur canal propre. La gend. Goguen croyait que le bouton de son appareil qui active le balayage ne fonctionnait pas correctement, et elle estimait avoir trop peu d'informations pour pouvoir faire une évaluation éclairée des risques. Ayant entendu des coups de feu, elle a amorcé un mouvement pour faire demi-tour, puis a été atteinte par une balle. Blessée, elle a conduit son véhicule en sûreté quelques pâtés de maisons plus loin, sur Penrose, où des membres se sont chargés de l'emmener à l'hôpital. Le réflexe qu'a eu la gend. Goguen de mettre rapidement son véhicule en sûreté a sans aucun doute contribué à lui sauver la vie.
La série de coups de feu visant la gend. Goguen a accentué le caractère chaotique de la situation. Comme ses communications radio passaient par un canal différent, aucune des personnes qui syntonisaient le canal radio de Codiac ne savait qu'elle avait été blessée. La STO de Codiac a appris qu'elle avait été la cible de tirs seulement lorsqu'on a retrouvé son véhicule criblé de balles. La STO asupposé à tort qu'elle avait été atteinte par balles sur Penrose, où son auto était stationnée, ce qui a ajouté à la confusion régnant au sujet des déplacements de l'homme armé.
De 19 h 51 à 20 h 05, la connaissance tactique de l'ensemble de la situation était mauvaise. La STO était débordée, tout occupée à recevoir les appels de témoins indiquant où ils avaient aperçu le tireur, à guider la mise en position des renforts qui arrivaient et à diriger les services de secours médical vers les membres blessés. Les membres sur le terrain ont poursuivi leur avancée en s'approchant du lieu d'où provenaient les détonations, et aucun d'eux n'a pris les commandes des communications radio, laissant ainsi les répartiteurs de la STO faire du mieux qu'ils pouvaient pour coordonner les opérations depuis leur poste d'observation.
Il était difficile de faire une évaluation précise des risques, car les membres réclamaient des ambulances en différents lieux. Les endroits où avait été aperçu le sujet étaient établis en fonction de l'emplacement de l'auteur de l'appel (et non en fonction de l'emplacement du suspect), puis l'information était communiquée sur les ondes avec un retard qui la rendait inutile. Il y avait des membres blessés qui avaient besoin de soins médicaux. Deux signalements radio erronés ont été faits concernant des coups de feu tirés sur Lonsdale et la présence du sujet à l'angle (qui n'existe pas) de Lonsdale et de Mailhot, sans compter le signalement selon lequel le sujet se trouvait sur Foxwood et se dirigeait vers Ryan, alors qu'en fait, à ce moment-là, il avait déjà traversé Hildegard et se dirigeait vers Mailhot. Il était presque impossible, sur la base de l'information radio concernant les déplacements du tireur, de dresser un portrait tactique fiable de la situation. Les indications géographiques données en direct par les membres sur le terrain se mêlaient aux renseignements périmés ou inexacts que fournissaient les citoyens et que relayait la STO.
C'est autour de cette période que la caserne de pompiers de Hildegard est devenue une zone d'étape. C'est là que les membres de Codiac et du district du Sud-Est étaient instruits de se rendre après la première fusillade. Le cap. Whittington, le gend. Gilfillan, le gend. Verret et d'autres sont arrivés à la caserne après que le tireur fut parti et eut traversé l'intersection Mailhot-Hildegard. À ce moment, les membres avaient compris que le tireur ne ciblait que des policiers. Les membres rassemblés dans la caserne ont ***** en revêtant leur GPBR et en prenant position en vue d'ouvrir le feu sur le tireur, dont l'emplacement était inconnu. Comme ils se trouvaient dans les limites de la « zone de tir », c'est ce qu'ils avaient de mieux à faire.
Certains membres ont convergé vers la caserne de pompiers parce que c'était le dernier endroit où la présence du suspect avait été signalée. Ils se sont rassemblés à l'intérieur, où d'autres sont venus les rejoindre, tandis que d'autres encore y ont été dépêchés en croyant qu'il s'agissait d'un lieu d'étape. Comme on ignorait où se trouvait le tireur, ce n'était pas un lieu sûr; par ailleurs, certains membres ne savaient pas, à leur arrivée à la caserne, soit quel rôle ils devaient jouer, soit qui était la personne dont ils devaient prendre les ordres.
Le bruit des coups de feu tirés plus loin sur Mailhot et la nouvelle erronée, diffusée par radio, voulant qu'un civil ait été touché dans le même secteur auraient dû amener les membres à modifier complètement leur évaluation des risques et à choisir un mode d'intervention en conséquence. C'est ce qu'on fait plusieurs d'entre eux, y compris le gend. Gilfillan, qui, recommandant à ses confrères d'enfiler leur GPBR, a été le premier à reconnaître l'opportunité de cette mesure de sécurité essentielle.
L'enregistrement vidéo qui montre la caserne de pompiers au cours de la période comprise environ entre le moment où la gend. Benoit a été récupérée à son véhicule et celui où le gend. Larche a été abattu témoigne d'un manque de coordination et de supervision. Au moins six membres étaient présents. On voit passer un bon nombre de piétons et de véhicules. Aucun membre n'a reçu l'ordre de bloquer l'une ou l'autre des extrémités de Hildegard. Cela ne s'est d'ailleurs pas fait avant que le cap. Denis Leblanc, de la Section de l'identité judiciaire (SIJ), soit mis au courant de la situation et propose de bloquer la circulation endirection ouest sur Hildegard Drive. Malheureusement, personne n'a pris la décision de bloquer l'autre extrémité de Hildegard, à l'angle de Ryan.
Les recommandations relatives à la supervision se trouvent à la section 3, « Supervision durant tout l'incident ».
L'intervention des quatre membres du Groupe des crimes majeurs (GCM) a débuté immédiatement après les premiers coups de feu. Ils sont rentrés au poste chercher des fusils et ont remis le cap sur Hildegard chacun au volant d'une voiture. Les membres et superviseurs du Détachement de Codiac ne savaient pas que le GCM était entré en action, et le sous-officier des opérations n'avait pas entendu les messages radio indiquant que le GCM venait à la rescousse. La STO a confirmé sur les ondes que celui-ci était en route, mais aucune des personnes se trouvant sur les lieux ou en situation d'autorité ne leur a assigné de tâche particulière. Tandis qu'il faisait route vers Hildegard, le gend. Larche a rompu le convoi qu'il formait avec les deux voitures qui le précédaient pour se rendre à l'angle Mailhot-Isington. Aucun échange radio n'a eu lieu concernant cette action, et les autres membres du GCM ignorent pourquoi le gend. Larche a pris cette décision.
Le gend. Larche a donné son emplacement à la STO et lui a fait savoir qu'il s'apprêtait à quitter son véhicule. Il en est sorti avec un fusil, balayant les alentours du regard à la recherche du sujet. L'homme armé était caché par des arbres situés non loin du gend. Larche, qui se tenait debout à côté de son véhicule. Ayant constaté qu'il s'agissait d'un policier, reconnaissable à son gilet pare-balles souple, le sujet a commencé à tirer sur le gend. Larche. Toutes les balles ont été tirées à moins de 20 m. Il convient de faire remarquer que Doug Larche était déjà très grièvement blessé au moment où il a pu décharger son fusil. Même après s'être écroulé au sol après la ou les premières balles, il n'a pas désarmé, a trouvé le courage de se relever et de mettre en joue pour faire feu sur le sujet. Le gend. Larche s'est battu jusqu'au bout : il a tiré sept fois, la dernière juste après avoir été touché par une balle qui lui a été mortelle.
Le gend. Larche a été abattu à 20 h 05. À ce moment, les seuls membres se trouvant au sud de Hildegard étaient le gend. Larche et, peut-être, le gend. White, qui menait la poursuite en solo. Tous les autres membres envoyés sur les lieux étaient occupés à autre chose. Tactiquement parlant, la situation n'était pas maîtrisée.
Le tireur s'est enfoncé dans le bois situé du côté sud de Ryan pendant que les membres descendaient Mailhot et devaient finir par rejoindre le gend. Larche. Au moment où le gend. White a trouvé ce dernier, des civils avaient déjà fait un effort pour le couvrir. Le gend. White a alors transporté le gend. Larche dans une résidence voisine et est demeuré avec lui.
Une fois arrivés au bout de Mailhot, les membres ont signalé leur position à la STO et se sont mis à couvert du mieux qu'ils pouvaient, à l'orée du bois. Les membres ont préféré ne pas s'engager dans le bois pour poursuivre du sujet. C'était une sage décision tactique.
Section 3 : Supervision durant tout l'incident
Question du commissaire : D'après la façon dont les interventions ont été supervisées, des éléments devraient-ils être améliorés?
Le 4 juin 2014, les superviseurs à Codiac ont été confrontés à une situation qui, de bien des façons, dépassait leur formation. Ils ont fait face à une situation de crise qui évoluait rapidement, présentait des difficultés sur le plan opérationnel et était chargée d'émotions.
Le niveau de supervision requis pour gérer un incident est directement proportionnel à son ampleur. La GRC étant une organisation paramilitaire, selon sa structure hiérarchique, plus un grade est élevé, plus les responsabilités qui s'y rattachent sont grandes.
Structure hiérarchique du Détachement de Codiac
Au Détachement de Codiac, il y a un officier responsable au grade de superintendant et un officier des opérations au grade d'inspecteur. Pour les services généraux, des policiers en uniforme sont affectés à deux équipes qui travaillent des quarts de 11.20 heures.
Ces deux équipes sont supervisées par des sergents d'état-major qui travaillent le jour et qui ensemble couvrent la semaine de sept jours. Les sergents d'état-major gèrent deux sergents qui sont sous-officiers des opérations et qui couvrent les heures principales de travail, de 6 h à 4 h. Le sous-officier des opérations gère des caporaux dont le travail consiste à superviser deux groupes de gendarmes. Un de ces groupes, les intervenants, répond aux appels de routine et couvre les quarts 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Les membres de ce groupe ne mènent pas d'enquêtes en dehors du quart qui leur est attribué. Les affaires qui nécessitent une enquête de suivi sont attribuées à l'autre groupe de gendarmes, l'équipe de continuation d'enquête, qui s'occupe des enquêtes mineures sur des infractions relatives aux personnes et aux biens. Ces gendarmes ne travaillent pas tous les jours 24 heures sur 24, mais sont en uniforme et doivent assister le groupe d'intervenants pour les affaires graves.
Structure hiérarchique à Codiac durant l'incident
Supervision au Détachement de Codiac le soir du 4 juin :
Le sous-officier des opérations, le cap. Jacques Cloutier, était le sergent intérimaire. Il devait travailler jusqu'à 4 h. Le sous-officier des opérations est le gestionnaire des opérations et est responsable de donner des directives opérationnelles générales. Il doit suivre les événements du point de vue stratégique durant le quart, tandis que les chefs d'équipe (caporaux) jouent un rôle plus tactique. Il est aussi chargé de prendre des décisions concernant l'activation des sections de soutien et de demander d'autres ressources, au besoin (Section des enquêtes générales, Groupe des crimes majeurs, Service de l'air, Programme de ratissage et de sauvetage, etc.).
Le sous-officier des opérations surveille tous les appels de service à l'aide du Système intégré de répartition de l'information (CIIDS) et a le pouvoir final de décision concernant la gestion du déploiement des membres. Il soutient les chefs d'équipe en donnant des directives et se fie à leur expertise sur les lieux d'incidents graves pour s'assurer que les directives générales sont respectées au niveau tactique.
À Codiac, le sous-officier des opérations travaille principalement au bureau et ne se rend généralement pas sur les lieux des appels de service.
Les chefs d'équipe, les cap. Peter MacLean et Lisa Whittington, constituaient la première ligne de supervision. Le cap. MacLean, le superviseur de soir, devait travailler jusqu'à 21 h et la cap. Whittington, la superviseure de nuit, jusqu'à 6 h. Les deux étaient en poste et se trouvaient dans le bureau au moment de l'appel initial.
La station de transmissions opérationnelles (STO) de Codiac n'a pas de fonction officielle de supervision, mais joue un rôle essentiel dans la gestion des interventions policières. Durant l'incident, les répartiteurs de la STO ont donné des directives en fonction de l'information qu'ils recevaient. La STO de Codiac est composée de deux répartiteurs du 911, d'un répartiteur du service d'incendie et d'un répartiteur adjoint. Il y a aussi un répartiteur et un répartiteur adjoint pour la GRC, pour un total de six employés présents à tous les quarts. Le principal répartiteur de la GRC communique avec les membres de la GRC sur une fréquence unique d'écoute en direct. Le répartiteur adjoint s'occupe de ce que le répartiteur principal n'est pas en mesure de faire.
Parmi les ressources disponibles, en plus des membres en uniforme présents, on comptait une équipe des crimes majeurs de quatre personnes qui travaillait sur une autre affaire en tenue civile et utilisaient des véhicules banalisés. Cette équipe, dont le gend. Doug Larche faisait partie, était dirigée par un caporal qui n'a pas assumé de fonctions importantes de supervision. Il s'agit d'une pratique normale, les ressources de soutien relevant de la structure de commandement établie pour les appels de services généraux.
Quatre membres du district du Sud-Est voisin étaient en service, avec un caporal intérimaire responsable. Il n'a pas non plus assumé de fonctions importantes de supervision, car lui aussi relevait de la structure de commandement établie.
Appel initial
L'appel initial a été bien géré et coordonné par la STO, les cap. Cloutier et MacLean et le gend. Doiron, et a duré environ 20 minutes, jusqu'à ce que le suspect soit localisé près de la rue Bromfield. Le cap. Cloutier s'est assuré que toutes les ressources disponibles avaient été dépêchées et que le cap. MacLean avait été désigné pour se rendre sur place en tant que responsable de la circulation. Le gend. Doiron est le premier à être arrivé sur les lieux et a pris une décision tactique judicieuse en demandant des renforts, en aidant à établir un périmètre et en fournissant de l'information sur la situation. Le cap. MacLean a fourni une supervision directe, s'est assuré que le périmètre était maintenu, a demandé l'assistance des Services cynophiles, a obtenu une évaluation plus exacte du suspect, a déconseillé aux membres de trop s'aventurer dans la zone boisée avant l'arrivée des Services cynophiles et a enjoint les civils à quitter le secteur. Les mesures de supervision prises par le cap. MacLean sont un très bon exemple de la gestion initiale qui doit être assurée pour ce type d'appel. Notons toutefois qu'aucun membre ne portait un gilet pare-balles rigide (GPBR) et qu'un seul était muni d'une arme d'épaule.
Selon la politique du Détachement de Codiac sur le bouclage et les périmètres, *****. La STO a fait un travail remarquable pour que les membres puissent contenir le suspect et l'isoler dans le secteur boisé.
Le cap. Cloutier était au bureau et surveillait la radio, le téléphone et le terminal CIIDS. Il coordonnait aussi les Services cynophiles et s'assurait que les membres avaient quitté le bureau pour appuyer l'intervention. Il se fiait à l'information provenant des lieux de l'incident et a fait un excellent travail pour rassembler les ressources. Il était aussi chargé de surveiller tous les autres appels de service dans la région du Détachement.
Le manque de cartes adéquates ***** a eu une incidence sur la capacité du cap. Cloutier de gérer efficacement l'incident. Une recommandation en ce sens se trouve dans la partie traitant des stations de transmissions opérationnelles.
Localiser et suivre le suspect
La supervision de première ligne durant cette phase a été minimale, le responsable de la circulation étant en route vers les lieux.
Pendant que le périmètre était établi et que les membres se positionnaient, le gend. Daigle a localisé le suspect. Il a signalé la position du suspect par radio et, sachant que des renforts étaient en route, il a décidé de le suivre à pied afin de le garder en vue. À ce moment-là, le responsable de la circulation savait que les Services cynophiles seraient retardés et il n'a donc pas ordonné au gend. Daigle de maintenir sa position comme il l'avait fait plus tôt. Il se rendait sur les lieux pour assurer une supervision directe et a permis au gend. Daigle de diriger l'approche des membres. Cette directive était appropriée étant donné que le gend. Daigle pouvait voir le suspect.
Manœuvres contre l'accusé
L'approche des membres vers le suspect changeait rapidement et de façon imprévisible. Il était difficile pour le responsable de la circulation de fournir une supervision directe, puisqu'il avait quitté son véhicule pour se rendre sur les lieux à pied. Il avait indiqué à la radio qu'il était en route pour s'assurer que les membres savaient où il était. Malheureusement, sa radio portative s'est accidentellement détachée de sa ceinture quand il est sorti de son véhicule et il n'avait pas de cellulaire. Durant cette période critique, il n'avait aucun moyen de communiquer avec les autres membres.
3.1 Il est recommandé que les membres soient munis d'un cellulaire et d'une radio de police lorsqu'ils sont en service et que cet équipement fasse partie de la tenue de service no 1.
Coups de feu tirés
Le superviseur responsable de la circulation allait à la rencontre des gend. Daigle et Gevaudan quand des coups de feu ont été tirés. Il s'agissait d'une situation dynamique qui évoluait rapidement, le sujet se dirigeant vers un quartier fréquenté, ce qui laissait peu de possibilités de discussion entre les membres et les superviseurs sur la façon de gérer tactiquement la situation.
*****. Cette information aurait été utile pour donner des conseils tactiques.
Lorsque le gend. Gevaudan a été abattu, les communications radio se sont intensifiées. La connaissance insuffisante de la situation durant les moments qui ont suivi peut être attribuée, en partie, à un mauvais protocole radio. Les membres n'utilisaient pas un langage clair, ce qui a causé de la confusion concernant la gravité de la situation. Il était donc difficile pour les superviseurs de donner des directives. Les superviseurs ont dit hésiter à utiliser la radio, car ils ne voulaient pas utiliser un temps d'antenne crucial et empêcher potentiellement un membre en danger direct de communiquer. Le sous-officier des opérations était surchargé par la surveillance du trafic radio, les appels et d'autres éléments logistiques et n'avait personne pour l'aider. S'il avait pu déléguer certaines tâches, il aurait peut-être pu mieux gérer l'incident.
Le niveau de supervision durant cette phase aurait dû passer à un niveau de commandement et de contrôle. L'urgence d'agir a primé.
Alors que le gend. Dave Ross s'approchait des lieux, il est possible que sa connaissance de la situation se soit limitée à une brève conversation téléphonique avec le sous-officier des opérations et la STO avant que des coups de feu soient tirés. Il a probablement entendu où se trouvait le sujet et les mots « shots fired » (coups de feu tirés) et « he is shooting at me » (il fait feu sur moi). Le gend. Ross a indiqué par radio « I have a visual and will be on takedown in a second » (je vois le suspect et je pourrai intervenir dans une seconde). Une communication radio interrompue a suivi cette transmission et un autre membre a signalé que d'autres coups de feu étaient tirés. Le gend. Ross a été tué alors qu'il se dirigeait vers le suspect dans son véhicule de police.
Le responsable de la circulation n'a pas entendu la transmission du gend. Ross parce qu'il n'avait pas de radio et a été le premier membre à trouver le gend. Gevaudan après qu'il a été abattu. Il a immédiatement commencé à prodiguer les premiers soins au gend. Gevaudan et ne pouvait donc pas évaluer la situation tactique globale à ce moment-là.
Le sous-officier des opérations avait moins d'information et était seulement au courant de ce qui était transmis par radio. Sans connaissance de la situation, la capacité d'un superviseur à intervenir à ce point-là était minimale. Cela dit, même par après, aucun superviseur n'avait une bonne compréhension de ce qui se passait et, par conséquent, ne pouvait donner de directives. *****, cela est compréhensible compte tenu de la gravité de la situation sur le plan émotionnel et du manque de formation et d'expérience pour faire face à ce genre de tragédie.
Il n'y a pas eu de transmission radio expliquant en langage clair que le gend. Gevaudan avait été abattu par le suspect, ce qui aurait fourni aux autres membres une information essentielle. Cela peut s'expliquer par le simple fait que les membres, y compris le responsable de la circulation, risquaient leur vie, en déployant des efforts particulièrement chargés d'émotions, pour prodiguer les premiers soins au gend. Gevaudan à un endroit tactiquement dangereux.
3.2 Il est recommandé que la GRC examine la façon dont elle forme les superviseurs de première ligne en matière de commandement et de contrôle au cours d'incidents critiques.
Une recommandation concernant l'utilisation de langage clair figure à la section 7.
Huit membres étaient réunis près du lieu de la fusillade pour prodiguer les premiers soins au gend. Gevaudan ou assurer une couverture. Le gend. White et le responsable de la circulation ont décidé de quitter le groupe pour se lancer à la poursuite de l'accusé. Même si les actions des deux membres étaient très braves, le responsable de la circulation a délaissé à ce moment‑là son rôle de superviseur pour jouer celui de premier intervenant, sans avoir discuté d'un plan tactique avec les six autres gendarmes avant de partir.
Personne n'a assuré le commandement pendant cette période. Les membres agissaient de leur propre chef sans plan tactique unifié. L'ordre aurait pu être établi si un superviseur avait obtenu une mise à jour sur la situation et demandé aux membres de signaler leur position. À ce moment-là, la plupart des hommes étaient à pied. Aucun superviseur n'avait une vue d'ensemble de la position des ressources, et il en est resté ainsi pendant une heure ou plus. Les actions des membres, individuellement ou en petite équipe, ont été héroïques et louables, mais elles n'étaient pas coordonnées selon des directives et un plan communs.
À mesure que la situation évoluait et que le sous-officier des opérations disposait de plus de ressources, un préposé aurait dû être désigné pour consigner les décisions, la répartition des ressources, les positions des membres et d'autres renseignements importants. Cela aurait facilité le transfert de commandement au commandant des interventions critiques (CIC) et permis d'obtenir un compte rendu exact des événements.
À ce moment-là, deux membres avaient été abattus, mais bon nombre de membres concernés ne le savaient pas encore, ce qui a eu une incidence sur leur évaluation des risques.
Lorsque les membres du service d'incendie sont arrivés, ils ont poursuivi les manœuvres de réanimation cardio-respiratoire sur le gend. Gevaudan et les six gendarmes restant ont formé deux équipes de trois et sont partis à la recherche de l'accusé en formation de contact de déploiement rapide pour action immédiate (DRAI). Aucune supervision n'a été fournie à ces équipes et elles n'en ont pas demandé, et elles n'étaient pas coordonnées dans l'ensemble. Le sous-officier des opérations ne savait toujours pas que deux membres étaient morts. L'absence de coordination a persisté. À 19 h 51, le responsable de la circulation a dit à la radio « ERT, we are going to need everything we got » (GTI, on va avoir besoin de tout ce qu'on a).
Fusillades sur la promenade Hildegard
Les gend. Gevaudan et Ross ont été abattus à seulement deux minutes d'intervalle, mais les gend. Ross et Larche ont été abattus à 18 minutes d'intervalle. Durant cette période, les gend. Dubois et Goguen ont été blessés et des coups de feu ont été tirés en direction de la gend. Benoit sur la promenade Hildegard. Les membres présents auraient pu recevoir des directives de la part d'un superviseur à ce moment-là.
Le responsable de la circulation a dit durant son entrevue avec l'équipe d'examen qu'il avait laissé à la STO le soin de diriger les membres, car celle‑ci disposait d'un système de cartographie et avait des données sur la position des véhicules. *****.
Même si la STO a fait un travail exceptionnel pour coordonner les membres sur les lieux de l'incident, un sous-officier supérieur avec une expérience tactique affecté à la STO aurait été mieux en mesure de coordonner les ressources à l'aide d'information exacte en temps réel.
La recommandation 7.9 de la section sur les communications opérationnelles traite de la nécessité d'affecter un sous-officier supérieur à la STO.
Le responsable de la circulation était le superviseur ayant la meilleure connaissance de la situation et aurait pu être en mesure de donner des directives tactiques à partir des lieux de l'incident. Le sous-officier des opérations, qui était seul dans le bureau durant la demi-heure mouvementée qui a suivi les coups de feu, était submergé d'appels radio et téléphoniques, tout en devant faire le nécessaire pour obtenir d'autres ressources. Il n'avait pas une connaissance suffisante de la situation pour donner des directives tactiques appropriées.
Le sous-officier des opérations a demandé à la superviseure de nuit d'aller prêter main-forte vers 19 h 47. Elle s'occupait d'un prisonnier à ce moment-là et elle devait le mettre en cellule avant de partir. Elle a été entendue à la radio à 19 h 55, sirènes activées, demandant qu'on lui envoie une copie du dossier de répartition. Elle a emprunté le chemin Mountain, puis la promenade Hildegard, car elle savait que les membres se trouvaient sur Hildegard. Une fois sur place, elle s'est garée à la caserne de pompiers. Plusieurs développements importants sont survenus sur la promenade Hildegard, où des mesures auraient pu être prises par un superviseur. Cependant, le responsable de la circulation n'était pas entièrement au courant de la planification et des mesures mises en place, car les membres prenaient eux-mêmes des initiatives. Il n'a pas joué un rôle actif dans la supervision des interventions. La vidéo du secteur de la caserne de pompiers durant la période après que la gend. Benoit a été sortie de son véhicule jusqu'à ce que le gend. Larche soit abattu montre un manque de coordination et de supervision, tandis qu'au moins six membres étaient présents. On remarque de nombreux véhicules et piétons qui circulent. Aucune directive n'avait été donnée pour bloquer la promenade Hildegard dans l'une ou l'autre direction. La circulation est-ouest sur la promenade Hildegard a été bloquée par le cap. Denis Leblanc de la Section de l'identité judiciaire seulement une fois que celui‑ci a eu connaissance de la situation et offert de bloquer la voie. Malheureusement, personne n'a décidé de bloquer l'autre extrémité de la promenade Hildegard à la rue Ryan.
Il aurait été raisonnable de s'attendre à ce que les superviseurs dirigent le contrôle du périmètre et les équipes à ce moment‑là. Les membres n'ont pas reçu de directives et ont agi de leur propre initiative. Bon nombre ont pris part à des actions courageuses, faisant fi de leur propre sécurité.
Avancée vers la rue Isington et meurtre du gend. Larche
L'intervention des quatre membres des Crimes majeurs a commencé immédiatement après les premiers coups de feu. Les membres et les superviseurs du Détachement de Codiac ne savaient pas que le Groupe des crimes majeurs travaillait, et le sous-officier des opérations n'a pas entendu à la radio qu'ils intervenaient pour aider. La STO a noté qu'ils étaient en route, mais aucun superviseur en uniforme n'était au courant. Le gend. Larche a cessé de suivre les deux véhicules devant lui sur la promenade Hildegard et s'est rendu jusqu'à l'avenue Mailhot et la rue Isington, où il est sorti de son véhicule et a été abattu par le suspect.
L'accusé a été vu après la fusillade se sauvant dans la zone boisée derrière la rue Isington en direction de la rue Ryan. Il n'a été vu de nouveau que plusieurs heures plus tard.
Chasse à l'homme post-fusillade et repérages ultérieurs
À cette phase de l'incident, la situation aurait dû se stabiliser et la coordination aurait dû s'améliorer, alors que l'intensité de la menace observable diminuait. Même si aucun autre coup de feu n'a été tiré, les ressources sont demeurées dans un état de confusion, les membres répondant de façon non coordonnée aux signalements de l'accusé et ne maintenant pas leur position dans le périmètre.
Bon nombre de membres n'avaient aucune information et ont pris l'initiative de localiser le suspect et de réagir à la situation, en constante évolution, sans qu'aucun responsable ne soit au courant. La STO et d'autres dépêchaient les membres à des points généraux et imprécis du périmètre, mais aucune directive n'était donnée par radio pour que les membres signalent leur position, et personne ne faisait le suivi de ces emplacements, de l'identité des membres, de la puissance de feu sur place ou de la durée des quarts. Certains membres ont travaillé plus de 24 heures sans être relevés. Certains membres ou superviseurs qui ont répondu à l'appel initial n'ont appris le décès des policiers que vers 21 h et d'autres l'ont appris de nombreuses heures plus tard. On n'a pas effectué d'appel nominal ou de mise à jour de la situation pour s'assurer qu'aucune ressource ne manquait à l'appel.
Les membres en service n'ont pas reçu de mise à jour détaillée d'un superviseur concernant la menace à laquelle ils faisaient face. L'information que les membres recevait était transmise de bouche à oreille. Près de la rue Ryan et du boulevard Wheeler, des membres à bord de véhicules de police identifiés étaient exposés sans savoir que le tireur avait été aperçu pour la dernière fois à proximité.
Les membres d'autres districts, détachements, services municipaux et de la Division H ont commencé à arriver et il n'y avait aucun mécanisme en place pour faire le suivi de ces ressources et les coordonner. Les difficultés liées au suivi des véhicules de police qui ne relevaient pas du Détachement de Codiac seront traitées dans la section 7 du rapport.
Le commandement est passé du sous-officier des opérations à l'officier des opérations, à l'arrivée de ce dernier au Détachement de Codiac à 20 h 20, et les deux ont géré différents aspects de la situation à partir du même bureau. L'officier des opérations est devenu le commandant des interventions à ce moment-là, un préposé au registre des communications a été nommé et des personnes se sont vu confier des tâches précises. L'exécution de ces tâches n'était pas surveillée et diverses personnes continuaient d'effectuer des tâches qui ne leur avaient pas été attribuées et sans directive. La structure de commandement n'était pas claire pour les membres sur le terrain. Le sous-officier des opérations et l'officier des opérations étaient extrêmement occupés, et la situation au Détachement de Codiac était intense et épuisante émotionnellement. Les deux hommes méritent qu'on souligne leur dévouement et les efforts qu'ils ont déployés dans ces circonstances extrêmes.
Le surint. Tom Critchlow, commandant des interventions critiques (CIC) dûment formé et ancien officier des opérations au Détachement de Codiac, était en congé, mais a eu connaissance de la situation et s'est rendu au Détachement pour prêter main-forte. Il est resté pour conseiller le sous-officier et l'officier des opérations *****.
Au moment du transfert du commandement entre le sous-officier des opérations et l'officier des opérations, il n'y a pas eu de séance d'information ni de transfert du commandement officiels, si bien que le sous‑officier des opérations a cru qu'il était responsable jusqu'à ce qu'il rentre chez lui à 6 h le 5 juin. Les actions et les décisions du sous-officier des opérations n'étaient pas consignées.
L'insp. Leahy, CIC désigné, a dû se rendre à Moncton à partir de la région de Fredericton. Le commandement a été transféré au CIC entre 0 h 30 et 3 h le 5 juin. On n'a pas pu établir une heure plus précise. Le CIC a indiqué qu'il avait permis au sous-officier des opérations, à l'officier des opérations et au surint. Critchlow de continuer à commander les interventions à partir du Détachement de Codiac pendait qu'il établissait son poste de commandement (PC) à la garnison de Codiac. Il ne pensait pas être en mesure de prendre le commandement tant que son PC n'était pas établi. Il estime que son PC n'était pas prêt à assumer le commandement général avant environ 3 h, moment où les choses ont commencé à se stabiliser. Comme il a été mentionné précédemment concernant le manque d'information consignée, il était difficile pour le CIC d'obtenir de l'information sur ce qui était survenu.
Voici un exemple de la confusion qui régnait : un signalement crédible de Justin Bourque a été reçu à 0 h 39 près de l'endroit où il avait été vu pour la dernière fois, et une intervention par le GTI s'est ensuivie, mais n'a pas été bien communiquée. Certains membres en position de commandement n'étaient pas au courant et n'avaient pas de rapport à ce sujet.
Il y a donc eu absence de directives claires de la part des commandants qui effectuaient diverses fonctions, mais en revanche, certains membres ont d'eux-mêmes décidé d'assumer un rôle de leadership. Les membres interviewés par l'équipe d'examen ont cité deux exemples précis d'efforts coordonnés pour établir un périmètre ainsi qu'une zone d'étape pour les ambulances.
Le matin du 5 juin, les membres ont été relevés. Dans bien des cas, les membres ont été renvoyés à la maison sans débreffage. Des débreffages appropriés auraient fourni de l'information utile aux commandants qui ont pris la relève.
Gestion de l'arrivée des intervenants
Au moins deux superviseurs ont demandé des renforts auprès d'autres services et districts de police. Un grand nombre de membres se sont rendus à Moncton, alors que la structure de commandement nécessaire pour les gérer n'était pas en place. Cela aurait pu être très dangereux, étant donné que l'accusé se trouvait à proximité des membres affectés au périmètre, qui étaient positionnés près des endroits où il avait été aperçu pour la dernière fois. Plusieurs membres ont indiqué de ne pas avoir reçu ou ne pas avoir demandé de directives et s'être « promenés aux alentours », et de nombreux membres n'étaient pas suivis par la STO de Moncton.
Le fait de demander des ressources additionnelles sans plan pour les réunir, les gérer et les déployer a créé un fardeau supplémentaire pour les superviseurs déjà surchargés.
Résumé des difficultés de supervision
Pour ce qui a été de répondre à la menace initiale et de la contenir, la supervision a été très efficace. Toutefois, après que des coups de feu ont été tirés, ce qui sort de l'ordinaire, la situation est devenue chaotique. Le chaos est inévitable dans les premiers moments d'une situation dynamique et mortelle, mais l'ordre devrait être rétabli dès que possible grâce à la coordination de la supervision, c'est-à-dire l'établissement d'un commandement et d'un contrôle. Les membres en situation de crise s'attendent à une structure, même si elle n'est pas parfaite.
À certains moments, les superviseurs ont perdu de vue leur rôle de commandant. Diverses fonctions étaient attribuées, mais des rapports réguliers et des évaluations de la situation n'étaient pas faits ou n'étaient pas acheminés à un point central de commandement. Même si toutes les personnes concernées ont la responsabilité de contribuer à la connaissance générale de la situation, il incombe au superviseur de s'assurer que cela est fait de façon efficace. Cet incident démontre la nécessité d'établir un commandement et un contrôle efficaces dès les premiers stades d'un incident critique.
La supervision d'un incident aussi dynamique est une tâche redoutable; il ne s'est écoulé que 20 minutes entre le moment où le premier et le dernier policier a été tué, et les lieux de crime étaient dispersés sur près d'un kilomètre. La vitesse, le danger et la complexité de l'incident ainsi que l'arrivée de ressources nécessitaient une solide connaissance de la situation, des tactiques judicieuses et un commandement et un contrôle décisifs. *****.
Formation en supervision
La formation en supervision est gérée par la Direction générale (DG). Le centre national de décision est appuyé par quatre centres de rendement situés à divers endroits au pays et dont la fonction principale est de coordonner, de gérer et de donner des programmes de perfectionnement :
Programme de formation pratique (PFP)
Programme de perfectionnement des superviseurs (PPS)
Programme de perfectionnement des gestionnaires (PPG)
Programme de perfectionnement des cadres et des officiers (PPCO)
Le PPS, destiné aux superviseurs de première ligne, ne porte pas sur la supervision tactique ni sur le commandement et le contrôle.
L'incidence de la formation sur le DRAI durant cet incident a déjà été examinée. Il faut noter que même si de nombreux premiers intervenants des services généraux avaient reçu la formation sur le DRAI, celle‑ci ne traite pas de la supervision. En fait, aucun des superviseurs qui ont participé à l'intervention initiale n'avait de formation ou d'expérience en supervision d'incidents critiques.
La transition du commandement entre le sous-officier des opérations, l'officier responsable des opérations de Codiac et le CIC était problématique et mal définie. L'information n'était pas bien consignée, donc pas communiquée efficacement. Le problème s'aggravait à chaque transition de commandement.
Les superviseurs qui sont intervenus durant l'incident ont dû faire face à des circonstances que très peu connaîtront. On reconnaît que le niveau de compétence en supervision requis durant la première heure de l'incident était exceptionnel, mais les policiers gèrent des crises tous les jours et les superviseurs devraient avoir la capacité d'en prendre le commandement.
3.3 Il est recommandé que la GRC donne aux superviseurs une formation afin qu'ils soient mieux préparés à assurer la gestion et la supervision pendant un incident critique jusqu'à ce que le commandant des interventions critiques (CIC) prenne la relève.
Le Collège canadien de police offre une formation de cinq jours qui porte sur certains principes nécessaires à la gestion d'incidents du genre. Comme il n'est pas raisonnable de s'attendre à ce que chaque superviseur suive ce cours, un mécanisme de prestation plus pratique devrait être établi.
Notons que même si la formation est un élément important pour améliorer les compétences en matière de tactiques et de commandement, la GRC doit aussi s'assurer de favoriser une culture à l'appui d'un tel apprentissage.
Commandement et contrôle
Le principal obstacle à la mise en œuvre d'un commandement et d'un contrôle efficace durant l'incident s'est avéré le manque de communication et la connaissance insuffisante de la situation. Les superviseurs ont besoin d'information pour diriger et gérer les ressources et les membres en ont besoin pour prendre des décisions tactiques, évaluer les risques et assurer la sécurité. Cet échange d'information n'a pas toujours eu lieu, ce qui a entravé la gestion de l'incident à tous les niveaux.
Les recherches sur les incidents impliquant des tireurs actifs ont montré que lorsque le commandement et le contrôle ne sont pas officiellement établis, les groupes d'intervention sont moins capables d'échanger de l'information. Le manque d'information qui en découle cause des retards importants dans l'intervention. L'absence de mode opératoire commun (MOP) nécessaire pour gérer efficacement les ressources disponibles entraîne aussi des retards. La sécurité des premiers intervenants peut aussi être compromise s'il n'y a pas de communication claire concernant les zones de sécurité et le statut du ou des tireurs.
Connaissance de la situation
La connaissance de la situation (CS) est essentielle à la planification et à l'exécution des interventions en situation d'urgence. Essentiellement, il s'agit d'être au courant de ce qui se passe autour de vous et de comprendre ce que cela signifie pour vous maintenant et plus tard. Ceux qui travaillent dans des environnements critiques, comme les membres pendant la crise, dépendent largement de leur CS pour prendre des décisions et exécuter leurs fonctions. Il existe des outils de CS qui donnent accès à l'information et en facilitent l'échange en temps réel et aident à prendre des décisions stratégiques et à trouver des solutions proactives.
Mode opératoire commun
Un examen rigoureux des technologies existantes qui pourraient avoir aidé la coordination durant l'incident n'a pas été effectué faute de temps, mais l'équipe d'examen fait les recommandations suivantes :
3.4 Il est recommandé que la GRC étudie des moyens de mettre en œuvre un mode opératoire commun (MOC) pour qu'une surveillance puisse être assurée simultanément par les superviseurs de première ligne, le commandant des interventions critiques (CIC), le Centre divisionnaire des opérations d'urgence (CDOU) et le Centre national des opérations (CNO). *****.
3.5 Il est recommandé que le Système de gestion des mesures d'urgence et le service de cartographie Web du CNO soient mis à la disposition de chaque division, et que les politiques, la formation et la supervision nécessaires soient établies pour en assurer l'utilisation par le CDOU et le CIC durant les incidents critiques, les événements majeurs et les catastrophes.
Le CDOU de la Division J avait des problèmes de capacité et sa connaissance de la situation ***** ni de fil de nouvelles dans ses installations, ses bureaux étaient exigus, il n'avait pas de salle dédiée aux communications pour les preneurs d'appels et les répartiteurs qui auraient pu gérer et diriger une partie de l'information, et il n'avait pas accès au service de cartographie Web du CNO. Le CDOU n'était pas prêt quand il a été activé. Les problèmes techniques auraient pu être évités si un horaire de maintenance de l'équipement du CDOU et les ressources nécessaires pour gérer un tel horaire avaient été en place.
Le CNO de la GRC n'a pas été activé, ce qui a nui à la coordination intergouvernementale et à l'efficacité des demandes de ressources, *****.
*****.
3.6 Il est recommandé que, où il n'en existe actuellement pas, chaque division établisse une politique et un protocole dans le cadre d'un plan d'opérations d'urgence pour identifier les points d'entrée et de sortie et les voies de transport majeures aux fins d'alerte et de surveillance en situation de crise.
Section 4 : Le déroulement de l'intervention
Question du commissaire : De quelle façon l'intervention coordonnée et du GTI a-t-elle été gérée en fonction de l'évolution de la situation?
Les membres des services généraux gèrent les situations dangereuses en contrant, en endiguant et en éloignant la menace. Les superviseurs ont la responsabilité de prendre les commandes et, au besoin, de prendre la décision d'évacuer les gens pour qu'ils soient hors de danger et de mettre en place des abris et des plans de réaction pour les cas où le suspect prendrait la fuite ou se rendrait.
Les superviseurs des services généraux sont demeurés responsables de la gestion de l'incident jusqu'à ce qu'un commandant des interventions critiques (CIC) prenne le relais. Pendant le déroulement des événements, certains membres ont déclaré que la situation était chaotique. Naturellement, la confusion a eu des effets sur la portion initiale de l'incident, pendant laquelle des coups de feu ont été tirés, des membres ont été tués et la situation a évolué très rapidement. La présente section du rapport porte sur l'évolution des mesures d'intervention à partir de la fusillade jusqu'à l'importante chasse à l'homme qui a suivi.
La GRC a élaboré des structures, des stratégies, des plans et des procédures afin de réduire les risques liés aux interventions en cas d'incidents critiques. Les structures de commandement échelonnables selon la nature et de la portée de l'événement. Pendant un incident critique comme celui de Moncton, le commandement tactique sur le terrain est géré par un CIC certifié. Dans le cas des événements majeurs, des crises à l'échelle nationale ou des incidents nécessitant une coordination centralisée, les OREC divisionnaires peuvent exiger l'affectation de personnel supplémentaire du Centre divisionnaire des opérations d'urgence (CDOU) pour la coordination des ressources de la GRC et des partenaires externes. Le commandant divisionnaire ou l'OREC continue d'exercer l'autorité et d'être aux commandes de l'opération.
La Direction générale de la GRC, par l'entremise du Centre national des opérations (CNO), fournit une orientation stratégique nationale, gère et coordonne l'information et les ressources des divisions, établit des priorités stratégiques et assure la liaison en matière de coordination et de communication avec d'autres organismes du gouvernement fédéral. Le CNO est en activité 24 heures sur 24, sept jours sur sept et mène des opérations courantes et des opérations d'intervention en situation de crise. Pendant une opération d'urgence, la liaison avec des organisations de l'étranger, d'autres organismes du gouvernement fédéral et Sécurité publique Canada doit être assurée par l'intermédiaire du CNO à l'échelle nationale.
La GRC gère les incidents critiques en mettant sur pied des équipes d'intervention en cas d'incident critique composées d'un CIC et de deux éléments sous-jacents : le Groupe tactique d'intervention (GTI) et l'Équipe de négociation en situation de crise (ENSC). Le CIC exerce l'autorité, assume la responsabilité et assure la reddition de comptes dans le cadre de l'opération et joue un rôle central en matière de leadership et de commandement, assurant la liaison avec tous les services de soutien. Le CIC est chargé de diriger les ressources humaines et matérielles nécessaires à la résolution de l'incident critique en toute sécurité. Il a la responsabilité de l'affectation des ressources, des relations entre ces ressources et de la préservation de l'intégrité du triangle de commandement.
L'une des premières tâches qu'un CIC doit accomplir après sa nomination consiste à adopter un énoncé de mission qui présente et oriente le ou les objectifs stratégiques de l'opération policière. Dans ce cas-ci, l'énoncé de mission était le suivant : « Trouver et arrêter Justin Bourque tout en assurant la sécurité de la population, des policiers et du sujet. » La mission a été accomplie avec succès étant donné que Justin Bourque a été arrêté et qu'il n'y a pas eu d'autres victimes.
La présente section traite de l'efficacité des recherches effectuées par la GRC pour retrouver Justin Bourque alors qu'elle menait simultanément une enquête criminelle et faisait tout en son pouvoir pour protéger la population et les policiers. Pendant la chasse à l'homme, un vaste éventail d'activités tactiques et d'enquête avaient lieu en parallèle, à proximité d'un tueur armé qui ciblait les policiers. Comme on ne connaissait pas la position de Justin Bourque, il était impossible de définir un périmètre précis et d'assurer un confinement efficace, c'est pourquoi toutes les opérations policières étaient très risquées. Les commandants des interventions ainsi que tous les intervenants spécialisés et les policiers de services généraux étaient aux prises avec un individu qui avait de nets avantages sur le plan tactique, notamment la capacité de faire feu sur les policiers à n'importe quel moment.
Outre le fait qu'on cherchait activement Justin Bourque et qu'on élaborait des méthodes d'intervention tactique à mettre en application une fois qu'on l'aurait trouvé, on devait examiner plusieurs lieux de crime dans le cadre de l'enquête criminelle portant sur trois meurtres et des tentatives de meurtre. Tous ces lieux se trouvaient près de l'endroit où le tireur avait été vu pour la dernière fois. Assurer la protection du personnel d'enquête affecté à ces lieux constituait donc une grande préoccupation. De plus, il fallait composer avec les nombreuses tâches logistiques visant à équiper et à affecter efficacement des centaines de membres de la GRC et de policiers de divers autres services des provinces de l'Atlantique et du centre du Canada afin qu'ils soient prêts à faire le travail.
Dans le contexte de l'intervention dans cette situation en évolution, une attention particulière sera accordée aux éléments suivants :
la façon dont la mobilisation et le déploiement des GTI de multiples divisions ont été coordonnés et exécutés, et l'efficacité globale de ce processus en ce qui a trait au temps d'intervention et à l'état de préparation opérationnelle;
l'efficacité des aéronefs du Service de l'air de la GRC et de Transports Canada à l'appui des opérations tactiques au sol pendant l'opération de recherche prolongée afin de retrouver le suspect;
les limites tactiques liées à la formation, à l'équipement ou aux politiques ou procédures, lesquelles ont eu une incidence directe sur l'efficacité opérationnelle du GTI;
les plans ou stratégies tactiques utilisés pendant l'opération;
la coordination globale de l'ensemble de l'opération visant à trouver et à appréhender le suspect;
la communication d'information pertinente aux membres en temps voulu, notamment au moyen de mises à jour de renseignements, de séances d'instructions et de directives;
la logistique à l'appui de l'intervention dans une situation en évolution (p. ex. l'hébergement, les repas, l'équipement et le transport);
le soutien organisationnel centralisé offert à la Division J pendant l'incident.
Après le meurtre du gend. Larche, des effectifs spécialisés ont commencé à arriver dans le secteur. À leur arrivée, les superviseurs et le CIC ont tenté de dresser un tableau précis des événements survenus et de la situation que le Détachement de Codiac devait gérer. Les premiers superviseurs ont constaté les défis que posaient la superficie et la géographie du secteur tandis qu'ils tentaient d'encercler le tueur.
L'équipe d'examen s'est entretenue avec de nombreux agents qui ont répondu à l'appel de déploiement du détachement. Le sous-officier des opérations croyait qu'il était aux commandes; cela dit, bon nombre de policiers ont également vu des officiers brevetés et des sous-officiers supérieurs dans le bureau. Il n'était donc pas facile de faire avec certitude la distinction avec ceux qui étaient déployés sur le terrain et ceux qui étaient des superviseurs sur les lieux. Dans de telles situations, il est essentiel de désigner clairement la personne responsable afin d'éviter la confusion et les tâches accomplies en double.
Comme le sous-officier des opérations n'a pas été avisé qu'il allait être remplacé par un membre ayant un grade supérieur, il a continué de diriger l'opération du poste de commandement à partir du bureau du sergent de veille. Étant donné qu'il n'y a pas eu de passage du commandement, le sous-officier des opérations a cru qu'il devait gérer cet aspect de l'incident jusqu'à l'arrivée d'un CIC. Dès qu'un CIC certifié s'est présenté sur les lieux, un poste de commandement a été installé au Colisée de Moncton. Il a été rapidement établi que l'endroit n'était pas convenable, et le poste de commandement et la zone d'étape ont donc par la suite été déménagés à la Garnison de Moncton. Cependant, certains membres n'ont pas été informés du changement et ont continué de se présenter à la zone d'étape du Colisée, sans compter que d'autres se sont rendus eux-mêmes sur les lieux de l'incident.
Le poste de commandement de l'incident critique n'a pas été opérationnel avant 3 h environ le 5 juin. Il est essentiel de rapidement établir un poste de commandement opérationnel et prendre les commandes de la gestion d'un incident à risque élevé comme celui survenu à Moncton. Le premier CIC arrivé sur les lieux s'est surtout consacré, pendant la soirée du 4 juin et au petit matin le 5 juin, à l'installation du poste de commandement à la Garnison de Moncton. Le sous-officier des opérations et l'officier des opérations du Détachement de Codiac ont donc dû assumer les fonctions de commandants des interventions *****. Le CIC aurait dû déléguer la tâche d'installer un poste de commande approprié pendant qu'il se consacrait à son rôle de commandant. Le délai lié à la mise en place d'un poste de commandement n'aurait pas dû entraver la prise du commandement de l'opération.
Une fois que le niveau de commandement approprié a été mis en place vers 3 h le 5 juin, la situation s'est stabilisée, l'information et les renseignements ont commencé à circuler, les intervenants avaient fermement établi la situation et la communication se faisait avec plus de fluidité. Lorsque les membres des GTI sont arrivés, ils ont reçu des instructions et ont été déployés pour assurer la sécurité des lieux, effectuer des patrouilles tactiques et ratisser les secteurs où Justin Bourque avait été aperçu. À partir du moment où le poste de commandement officiel a été installé et doté de l'effectif approprié (qui ne comptait toutefois pas de membres du Groupe des crimes majeurs), les nombreux lieux de crime ont pu être sécurisés et on a commencé leur examen.
Le poste de commandement à la Garnison de Moncton a été bien configuré en ce sens que le CIC, l'ENSC et les chefs de GTI ont été installés au même endroit. Afin d'assurer le bon fonctionnement du poste de commandement, il faut s'efforcer d'établir une communication efficace entre les membres du triangle de commandement en faisant appel à des personnes chargées d'assurer la liaison. Le chef du GTI de la Division J a continué d'exercer une fonction de liaison avec le CIC et a élaboré des plans tactiques (non rédigés).
Les structures de commandement comme le CDOU et le CNO peuvent être des outils précieux pendant des incidents complexes. Dans le cas présent, le Centre national des opérations n'a pas été activé. Le plus gros de la coordination à l'échelle nationale s'est donc fait directement entre les bureaux des Services de police contractuels et autochtones (SPCA) et des OREC divisionnaires. La coordination des ressources entre les divisions et les partenaires fédéraux comme les Forces canadiennes et Transports Canada aurait dû avoir été gérée au moyen des méthodes de fonctionnement normalisées en vigueur au CNO. Bien structurées, ces méthodes ont été appliquées très efficacement lors d'incidents antérieurs.
Les CIC ont décrit les façons dont ils se sont servis du principe SMEAC (Situation, Mission, Exécution, Administration et Chaîne de commandement), mais aucun plan opérationnel précis n'a été mis par écrit. La raison invoquée pour laquelle aucun des groupes tactiques affectés sur les lieux n'a rédigé de plans était que la situation était trop fluide et évoluait trop rapidement. Lorsqu'il n'est pas possible de rédiger des plans tactiques en raison de la logistique ou par manque de temps, les plans peuvent être approuvés verbalement par un CIC. Cela dit, un incident critique d'une durée de 29 heures devrait donner suffisamment de temps pour la mise par écrit de plans opérationnels précis pour les GTI. En l'absence de plans opérationnels écrits, certains GTI n'ont pas obtenu de l'information suffisamment détaillée sur l'exécution de certaines opérations tactiques. De plus, si la situation avait donné lieu à un long procès ou si une enquête sur les décès devait être lancée, les seuls documents de planification tactique seraient les tableaux de papier ou les tableaux de breffage et les notes du préposé au registre des communications du CIC. Il s'agit là d'une lacune, et cette façon de faire n'est pas conforme aux politiques et aux normes de formation de la GRC.
Les notes du préposé au registre des communications du CIC pendant l'incident de Moncton étaient semblables à un registre des communications d'un GTI, par opposition aux notes prises par le CIC au moment de prendre des décisions cruciales et à l'attribution des tâches qui en découlent en vue de l'atteinte des objectifs de la mission. Le CIC doit élaborer des stratégies et des options afin de prendre des décisions, et le préposé au registre des communications et les tableaux doivent rendre compte de ces stratégies et options. Celles-ci reposent sur l'information dont le CIC dispose pendant l'incident et elles peuvent changer selon les circonstances ou si de nouveaux renseignements indiquent que la situation a changé. Quand la situation change et que la stratégie doit être modifiée, on doit le consigner par écrit.
En tout, 100 policiers tactiques ont été déployés sur les lieux de cet incident critique. Trois des quatre groupes tactiques d'intervention de la Région de l'Atlantique de la GRC ainsi que ceux de la Division C et de la Division nationale ont été mobilisés et déployés. Les équipes tactiques des services de police de Bathurst, de Miramichi, de Fredericton et de Saint John ont également pris part à l'opération.
Six préposés au registre des communications, quatre techniciens radio, 14 membres du Groupe des interventions médicales d'urgence (GIMU), 11 équipes cynophiles et des membres de groupes de l'enlèvement d'explosifs et des Affaires spéciales I ont offert un soutien direct à ces équipes. De plus, cinq véhicules tactiques blindés (VTB) de la GRC et des aéronefs du Service de l'Air de la GRC (y compris des aéronefs commerciaux nolisés) et de Transports Canada ont apporté un soutien logistique.
Mobilisation et déploiement de groupes d'intervention tactique
La présente section est divisée en deux parties distinctes : la mobilisation et le déploiement du GTI de la Division J et la mobilisation et le déploiement subséquents d'autres groupes de la GRC et d'équipes tactiques du Nouveau-Brunswick qui ne relèvent pas de la GRC. Le programme des GTI de la GRC a été conçu de façon à ce que les GTI soient adaptables, c'est-à-dire que les équipes peuvent intervenir de façon indépendante pendant des incidents en fonction des ressources dont elles disposent, ou elles peuvent se joindre à d'autres GTI de la GRC pour intervenir en cas d'incident critique qui nécessite plus de ressources que celles offertes par une seule équipe. Si elles ont suivi la même formation, possèdent le même équipement, utilisent les mêmes tactiques et se conforment à la même structure de commandement, les équipes tactiques sont à même de travailler ensemble, et dans la pratique, elles s'entraident régulièrement pendant des opérations. Le chef du GTI du territoire touché assume habituellement le commandement des opérations tactiques sous la direction du CIC et est chargé de coordonner les activités tactiques des équipes sur le terrain.
Le sous-officier des opérations a demandé l'aide du GTI de la Division J à 19 h 51, et l'officier responsable du Détachement de Codiac a joint le chef du GTI par téléphone à 20 h. Les premiers renseignements reçus par ce dernier étaient qu'une situation impliquant un tireur actif était en cours et que deux membres avaient été abattu par balle.
Selon sa première conversation téléphonique, le chef du GTI croyait que la fusillade avait lieu à l'école Hildegard. En raison de cette confusion, le premier message d'alerte que le chef du GTI a envoyé aux membres de son équipe faisait mention d'une école. Les cinq membres du GTI de la Division J qui habitent dans la région de Moncton ont pu se rendre rapidement sur les lieux avant le reste de l'équipe. Comme de l'information erronée quant à une école avait été donnée, *****. L'information transmise aux membres du GTI a par la suite été corrigée, et les autres membres du GTI sont arrivés sur les lieux avec leur uniforme de camouflage et l'équipement approprié pour l'opération.
Des membres de l'Équipe de négociation en situation de crise (ENSC) ont également été affectés sur les lieux. L'ENSC de la Division J a dépêché un nombre suffisant de membres. Immédiatement après leur mobilisation, les membres de l'ENSC ont cherché activement à obtenir de l'information essentielle à leur travail. Cette pratique est couramment utilisée par les membres de l'ENSC de la GRC et aide grandement les enquêteurs et le triangle de commandement. L'ENSC de la Division J s'est efforcée d'élaborer rapidement une stratégie de communication pour le cas où un contact serait établi avec Justin Bourque.
Le CIC et l'ENSC ont fait appel au Groupe des sciences du comportement (GSC) et à un professionnel de la santé mentale pour qu'ils aident à la mise au point de stratégies en vue de l'arrestation sécuritaire de Justin Bourque. Les professionnels de la santé mentale sont en mesure de fournir à l'ENSC des opinions médicales et des conseils pour la résolution d'incidents. Pour ce faire, ils passent par l'ENSC et ne s'adressent pas directement au CIC. Comme il a été mentionné précédemment, le CIC a bien agi en ordonnant à l'ENSC de communiquer avec un professionnel de la santé mentale. Un examen de documents de l'ENSC a révélé que celle-ci s'était vu attribuer des tâches appropriées et a produit un rapport après action, ce qui permettra d'améliorer ses mesures d'intervention si elle devait recevoir de nouveau le même genre d'appels.
L'ENSC et le GTI ont adopté une stratégie d'intervention coordonnée pour le cas où ils trouveraient Justin Bourque. Le CIC aurait veillé à ce que les membres du GTI soient sur place et prêts à intervenir en présence du suspect. Sans plans opérationnels écrits, l'équipe d'examen ne savait pas quelle était la stratégie tactique approuvée à adopter face à Justin Bourque. Les membres du GTI ont pris part à des discussions sur les règles d'engagement à suivre si Justin Bourque présentait une menace pour eux, sur les mouvements tactiques et les mesures d'intervention à prendre selon les divers gestes que le suspect pourrait poser. Une telle structure de commandement et de contrôle est généralement mise en œuvre pendant les interventions du GTI. *****.
Il nous faut à présent décrire la procédure que les membres du GTI suivent généralement au moment de prendre la relève des policiers des services généraux sur les lieux d'un crime. *****.
Dans le cas présent, l'OREC de la Division J a communiqué avec le commissaire adjoint des Services de police contractuels et autochtones à Ottawa pour lui demander de l'aider à mobiliser et à déployer des équipes de soutien. Comme il a été mentionné plus tôt, il aurait été plus indiqué que le CDOU et le NOC s'en charge. On a ensuite communiqué avec les OREC des divisions C, H, L et B et de la Division nationale (Ottawa) pour qu'ils autorisent les déploiements, après quoi l'équipe d'Ottawa a immédiatement commencé les préparatifs en vue du transport par avion d'un groupe précurseur; le reste de l'effectif allait être dépêché par voie terrestre. Les services d'une compagnie aérienne d'Ottawa ont été retenus pour transporter huit membres de la Division nationale dépêchés avant l'effectif principal. Ce premier groupe est donc arrivé sur les lieux par avion dans les deux heures suivant leur mobilisation.
L'équipe de la Division C se trouvait à Québec pour donner une formation sur les opérations maritimes avec le GTI de la Division O et des services de police du Québec. Vu le grand nombre d'appels qu'elle recevait, l'équipe de la Division C avait apporté la majeure partie de son matériel opérationnel pour le cas où les membres seraient appelés à intervenir. Les membres ont donc pu se rendre directement à Moncton, car ils n'ont pas eu besoin de retourner à Montréal pour récupérer leur équipement, ce qui leur a permis de gagner du temps et a réduit les risques de fatigue. Un membre du GTI de la Division C était resté à Montréal. On l'a chargé de préparer de l'équipement tactique supplémentaire pour qu'il soit transporté par le Service de l'air de la GRC en direction de Moncton le lendemain matin. Les membres de la Division C ont fait la route entre Québec et Moncton pendant la nuit. Lorsqu'ils sont arrivés à destination, ils n'avaient pas dormi depuis près de 24 heures. Le sergent Welcher leur a alors ordonné d'aller se reposer dans un hôtel du secteur avant de se mettre au travail. Comme elle ne disposait pas de l'équipement opérationnel nécessaire à Québec, l'équipe de la Division O n'a pu être déployée à Moncton.
Le véhicule tactique blindé (VTB) de la Division C n'a pu être utilisé dans le cadre de cette opération étant donné qu'il se trouvait à Montréal et qu'on n'en a pas fait la demande. En tout, cinq VTB-1 de la GRC ont été envoyés pour le GTI, soit deux de la Division nationale et un de la Division J, un de la Division H et un de la Section des techniques de blindage à Ottawa. S'il avait été au courant de la situation tactique, le chef de l'équipe de la Division C aurait veillé à ce que le VTB de sa division soit envoyé sur place et aurait demandé que le véhicule blindé du Service de police de la Ville de Québec le soit également. Le VTB de la GRC a été conçu pour ce genre d'opération, et vu l'ampleur des événements, il était essentiel de disposer du plus grand nombre possible de ces véhicules. Pour compenser le manque de VTB, on a eu recours à des camions blindés commerciaux.
*****. Le véhicule de la Division H ***** est quand même tombé en panne; il a dû être remorqué et un mécanicien a été en mesure de le réparer.
4.1 Il est recommandé de recourir au train ou au camion à plate-forme pour le transport de véhicules tactiques blindés (VTB) sur de longues distances.
Efficacité et utilisation de la formation, des tactiques et du matériel du GTI pendant l'incident
Le GTI fait partie d'un ensemble de mesures d'intervention intégrée en cas d'incident critique. Les membres du GTI sont chargés d'entrer en contact avec le suspect sur le terrain et de l'appréhender. Pour y arriver, de nombreux éléments de soutien, notamment les Services généraux, les Affaires spéciales I, le Service de l'air et des négociateurs en situation de crise, doivent travailler ensemble. Il est essentiel que le GTI puisse travailler conjointement avec ces groupes, et cette interopérabilité est liée directement à la formation des équipes, aux tactiques qu'elles emploient et à l'équipement dont elles disposent.
Aucun problème n'a été relevé relativement aux profils de la mission établis pour le personnel tactique pendant l'incident visé par le présent rapport. Toutes les interventions relevaient du mandat opérationnel du GTI. Le chapitre 2.3 du Manuel des opérations tactiques de la GRC dresse la liste des tâches possibles auxquelles un GTI peut apporter un soutien tactique armé, et pour les besoins de l'incident de Moncton, les tâches suivantes ont été ou pouvaient être exercées :
arrêter ou neutraliser des personnes armées ou barricadées avec ou sans otages;
aider à arrêter des suspects ou des personnes déséquilibrées;
aider d'autres sections au besoin;
immobiliser ou prendre d'assaut des véhicules à risque élevé;
effectuer de la surveillance rurale lorsqu'une compromission risque d'entraîner des actes violents à l'endroit des policiers ou qu'une formation ou de l'équipement spécialisé est nécessaire en raison des conditions environnantes.
Le principal avantage que présente un GTI pour un commandant des interventions est la possibilité d'élaborer des plans visant à remplir une mission donnée en tenant compte de la situation tactique ainsi que de coordonner les efforts d'une ou de plusieurs équipes. Les situations tactiques changent constamment et, de ce fait, la formation donnée aux membres du GTI et les tactiques qu'ils utilisent sont conçues de manière à assurer une certaine souplesse. Les tactiques sont toutefois *****.
Le GTI s'est vu confier plusieurs tâches pendant l'incident. Comme on ne savait pas où se trouvait le suspect, l'effectif du GTI a été divisé de façon à former des équipes d'action immédiate (AI) à bord de VTB afin de se rendre aux endroits où le suspect avait été aperçu et d'évaluer la situation rapidement. Un plan a donc été élaboré rapidement et plusieurs équipes d'AI et véhicules ont été déployés de façon coordonnée selon la situation. On a procédé ainsi en présumant que le suspect avait été vu en zone urbaine ou dans des espaces ouverts *****. Lorsque l'aéronef de surveillance signalait la présence possible du suspect à un endroit donné, des membres du GTI étaient dirigés vers le lieu en question et déployés comme il se devait selon les données de la surveillance aérienne en temps réel. Le principe tactique fondamental « isoler, circonscrire, évacuer et négocier » ne pouvait pas être mis en application tant que le suspect n'avait pas été repéré. Afin de trouver Justin Bourque et pour que le GTI puisse l'appréhender ou, au besoin, le neutraliser, on a eu recours aux médias sociaux, à la surveillance aérienne, électronique et humaine, et à des interventions à la suite de signalements d'endroits où le suspect avait été vu. Compte tenu des risques élevés liés à la recherche du suspect au sol alors qu'on ne connaissait pas sa position, le commandant des interventions a déterminé, après avoir consulté le conseiller en opérations tactiques, que cette stratégie serait employée en dernier recours.
De plus, les membres du GTI ont assuré la sécurité aux divers lieux de crime qui devaient être traités pendant les recherches, alors que le suspect pouvait se trouver à proximité. Les membres du GTI ont établi des périmètres de sécurité autour de chacun des lieux de crime en cours de traitement. *****. Grâce à leur aide, les membres du GTI ont pu être affectés aux endroits où le vaste éventail de leurs capacités tactiques pouvaient être le mieux exploitées.
*****.
Par le passé, lorsque des membres d'un GTI pénétraient dans des secteurs boisés ou mal éclairés, la seule façon de repérer un suspect armé consistait à faire appel à une équipe cynophile et à se servir de leurs yeux et de leurs oreilles. *****.
Les membres du GTI doivent avoir le matériel et la formation nécessaires pour que l'avantage tactique ***** soit optimisé.
*****.
Les déploiements de groupes tactiques ont souvent lieu la nuit; *****.
4.4 Il est recommandé que des exercices annuels d'opérations tactiques de nuit avec le Service de l'air soient mis au point et que les membres du GTI y participent pour maintenir leurs acquis.
Utilisation des véhicules tactiques blindés
Les VTB se sont également révélés des outils essentiels. Il s'agissait précisément du type d'incident pour lequel ces véhicules ont été conçus. Les membres du GTI portent du matériel qui nuit à leur mobilité. *****. Toute économie d'énergie grâce à un positionnement stratégique est avantageux. Les VTB permettent aux membres de se déplacer à proximité de l'élément de menace tout en se protégeant des coups de feu et en ayant la possibilité de tirer des coups de feu à leur tour. Ils représentent un avantage tactique considérable et ont un important effet dissuasif qui pourrait amener un suspect à se rendre. Les VTB procurent une excellente protection balistique, mais on a relevé des problèmes liés aux tactiques et au soutien de ces véhicules pendant l'incident.
Il était difficile de positionner les VTB et de déterminer avec certitude quel véhicule transportait quelle équipe étant donné que le personnel de commandement se fiait *****. Pendant l'arrestation, de multiples VTB ont été envoyés sur les lieux afin d'encercler le suspect. *****.
4.5 Il est recommandé que des stroboscopes infrarouges soient installés sur tous les véhicules tactiques blindés pour qu'ils puissent être identifiés au moyen d'un indicatif d'appel précis pendant les opérations comprenant une surveillance aérienne.
À l'heure actuelle, la formation sur la conduite de VTB est réservée aux membres de GTI *****. On doit disposer d'un nombre adéquat de conducteurs de VTB remplaçants. Cette stratégie est adoptée dans d'autres secteurs du programme *****.
4.6 Il est recommandé que des agents qui ne font pas partie d'un GTI soient désignés et formés pour conduire des véhicules tactiques blindés afin de permettre aux membres du GTI de se concentrer sur leurs tâches principales.
Outre la formation officielle sur la conduite de VTB, on doit donner aux membres des GTI une formation pour veiller à ce qu'ils utilisent les fonctions du véhicule de façon optimale. Les participants au cours centralisé de GTI apprennent les tactiques et les procédures de base liées aux opérations avec VTB, mais les membres de GTI sur le terrain ne suivent pas cette formation. Certains groupes divisionnaires ont mis au point leurs propres méthodes de fonctionnement normalisées et les transmettent à la Section de la formation tactique afin qu'elles soient intégrées dans les méthodes normalisées à l'échelle nationale. Lorsque de multiples groupes sont déployés à bord de VTB et que des membres de différents groupes se trouvent dans le même véhicule, il est crucial que tous connaissent aussi bien le véhicule.
*****.
L'utilisation des VTB par le GTI est considérée comme valable *****. La GRC est la seule utilisatrice de ces véhicules, qui présentent des spécifications adaptées à nos besoins; ces modèles n'existaient donc pas sur le marché. Le recours à ces VTB s'explique surtout par le fait qu'ils offrent une plus grande protection balistique que les autres véhicules du même type sur le marché. Comme les véhicules ont été fabriqués sur mesure en quantité limitée, le fabricant offre une assistance minimale.
Normalisation de l'équipement et de la formation du programme des GTI
Même si le présent rapport n'a pas pour but d'examiner le programme des GTI de la GRC, certains aspects de ce programme influent sur les opérations lorsque plusieurs équipes doivent travailler ensemble. Il existe de nombreuses similitudes entre les groupes au chapitre de la formation, des tactiques et de l'équipement de base, mais également des différences importantes. Il y a des équipes à temps plein et à temps partiel ainsi que des groupes comptant des membres à temps plein et à temps partiel.
Les rapports produits au fil des ans ont révélé la nécessité pour les GTI d'offrir des services à temps plein, de sorte que tous les membres des GTI puissent consacrer le temps requis au perfectionnement et au maintien de leurs compétences, qui se perdent facilement. C'est pour cette raison que l'équipe d'examen est en faveur du concept des groupes à temps plein. Cela dit, ce sont les ressources financières et humaines dont dispose chaque division qui déterminent principalement le type de groupe qui peut être mis sur pied. Il importe de mettre l'accent sur les améliorations qui peuvent être apportées en fonction des ressources de chaque division.
Pour veiller à leur interopérabilité, tous les groupes doivent avoir accès au même équipement, et pour que le modèle du CIC soit le plus efficace possible, les commandants des interventions doivent être au fait de la capacité des GTI qui sont sous leur responsabilité et avoir confiance en celles‑ci. *****. L'équipement comprend des appareils techniques *****, mais également des éléments en apparence moins importants comme les uniformes. À Moncton, on savait que le suspect portait un uniforme de camouflage. Le fait que les membres des diverses équipes tactiques portent des uniformes de camouflage ***** présente des risques, car on pourrait ne pas être en mesure de les identifier instantanément comme étant des policiers. Si on met du temps à distinguer un policier d'un agresseur à cause de ses vêtements, le délai pourrait s'avérer fatal dans une situation de combat rapproché. Pour les cas où la végétation détermine le type de vêtements de camouflage le plus efficace pour chaque équipe, il serait avantageux que des normes rurales et urbaines communes soient adoptées lorsque plusieurs équipes travaillent ensemble.
Le membre d'une équipe d'assaut du GTI en Colombie-Britannique doit avoir en sa possession le même équipement que le membre de Terre-Neuve-et-Labrador si les profils de mission des deux équipes sont identiques. Cela vaut également pour les tireurs d'élite et les observateurs. Les tactiques peuvent ainsi être normalisées le plus possible. En cas d'incident comme celui visé par le présent rapport, il est important que les commandants des interventions puissent faire appel à des équipes ayant des compétences semblables pour avoir le moins possible à adapter les missions en fonction des limites de chaque équipe.
4.7 Il est recommandé que soit dressée une liste normalisée de l'équipement dont ont besoin les membres de GTI et que cet équipement soit acquis afin qu'il soit distribué à toutes les équipes du programme des GTI.
Utilisation et efficacité des aéronefs du Service de l'air de la GRC et de Transports Canada pendant l'opération
Les aéronefs ont été d'une grande aide tout au long de l'intervention découlant de l'incident. Les risques auxquels les membres étaient exposés au moment où ils cherchaient et ont appréhendé Justin Bourque ont été réduits considérablement grâce à la surveillance aérienne. Vu la grande superficie du secteur visé par les recherches et les risques extrêmes qu'aurait présentés l'opération si elle avait été dirigée par des membres au sol, des aéronefs munis d'un équipement spécialisé se sont avérés l'outil le plus efficace. De plus, la flotte du Service de l'air de la GRC (y compris des aéronefs nolisés de compagnies contractantes) a servi à transporter du personnel et de l'équipement, ce qui a contribué directement au déploiement rapide de ressources sur le terrain.
Pendant l'incident, l'établissement d'un horaire d'utilisation des aéronefs et la coordination de cette utilisation ont constitué un défi. Les appareils devaient être utilisés pour le transport de passagers et d'équipement et servir d'outils tactiques durant les recherches afin de trouver Justin Bourque. Parmi les principales difficultés relevées, mentionnons le fait que même si le Service de l'air offrait un soutien essentiel au commandement des interventions, aucun représentant du Service de l'air n'était affecté au poste de commandement pour assurer la liaison. Ce représentant aurait pu conseiller le commandant des interventions et, conjointement avec la direction du Service de l'air, s'occuper d'envoyer des aéronefs sur place pour répondre aux besoins de l'opération tout en veillant au recours efficace et coordonné à l'équipement et au personnel. À l'avenir, si le Service de l'air doit jouer un grand rôle dans une opération, il est recommandé qu'un représentant de ce service fasse partie de la structure de commandement qui gère l'intervention, de la même façon que les GTI, les Crimes majeurs et les négociateurs, par exemple, y sont actuellement représentés. Afin qu'elles soient le mieux à même de remplir leur rôle, les personnes désignées doivent suivre une certaine formation sur le commandement des interventions (p. ex. sur le Système de commandement des interventions) pour pouvoir faire leur travail efficacement dans ce contexte.
4.8 Si on fait appel au Service de l'air pendant une situation urgente de grande ampleur, il est recommandé que des représentants du Service de l'air ayant la formation appropriée soient affectés au poste de commandement à titre d'agents de liaison pour y assurer un soutien.
Peu après la réception du premier appel de demande d'aide tactique, le Service de l'air a été intégré dans les mesures d'intervention pendant l'incident. L'hélicoptère stationné à Moncton, *****, a été déployé après que la station de transmissions opérationnelles (STO) a signalé au pilote qu'on avait tiré sur un membre. Le pilote était accompagné d'un policier des services généraux *****. Le pilote a donné un cours pratique sur place au policier pour qu'il puisse se servir de l'équipement.
*****.
En ce qui concerne le système ***** en tant que tel, celui qui est installé dans l'hélicoptère est un ancien modèle ***** l'hélicoptère a été déployé rapidement et a pu offrir une surveillance aérienne aux membres sur les lieux. Le Service de l'air de la GRC a conclu un contrat avec un affréteur pour le transport par avion à réaction du premier groupe de huit membres du GTI de la Division nationale et de tout leur équipement depuis Ottawa jusqu'à Moncton. L'avion a effectué en tout trois vols aller-retour pour transporter du personnel et de l'équipement. Grâce à l'offre à commandes dont dispose la GRC pour les services de l'affréteur, une entente contractuelle a pu être conclue rapidement. L'avion à réaction Citation a permis de transporter du personnel et de l'équipement plus rapidement qu'aurait pu le faire n'importe quel aéronef de la GRC. Un aéronef de la GRC (non muni d'appareils utilisés pour des opérations de recherche) a été utilisé pour aller chercher des cadres supérieurs de la Division J en réunion à l'extérieur du Nouveau-Brunswick et un autre stationné à London (Ontario) a servi au transport de GPBR et de carabines d'Ottawa à Moncton à l'appui de l'opération. On a également eu recours à un aéronef stationné à Montréal pour livrer de l'équipement de GTI supplémentaire à l'équipe de la Division C.
Sécurité du périmètre
Après que le contact avec Justin Bourque a été perdu, cet aspect de l'opération policière qui était en cours s'est avéré difficile à gérer. En raison de plusieurs facteurs, des membres postés le long du périmètre se sont trouvés dans une position très vulnérable. Certains des risques auxquels ils s'exposaient découlaient directement de la menace que Justin Bourque représentait, tandis que d'autres étaient liés à l'état de confusion générale entourant la façon dont le déploiement de policiers était dirigé.
L'élément tactique le plus important avec lequel le CIC devait composer au moment de déterminer la façon dont les membres allaient être déployés était qu'on ne savait pas du tout où Justin Bourque se trouvait. On fait référence ici non seulement à sa position exacte, mais également au lieu où il se trouvait de façon plus générale. En l'absence de renseignements fiables, on ne pouvait qu'émettre une hypothèse raisonnée à cet égard. En fait, le périmètre correspondait au Grand Moncton.
Le CIC a déployé toutes les ressources technologiques et humaines disponibles pour tenter de mieux cibler le secteur où Justin Bourque pouvait se cacher. Parmi ces ressources, mentionnons *****, la surveillance continue des médias sociaux, ***** et la vigilance exercée par la collectivité afin de signaler des activités suspectes. Plusieurs signalements selon lesquels le suspect aurait été aperçu et des coups de feu auraient été tirés à divers endroits de la ville ont été faits entre le moment où Justin Bourque a pris la fuite la première fois et celui où il a été arrêté. Chaque signalement a donné lieu à une solide intervention policière. On peut ainsi affirmer que le périmètre était fluide par opposition à un périmètre fixe par nécessité.
Dans les heures qui ont suivi la fusillade, des membres du Détachement de Codiac qui n'était pas de service ont commencé à se présenter au bureau pour offrir leur aide. Puis, d'autres effectifs sont arrivés peu à peu depuis d'autres régions de la province et d'autres divisions. Les policiers arrivaient en grand nombre, mais aucun processus efficace d'accueil et de breffage n'avait été établi. Le Détachement de Codiac servait de zone d'étape par défaut pour les membres du personnel à leur arrivée, dont bon nombre ont pris eux-mêmes les mesures nécessaires pour obtenir l'information et l'équipement dont ils avaient besoin avant de se rendre sur les lieux. Le processus de consignation du personnel, des véhicules attribués aux policiers, des lieux d'affectation et des tâches était tout simplement chaotique. Ce sentiment a été exprimé constament par de nombreux membres avec qui l'équipe d'examen s'est entretenue. Cette situation a fini par nuire à la coordination du périmètre, car on ne pouvait pas confirmer avec exactitude le lieu où était affecté chaque policier.
La STO s'est trouvée face à un défi de taille, celui de déterminer quels véhicules étaient sur la route et qui se trouvait à bord de ceux-ci. Tous les véhicules du Détachement de Codiac (identifiés et banalisés) étaient utilisés. Des membres d'autres divisions sont arrivés sur les lieux dans des véhicules dans lesquels la fonction de localisation GPS du système CIIDS était inefficace étant donné que le logiciel n'avait pas été programmé selon les paramètres de la Division J. La STO ne pouvait donc pas connaître leur position ou suivre leurs déplacements. Après avoir pris les commandes d'une intervention tactique, le CIC doit toujours avoir une idée des lieux où se trouvent ses ressources et du nombre de ressources déployées, ce qui constitue une des principales exigences de son travail. Pendant l'événement, plusieurs heures se sont écoulées avant que le CIC ait cette information. Voici un exemple qui témoigne de la confusion qui régnait : la gend. Martine Benoit, sur qui Justin Bourque avait fait feu plusieurs fois alors qu'elle était à l'abri dans sa voiture de police pendant l'intervention initiale, a par la suite été réaffectée à la sécurité du périmètre sans qu'on lui ait demandé de compte rendu ou prodigué des soins.
On a fait appel à des membres qui avaient suivi les cours d'utilisateur de la carabine et de formateur d'utilisateurs de la carabine à Fredericton. Les premiers intervenants avaient besoin d'une puissance de feu accrue sur le terrain, et ces membres ont été en mesure de répondre à ce besoin étant donné qu'ils pouvaient se servir de la carabine. Les ***** fusils en état de service du détachement ont été remis aux membres affectés au périmètre, de même que les ***** carabines qui figuraient dans l'inventaire du détachement. *****. On les a tout de même réquisitionnées pour que les membres sur le terrain aient des armes d'épaule à leur disposition.
Des images des médias qui montraient des policiers en uniforme en train d'assurer la sécurité du périmètre un peu partout à Moncton étaient diffusées à l'échelle nationale et internationale. Très peu d'agents de la GRC portaient le gilet pare-balles rigide (GPBR). Cette situation peut s'expliquer en partie par le fait que ***** chaque véhicule de police du Détachement de Codiac contenait ***** GPBR et que la plupart des véhicules ***** ; il n'y avait donc pas suffisamment de gilets pour tous. Bien des agents n'étaient pas au courant qu'un de ces gilets se trouvait dans le véhicule, et d'autres ne savaient pas comment le porter adéquatement. Cela témoigne d'un manque général de connaissances et de compréhension en ce qui concerne la façon dont le GPBR doit être porté et les circonstances où il doit l'être.
Plusieurs membres qui assuraient la sécurité du périmètre ont été vus assis dans leur véhicule ou debout à côté de celui‑ci. Comme on a pu le constater pendant la tragédie de Moncton, les occupants d'un véhicule de police sont des cibles relativement faciles pour un agresseur armé comme Justin Bourque. Le véhicule peut offrir une protection efficace au membre qui se place correctement par rapport au véhicule. Cela dit, l'équipe d'examen reconnaît qu'il est très difficile de rester en état d'extrême vigilance pendant de longues périodes dans ces conditions. Les membres ne disposaient pas de nombreux moyens de se protéger. Ils pouvaient notamment être équipés d'armes à feu longues pouvant tirer sur une menace à une certaine distance, porter un GPBR pour se protéger contre les balles et rester mobiles (éviter de demeurer assis dans un véhicule) pour le cas où ils devraient répliquer à des coups de feu.
En analysant la déclaration de Justin Bourque, l'équipe d'examen a dégagé certains éléments. Il s'en est pris aux policiers lorsqu'il sentait qu'il avait un énorme avantage tactique. Il savait que des policiers étaient à sa recherche, mais a décidé de ne pas recommencer à tirer, car selon lui, la situation n'était pas en sa faveur. Il a précisé que le nombre de policiers qu'il voyait était un facteur déterminant pour lui : s'il y avait de nombreux policiers, il serait encerclé et finirait par perdre l'affrontement. L'affectation de groupes à la sécurité du périmètre a eu un effet dissuasif sur Justin Bourque.
En résumé, même si la sécurité au périmètre constitue une fonction policière assez courante, il faut veiller à ce que les membres soient en mesure d'adopter les tactiques appropriées selon la nature de l'incident. À cet égard, il faut entre autres s'assurer qu'ils disposent de l'équipement dont ils ont besoin pour exercer leurs fonctions et que les superviseurs leur fassent bien comprendre les facteurs qu'ils doivent prendre en considération sur le plan tactique dans les circonstances.
Arrestation de Justin Bourque
Les éléments mis en évidence dans la présente section, y compris le GTI, le Service de l'air, les VTB et le CIC, ont tous joué un rôle dans l'arrestation de Justin Bourque, comme il est décrit ci-dessous.
Afin de retrouver le suspect et au moment de son arrestation par les membres du GTI, on a eu recours à de l'équipement de surveillance électronique très complexe et aux observations des témoins, une technique simple. La présente section porte sur la façon dont le suspect a été trouvé, les tactiques employées pour approcher du lieu où il se trouvait et les difficultés liées à la coordination du déploiement et des déplacements des ressources du GTI (membres et véhicules) découlant de l'absence de certaines ressources techniques. Même si on a réussi à appréhender le suspect sans qu'il fasse d'autres victimes, des erreurs tactiques ont été commises surtout en raison des problèmes d'équipement susmentionnés et auraient pu mener à une fin de mission beaucoup plus violente. Le but n'est pas de critiquer les membres qui ont pris part à l'opération, car ils ont fait de leur mieux avec les renseignements et l'équipement dont ils disposaient. Le but est de souligner les améliorations qui peuvent être apportées afin de pallier les lacunes relevées dans le programme des GTI.
Le signalement d'un résident de la promenade Mecca qui a dit avoir vu le suspect a été le premier de la série d'événements qui ont mené à la découverte du suspect. Le témoin a affirmé avoir vu un homme à l'extérieur, vêtu d'une veste de camouflage et d'un pantalon brun, accroupi sous la fenêtre de la cuisine de sa résidence. L'individu est ensuite retourné en courant dans le boisé derrière la maison. L'information a été transmise à la police, puis des membres du GTI (à bord de VTB) ont été dépêchés dans le secteur pour faire enquête. Des aéronefs ont également été envoyés sur place ***** aider ainsi les membres du GTI à s'approcher efficacement du suspect tout en tirant le meilleur parti possible du terrain et en faisant tout en leur pouvoir pour assurer la sécurité du public et des policiers à cette étape très risquée de la tentative d'arrestation du suspect. ***** les recherches étaient concentrées dans le secteur de la promenade Mecca après le signalement du témoin.
Comme il a été mentionné dans la partie du rapport qui décrit des difficultés relatives à l'équipement des aéronefs du Service de l'air, l'hélicoptère de la GRC ***** était doté d'une caméra dont le modèle est considéré comme plus ancien que ce que l'on peut trouver sur le marché. *****.
Comme le suspect n'a pas été interrogé par l'équipe d'examen, il est impossible d'avoir la confirmation de ce qu'il a perçu dans les moments précédant son arrestation. Cependant, grâce à un certain nombre de facteurs, notamment des images vidéo, on peut faire des suppositions raisonnables sur les raisons qui ont poussé le suspect à agir comme il l'a fait, au moment où il l'a fait. *****. En gros, il savait qu'un hélicoptère survolait le secteur et il tentait de dissimuler sa présence. *****.
Les déplacements des membres du GTI au sol étaient coordonnés depuis le poste de commandement dans le but d'isoler et d'encercler le suspect. L'équipe *****, composée d'agents du GTI du Service de police de Saint John et de trois membres du GTI de la Division L de la GRC, s'est rendue à bord d'un VTB jusqu'à la promenade Mecca, est descendue du véhicule *****.
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Depuis le dernier contact avec Justin Bourque jusqu'à son arrestation 29 heures plus tard, il n'y a pas eu d'autres victimes (y compris le suspect). On peut ainsi conclure que la mission policière a été réussie. On doit ce succès à tous les agents qui ont pris part à la mission. Il importe de souligner que Justin Bourque n'est pas sorti de sa cachette et ne s'est pas rendu au moment et à l'endroit qu'il avait choisis. Il s'est rendu lorsqu'il s'est retrouvé face à de nombreux policiers et parce qu'il ne souhaitait pas mourir dans un échange de coups de feu sur lequel il n'allait pas avoir le dessus.
Aide militaire
Selon certaines dispositions législatives, la GRC peut demander l'aide des Forces canadiennes (FC) pendant des opérations nécessitant des ressources spécialisées ou uniques. Cette exigence peut aussi s'appliquer à l'utilisation de l'équipement spécialisé que possèdent les FC. En ce qui concerne l'incident de Moncton, ces dispositions auraient pu s'appliquer à plusieurs égards.
Des véhicules blindés de Brinks ont été utilisés jusqu'à ce que les VTB de la GRC arrivent sur les lieux. Vu l'importante présence militaire à la base des FC de Gagetown, il est fort probable que des véhicules et des conducteurs des FC aient été disponibles en vue de leur déploiement à Moncton à court préavis à titre de complément aux VTB de la GRC.
Les FC disposent également d'aéronefs et de dispositifs de suivi par GPS qui auraient pu être envoyés sur les lieux au tout début des événements ou en cas de prolongation des recherches.
Dans ce genre de situation, on fait appel aux Forces canadiennes aux fins de soutien seulement; c'est la GRC qui demeure aux commandes de l'opération.
Section 5 : Équipement et armes
Question du commissaire : Quel était l'état de disponibilité de l'équipement et des armes et ont-ils été utilisés?
Membres qui sont intervenus
Le 4 juin 2014, 24 membres de la GRC sont intervenus entre le moment où le premier appel a été reçu concernant la présence d'une personne suspecte armée sur l'avenue Pioneer et les derniers coups de feu tirés. De ces membres, 18 portaient la tenue de service no 1 (uniforme de travail), notamment un gilet pare-balles souple (GPBS), un pistolet entièrement chargé dans un étui et deux chargeurs garnis. Quatre membres étaient en tenue civile et portaient un GPBS, trois d'entre eux étant armés de fusils. Un membre portait l'uniforme des Services cynophiles et un pistolet entièrement chargé dans un étui et un autre membre était vêtu de l'uniforme standard de la Section de l'identité judiciaire (SIJ) et avait un GPBS et un pistolet entièrement chargé dans un étui.
Armes à feu
Le Détachement de Codiac possédait ***** fusils fonctionnels et ***** carabines .308. Les deux maîtres de chien du Détachement avaient chacun un fusil. ***** fusils et ***** carabines .308 étaient rangés *****. Environ ***** cartouches à fusil et ***** cartouches .308 étaient rangées avec ces armes. Le reste des fusils et des munitions du Détachement étaient conservés *****.
Au Détachement de Codiac, un commissionnaire remet l'équipement, y compris les fusils et les carabines, aux membres au début de leur quart de travail. L'information à ce sujet est généralement consignée sur une feuille de sortie. Un commissionnaire fait ce travail de 7 h 30 à 19 h 30 sept jours par semaine. En son absence, c'est le commissionnaire du bloc cellulaire remet l'équipement.
Au moment du premier appel, aucun fusil ni aucune carabine n'a été déployé. Avant l'incident, il était inhabituel pour les membres du Détachement de Codiac de prendre des fusils au début de leur quart. La pratique consistant à garder la majorité des fusils verrouillés ***** découlait sans doute du fait qu'ils étaient rarement utilisés. Le Détachement garde maintenant tous les fusils et toutes les carabines *****, facilement accessible pour les membres.
La feuille de sortie du 4 juin montre que le gend. Martel, qui est intervenu en tant que renfort avant que des coups de feu ne soient tirés, a pris un fusil. À 20 h, les quatre membres en tenue civile sont revenus au Détachement chercher les ***** fusils ***** avant de se rendre sur les lieux de l'incident. *****.
Un employé a été appelé vers 20 h 30 pour aider à remettre des armes et autre équipement aux membres. Toutes les armes à feu du Détachement ont fini par être déployées ce soir-là. Un membre a indiqué s'être rendu sur les lieux de l'incident avec les ***** dernières cartouches de fusil disponibles.
***** les carabines .308 du Détachement *****. Quand il est devenu clair que le sujet était lourdement armé, un membre en congé a offert d'apporter son fusil de chasse à lunette de tir sur les lieux, ce qu'il a fait, comme l'autorise l'article 4.3.4 du Manuel des opérations de la GRC.
*****.
Capacités du fusil et de la carabine
Il est important de souligner les fonctions et les limites du fusil Remington 870 réglementaire. Le fusil avec chevrotines réglementaires n'est pas destiné à être utilisé comme une arme de précision sur une cible se trouvant à plus de 25 m. Il peut être efficace à une plus grande distance, mais la formation de la GRC porte uniquement sur son utilisation à une distance de 25 m. La dispersion du tir augmente avec la distance, tout comme le risque que des plombs ratent la cible. On enseigne aux membres qu'à 25 m, la dispersion d'une cartouche 00 Buckshot réglementaire de la GRC (faible recul, huit ou neuf plombs) est environ la largeur d'un torse d'un homme. Au-delà de 25 m, moins de plombs atteindront la cible et plus la rateront progressivement. Même si plusieurs plombs de chevrotines au torse peuvent rapidement neutraliser une personne, chaque projectile qui rate la cible peut être fatal pour quelqu'un qui se trouve bien au-delà de la cible.
La chevrotine d'un fusil peut avoir un impact dévastateur sur un agresseur, de multiples plombs de 0,32 po transférant leur énergie sur le corps simultanément, sur une grande surface. C'est comme être touché par plusieurs balles de pistolet en même temps. À l'intérieur de leur portée utile, les fusils offrent un excellent potentiel incapacitant. De plus, compte tenu de la forme de ces plombs, le risque de surpénétration est faible.
Les membres disposaient ***** balles de fusil. Les balles de fusil offrent une plus grande précision, car il s'agit d'un seul projectile plus aérodynamique. Les canons des fusils de la GRC ont une âme lisse pour une utilisation optimale des chevrotines. Sans canon alésé, même les balles rayées ont une trajectoire moins stable, contrairement à la balle de fusil ou à la balle de pistolet essentiellement plus précise. Une balle aurait permis de réaliser un tir à une plus grande distance (peut-être de 50 m à 75 m d'après l'armurier principal de la GRC), mais le danger potentiel d'une balle perdue dans un quartier résidentiel serait beaucoup plus grand que celui d'une chevrotine qui rate sa cible. Chaque plomb de chevrotine a seulement 1/8 de l'énergie d'une balle et perd de l'énergie plus rapidement en prenant de la distance. Le fusil est fondamentalement moins précis qu'une carabine, et sa portée est plus courte.
Bon nombre de membres ne sont pas très à l'aise avec le fusil, et ceux qui sont qualifiés pour l'utiliser *****.
Les carabines de détachement (Winchester .308, modèle 70 avec mécanisme à verrou dans le cas de Codiac) et la carabine de patrouille offrent la capacité de toucher la cible avec précision à des distances beaucoup plus grandes qu'avec un fusil ou un pistolet. La carabine de détachement est munie d'un télescope pour faciliter la visée et l'identification de la cible, tandis que la configuration standard de la carabine de patrouille comprend *****. Cela correspond à la distance maximale ***** à laquelle la carabine de patrouille est censée être utilisée par la GRC.
L'épreuve annuelle de qualification au tir à la carabine de détachement n'est plus obligatoire et très peu des premiers intervenants étaient qualifiés pour l'utiliser.
La carabine de détachement est plus lente à tirer (coup par coup) que la carabine de patrouille et a ***** seulement. Même si la cartouche de la carabine de patrouille a environ la moitié de la puissance de la carabine de détachement, elle offre une cadence de tir plus élevée et comporte un magazine de ***** qui peut être rapidement remplacé lorsqu'il est vide. Le fusil de la GRC peut être chargé d'un maximum de ***** cartouches et offre une cadence de tir qui se situe entre celle de la carabine de patrouille et celle de la carabine de détachement.
La fonctionnalité de la carabine personnelle que le membre a apportée sur les lieux, comme il a été mentionné précédemment, aurait été comparable à celle de la carabine de détachement et on suppose que le membre aurait été à l'aise de l'utiliser.
Carabine de patrouille
Le 4 juin, aucun membre des services généraux du Détachement de Codiac n'avait reçu une formation pour utiliser la carabine de patrouille. En fait, le Détachement avait acheté ***** carabines de patrouille C8, mais, au moment de l'incident, ces carabines se trouvaient à la base des Forces canadiennes de Gagetown, où plusieurs membres du Détachement suivaient la première formation sur la carabine de patrouille de la Division J. Si les carabines avaient été sur place, plusieurs membres ayant reçu une formation des Forces canadiennes avec la version militaire de cette carabine auraient pu les utiliser, conformément à l'article 4.3.4 du Manuel des opérations de la GRC :
Selon une évaluation continue des risques conformément aux principes du MIGI, le membre peut utiliser d'autres armes à feu à sa disposition lorsque les armes à feu distribuées par la GRC ne conviennent pas à la situation, à condition de pouvoir manier en toute sécurité l'arme à feu à utiliser.
Puisque beaucoup de membres interviewés ont indiqué que la carabine de patrouille aurait été utile durant l'incident, il était important d'examiner comment cette carabine aurait pu influencer le cours des événements à plusieurs étapes clés.
Premier contact visuel par le gend. Daigle
Le gend. Daigle est le premier membre à avoir vu le suspect dans le secteur boisé près de la rue Bromfield. Bourque se trouvait à une distance d'environ 70-80 m et se comportait comme s'il était à la chasse. La carabine, avec son dispositif de visée optique, aurait offert au gend. Daigle de meilleures options tactiques. Il aurait pu se placer plus efficacement ***** tout en faisant une tentative d'intervention verbale. Le fusil ou la carabine de détachement aurait aussi constitué une option appropriée dans cette situation.
Premier contact – 15, rue Bromfield
Le gend. Daigle a expliqué qu'un membre muni d'une carabine dans cette situation aurait pu avoir maintenu plus efficacement ***** par rapport au suspect tout en tentant une intervention verbale. Selon la réaction du suspect, le membre assurant ***** d'un côté ou de l'autre côté du 15, rue Bromfield aurait pu recourir à la force mortelle.
Approche du gend. Dave Ross
Lorsque le gend. Ross a aperçu Bourque, il a manifestement cru qu'il était préférable de s'en rapprocher le plus vite possible et de tenter d'ouvrir le feu contre lui. Le gend. Ross a dégainé son pistolet réglementaire et a tiré deux coups à travers son pare-brise en direction de Bourque. Il recourait à la force mortelle au moment où Bourque tirait sur lui. Il est aussi possible qu'il ait tenté d'utiliser son véhicule pour arrêter Bourque. Si un membre se trouvant à l'angle de la rue Bromfield et de l'avenue Mailhot avait vu Bourque tirant sur le gend. Ross, il aurait peut-être pu faire feu dans sa direction avec une carabine et ce, même si la distance était de 100 m au-delà de la portée efficace de la carabine, selon ce qui est enseigné aux membres. S'il avait été armé d'une carabine, le gend. Ross aurait peut-être opté de rester à une distance de portée efficace et de positionner son véhicule de façon tactique pour tirer sur Bourque. La distance de 250 m aurait été à l'intérieur de la portée efficace de la carabine .308, si un membre en avait apporté une sur les lieux.
Contact visuel par le gend. Eric White
Le gend. White aurait pu lui aussi avoir eu la possibilité de recourir à la force mortelle lorsqu'il a aperçu le suspect à environ 90 m sur l'avenue Mailhot. (Nota : Dans sa déclaration, le gend. White a indiqué qu'il croyait que Bourque se trouvait à 50 pieds de lui, mais la distance mesurée était beaucoup plus grande en réalité.) Il s'est mis à l'abri derrière le véhicule des Services cynophiles, mais a indiqué qu'il aurait peut-être été capable d'abattre le sujet avec une carabine. D'après son évaluation des risques, il était trop loin du tireur pour obtenir une image de visée appropriée au pistolet sans être atteint par une balle.
Contact visuel par le gend. Éric Dubois
Le gend. Dubois a indiqué qu'il aurait peut-être été capable de tirer sur Bourque s'il avait eu une carabine. Alors qu'il se mettait à l'abri derrière son véhicule, le gend. Dubois a vu Bourque traverser la promenade Hildegard en courant. La distance aurait été de 100‑150 m et Bourque aurait traversé une zone ouverte large de 10‑15 m selon la perspective du gend. Dubois. Il aurait été possible de l'atteindre avec une carabine, mais probablement pas avec un pistolet.
Coups tirés par le gend. Doug Larche
Le gend. Larche avait son fusil dans les mains quand Bourque a tiré sur lui et l'a blessé. On ignore actuellement si les blessures qui ont apparemment empêché le gend. Larche d'utiliser le fusil l'aurait aussi empêché d'utiliser la carabine. Comme la carabine a un recul plus faible, est semi-automatique et n'a pas à être pompée manuellement à chaque coup, il aurait peut-être été plus facile pour lui de l'utiliser malgré une blessure au haut du corps. Le gend. Larche a été capable de dégainer son pistolet et de faire feu à répétition.
Conclusion sur la carabine de patrouille
Les carabines de patrouille auraient permis plus efficacement de recourir à la force mortelle et auraient probablement eu une incidence sur l'évaluation des risques par les membres et sur leur approche tactique et leur niveau de confiance. Cette arme à feu a été approuvée précisément pour intervenir dans ce genre de situation.
Gilet pare-balles rigide
Même si, selon l'emplacement des blessures des membres, le gilet pare-balles rigide (GPBR) n'aurait pas pu sauver de vies ni réduire la gravité des blessures subies durant l'incident, son utilisation n'en demeure pas moins une question importante. Le 4 juin, le Détachement de Codiac avait ***** GPBR dans tous les véhicules, sauf *****, ce qui constituait un problème *****. L'équipe d'examen a appris durant les entrevues qu'une membre avait choisi de ne pas porter le GPBR au profit de son collègue, qui avait des enfants, afin qu'il puisse bénéficier de cette protection. Les membres ne devraient jamais avoir à choisir qui portera le GPBR.
Au total, ***** GPBR étaient disponibles à Codiac, ***** dans les véhicules identifiés et ***** remis individuellement aux membres de l'équipe des opérations tactiques stratégiques (anciennement le groupe tactique) de Codiac. Tous les véhicules de patrouille de Codiac ***** (services généraux et circulation), sauf *****, avaient ***** GPBR *****. Le bureau du district du Sud-Est, qui a envoyé des membres en renfort, avait un total de ***** GPBR pour ***** véhicules de patrouille. Certains se trouvaient dans une pièce d'équipement et d'autres dans les véhicules de patrouille.
Aucun des membres en uniforme qui sont intervenus au début de l'incident n'avait revêtu de GPBR avant de se rendre sur les lieux. ***** et il n'y en a pas en réserve au Détachement. Par conséquent, les quatre membres en civil qui sont intervenus n'avaient pas de GPBR. La gend. Goguen (district du Sud-Est) a indiqué qu'elle aurait mis son GPBR si elle avait été mieux informée de la situation. Le gend. Robertson (district du Sud-Est), qui était près des lieux lorsqu'il y a été dépêché, n'a pas eu le temps de retourner au bureau du district du Sud-Est chercher un GPBR.
La politique de la GRC sur le GPBR, à l'alinéa 4.1.1 du Manuel des opérations, stipule qu'un membre doit « appliquer les principes du Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents (MIGI) dans le cadre de l'évaluation continue des risques et de la décision de porter le gilet pare-balles rigide (GPBR) ». Donc, au bout du compte, la décision revient au membre. La politique sur le GPBR fournit des exemples d'incidents où le port du GPBR est recommandé, ce qui fait que la décision revient au membre d'après son évaluation des risques. Les exemples comprennent notamment les interventions liées à des armes à feu, les contrôles de véhicules à risque élevé, les fouilles et les perquisitions, les barrages routiers et les situations d'endiguement.
Après la décision initiale de ne pas porter de GPBR, un signalement de coups de feu tirés aurait dû indiquer aux membres que le niveau de risque était considérablement plus élevé que ce qu'ils croyaient au départ. La plupart des membres qui sont intervenus en premier savaient que le risque était plus élevé, mais savaient aussi que, même si cela était faisable, *****. Ils ont choisi de continuer d'essayer de neutraliser le suspect, qui était armé et dangereux et qui se trouvait dans un quartier fréquenté. Même si cette décision était appropriée et courageuse, elle illustre l'importance de déterminer rapidement s'il est nécessaire de porter le GPBR. Une fois les coups de feu tirés, il était tout simplement trop tard pour se procurer un GPBR. Le fait que les superviseurs n'ont pas enjoint les membres intervenants à porter le GPBR sera traité dans la section sur la supervision.
Malgré sa mise en œuvre en 2013, certains membres ne connaissaient pas bien le relativement nouveau GPBR et sa nouvelle enveloppe. Il est important que les membres connaissent les capacités et les limites du GPBR et le portent de façon appropriée afin de maximiser ses propriétés balistiques. L'équipe d'examen a été informée que certains GPBR se trouvaient encore dans leur emballage original et n'avaient jamais été essayés. Dans au moins un des cas, le GPBR était porté de façon inappropriée et a causé la perte du chargeur de rechange du pistolet du membre.
Uniforme
Les bandes jaunes sur les pantalons d'uniforme peuvent aider à établir la présence du policier, mais peuvent aussi représenter un désavantage tactique dans certains contextes. De nombreux résidants qui ont été témoins des événements dans la zone boisée où le premier contact a été établi avec le sujet ont signalé la grande visibilité des bandes jaunes en forêt. Bourque n'en a pas fait état dans sa déclaration, et on ne lui a pas posé de questions à ce sujet, mais cela pourrait avoir créé un désavantage tactique pour les membres qui s'approchaient du sujet dans la zone boisée.
La question du contraste entre la couleur de la chemise de l'uniforme et celle de l'enveloppe externe du GPBS a été soulevée par l'équipe d'examen. Cette enveloppe est bleu foncé et la chemise de l'uniforme, gris clair. Ce contraste peut compromettre la sécurité des membres, car le gilet est clairement visible pour un agresseur potentiel, ce qui pourrait exposer les parties du corps qui ne sont pas protégées. La solution serait de remplacer la chemise de l'uniforme par une chemise de couleur plus foncée pour éliminer le contraste.
Niveau de confiance général des membres
Même si le message transmis durant l'incident selon lequel la puissance de feu des membres de la GRC était inférieure (« we're outgunned ») était essentiellement vrai, cela ne signifie pas que les membres étaient sans défense. En discutant avec les membres et en examinant divers documents de formation, *****. Auparavant, la formation au tir à la Division Dépôt comprenait un volet de tir avec le revolver réglementaire à 100 m afin de montrer l'efficacité et les limites de cette arme à feu. En l'absence de carabine, le pistolet ou le fusil demeurent des options efficaces au-delà de 25 m, si les techniques de tir, les munitions et les tactiques appropriées sont utilisées. L'épreuve annuelle de qualification au tir de la GRC et les commentaires faits dans le cours en ligne sur la carabine concernant les limites du fusil et du pistolet *****. Cette question sera examinée de manière plus approfondie dans la section sur la formation du présent rapport.
Recommandations
5.1 Il faudrait que la politique soit modifiée pour stipuler que si un membre des services généraux est qualifié pour utiliser une arme à canon long, il doit s'assurer lorsqu'il est de service qu'une telle arme, s'il y en a une de disponible, se trouve dans le véhicule de police.
5.2 Il faut que les armes à feu soient rangées avec suffisamment de munitions.
5.3 Il est recommandé que tous les membres de la GRC assistent à une séance d'information et à une démonstration sur l'utilisation appropriée du gilet pare-balles rigide (GPBR).
5.4 Que les fusils soient dotés de bretelle pour en faciliter l'utilisation et en améliorer la sécurité.
5.5 Que les procédures d'entretien et d'entreposage de toutes les armes et munitions du détachement fassent l'objet d'un examen obligatoire de l'assurance de la qualité au sein d'un service.
5.6 Que durant les incidents à stress ou à risque élevé, un superviseur donne des instructions claires concernant l'utilisation de l'équipement.
Section 6 : Formation des membres et compétences en sécurité du policier
Questions du commissaire : Y a-t-il des lacunes dans la formation offerte actuellement aux membres? Y a-t-il de nouvelles exigences en matière de formation qu'il serait raisonnable d'imposer à la GRC à la suite de cet incident?
Afin d'étudier l'approche tactique utilisée par les membres lors de l'incident, il est nécessaire de comprendre la formation offerte par la GRC à la Division Dépôt et en cours de service.
L'équipe d'examen a envoyé un membre à la Division Dépôt rencontrer les employés clés et observer la formation qui y est donnée. On a appris que la formation de base à la Division Dépôt ne présente pas aux cadets des scénarios comportant un niveau de risque aussi élevé que celui de l'incident du 4 juin 2014.
À la Division Dépôt, les cadets apprennent à se fier à leurs observations des signes de menace et à utiliser les ***** étapes de l'évaluation des risques et les ***** principes tactiques pour gérer les incidents. Ils apprennent également quels sont les ***** erreurs tactiques et les quatre C en situation de stress élevé :
Couverture – observez ce qui vous entoure (autres menaces, armes, suspects, etc.);
Communication (avec la station de transmissions opérationnelles, le suspect, les renforts, la radio, etc.)
Condition (la vôtre, celle du suspect pour les soins à assurer après l'intervention, de votre équipement, de votre arme, de votre aérosol capsique, de votre bâton, etc.);
Combat – respiration (respirer profondément pendant quatre secondes, retenir son souffle pendant une seconde et expirer pendant quatre secondes).
La perception des risques varie d'un membre à l'autre et peut influencer la prise de décisions critiques en ce qui concerne, par exemple, « se déplacer », « où se déplacer » et « quelles mesures précises prendre dans une situation donnée ».
Les cadets apprennent à utiliser leur pistolet réglementaire, le fusil et les autres moyens d'intervention qu'ils portent sur leur ceinturon à l'aide d'exposés, d'exercices de manipulation sécuritaire et pratique, puis de scénarios de pleine utilisation. Durant la formation tactique, ils doivent démontrer qu'ils sont capables de faire une évaluation des risques appropriée et d'intervenir correctement.
En général, la formation par scénarios commence par la détermination du bon moyen à utiliser. Par exemple, dans la salle d'entraînement, sur des matelas, un cadet peut s'attendre à ce que le scénario nécessite une intervention physique. Une fois que la formation de base est terminée, les scénarios sont enrichis pour inclure plus de prises de décision, notamment concernant l'intégration d'autres options de recours à la force et d'intervention dans leur évaluation des risques. La dernière étape de cette formation par scénarios se déroule dans un détachement fictif.
Une fois qu'un membre commence à travailler sur le terrain, la formation sur le recours à la force peut devenir segmentée. La GRC exige une épreuve annuelle de qualification de tir au pistolet et au fusil et une recertification pour les autres options d'intervention aux trois ans. Après la Division Dépôt, la première formation tactique additionnelle que suivent les membres de première ligne est la formation sur le déploiement rapide pour action immédiate (DRAI) de la GRC. Durant la majeure partie de cette formation, tout comme dans les scénarios à la Division Dépôt, les membres savent quelle option d'intervention ils sont censés utiliser selon la recertification à laquelle ils participent. De plus, au moment des épreuves de qualification de tir, les membres revoient la sécurité des armes à feu et les principes de base du tir, mais non les tactiques.
Les épreuves annuelles de tir de la GRC (pistolet et fusil) sont effectuées en position debout et très peu de mouvements sont exécutés après le tir. Le pas de côté effectué après avoir tiré sur la cible a été ajouté au cours seulement à la suite de recommandations découlant d'un autre rapport sur le décès de membres de la GRC. Il s'agit d'un ajout à peine suffisant qui ne répond pas aux besoins des membres s'ils doivent se déplacer. Le système de qualification de tir est fondé sur l'obtention de points, le membre tirant sur une grosse cible (silhouette) stationnaire dans un temps limite. Il vise à s'assurer que les candidats et la GRC satisfont à une norme minimale d'efficacité et de diligence raisonnable. En fait, ce n'est pas une formation, mais plutôt un test pour déterminer si le candidat peut atteindre la cible en un laps de temps précis. Pour avoir confiance en ses capacités à atteindre la cible à grande distance, après un effort physique et en se déplaçant, il faut une formation poussée et un entraînement continu. Durant la fusillade à Moncton, les membres ont agi et réagi en fonction de plusieurs facteurs, notamment leur formation tactique (Division Dépôt et DRAI).
La réaction initiale à la plainte concernant un sujet muni de deux armes d'épaule a révélé une divergence entre la façon dont les appels relatifs aux armes sont perçus par les membres et ce qui est énoncé dans la politique. Par exemple, ***** est conforme à la politique de la GRC et au MIGI, ces appels présentant un risque élevé. Cependant, des membres qui ont été dépêchés ont déclaré « recevoir constamment ce genre d'appels ». Les appels concernant les armes à feu sont fréquents à Moncton et impliquent souvent des individus avec des armes à balles de peinture ou à air comprimé ou des chasseurs. Dans la majorité des cas, la police détermine qu'il n'y a pas de menace réelle pour la sécurité publique. Même si la formation enseigne aux membres qu'il s'agit d'appel à risque élevé, l'expérience entraîne des préjugés cognitifs qui amènent les membres à minimiser les risques. Le fait qu'il n'y avait pas suffisamment de fusils et que les membres ne portaient pas le GPBR au moment de l'intervention initiale est un signe que l'expérience avait réduit l'efficacité de la formation sur l'évaluation des risques.
6.1 Il est recommandé que les formateurs et les superviseurs tiennent compte de la façon dont les préjugés cognitifs réduisent l'efficacité de la formation et qu'ils examinent comment atténuer l'effet de ces processus de pensée naturels et universels.
De nombreux membres qui sont intervenus considéraient que le pistolet était une option d'intervention insuffisante durant cet incident. La Section de la formation tactique de la GRC a indiqué que la portée efficace du pistolet et des munitions est de plus de 100 m pour un tireur chevronné. Dans presque tous les affrontements entre les membres et Justin Bourque, le pistolet ne constituait pas la meilleure option, mais c'était potentiellement une option viable.
Selon la vidéosurveillance de la rue Bromfield, des membres se comportaient comme s'ils n'étaient pas tactiquement au courant de la gravité de la situation, alors que des coups de feu venaient juste d'être tirés non loin d'où ils se trouvaient. Ils n'avaient pas tous dégainé leur pistolet et l'un d'eux transportait son fusil sur son épaule plutôt qu'en position « prêt à 45 degrés ». La méthode utilisée pour l'épreuve de qualification de tir au pistolet et au fusil pourrait contribuer à la perception selon laquelle ces armes sont efficaces sur une courte distance et au fait que de nombreux membres ne se pensent pas suffisamment compétents pour atteindre une cible durant un échange de coups de feu dynamique ou à grande distance. De plus, durant une intervention effectuée après que le tireur a été aperçu plus tard cette nuit-là, un coup de fusil a été tiré accidentellement. Le membre courrait le canon pointé vers le bas alors que le mécanisme de sécurité n'était pas engagé. Un coup de feu est parti quand le membre a heurté un véhicule de police. Comme il a déjà été mentionné, l'épreuve annuelle ne nécessite pas que les membres courent, rétablissent les cibles, assurent la transition et pensent tout en tirant. Cela pourrait avoir contribué à ces exemples d'armes à feu manipulées de façon non tactique.
6.2 Il est recommandé que les épreuves de qualification au tir de la GRC comprennent des volets effort physique et repositionnement et communication tactiques, et qu'elles s'accompagnent d'une formation pratique dynamique par scénarios, d'une formation sur l'évaluation des risques évolutive et de rappels sur les capacités des armes à feu, même au-delà des distances de qualification.
6.3 Il est recommandé d'offrir des documents de formation traitant de la différence entre couverture et dissimulation et présentant des exemples des capacités de pénétration des balles des diverses armes à feu.
Après le début de la fusillade, plusieurs membres sont intervenus de façon tactique conformément à la formation qu'ils avaient reçue sur le DRAI : ***** travailler comme un groupe indépendant pour atteindre ce but.
*****.
Pour cette raison, l'efficacité tactique des membres à poursuivre le tireur dans un quartier urbain aurait pu s'en trouver diminuée.
6.4 Il est recommandé que la formation sur le DRAI soit adaptée de façon à inclure divers environnements ***** ainsi que les éléments de prise de décision, planification, communication, gestion des biens et supervision pour s'assurer que les membres évaluent constamment les risques, et que la formation du personnel des stations de transmissions opérationnelles (STO) sur la coordination et l'intervention en cas d'incidents à risque élevé soit effectuée en même temps que la formation sur le DRAI pour renforcer le réalisme du scénario.
Même si le DRAI est la norme actuelle, lorsque la formation tactique de la GRC est divisée en divers modules, elle compartimente de façon artificielle les interventions aux situations et complique les calendriers de recertification. La formation des membres de la GRC devrait se faire à l'aide de scénarios réalistes pour qu'il y ait un élément émotif et psychologique à l'exercice. Ainsi, la formation déclenche et crée des liens entre les divers aspects. Par exemple, si les membres doivent transmettre de l'information par radio à un superviseur après un scénario particulièrement stressant et difficile physiquement, ils comprendront mieux l'importance d'utiliser un langage clair. Une formation sur la reprise des manœuvres contre un suspect, le rétablissement d'un périmètre compromis, le positionnement tactique approprié et le déplacement après un tir aiderait les membres à se préparer de manière à gérer efficacement un incident comme celui‑ci.
Il faut noter que la Division J utilise actuellement un système de formation tactique en bloc. Durant la formation en bloc, les participants se qualifient ou se requalifient pour diverses options de recours à la force, ce qui comprend une formation sur le MIGI, sur les armes à impulsion et sur le DRAI et qui comprendra prochainement une formation sur les carabines. De plus, la Section de la formation de la Division J a commencé à combiner les exposés et les scénarios pratiques sur ces options afin d'optimiser le temps passé avec chaque membre et d'augmenter les occasions de prise de décision. Ce type de formation devrait être le premier pas vers une formation intégrée de préparation opérationnelle. Elle devrait comprendre des options créées pour les détachements et les districts afin d'améliorer l'apprentissage en dehors des exigences annuelles. L'apprentissage en ligne et les exercices sur table où les participants sont confrontés à des scénarios réalistes à l'aide d'éléments vidéo et audio devraient être examinés aux fins d'utilisation lorsque les participants sont dans leur service d'attache. Les sections de formation de la GRC ont déjà tiré des leçons de cet incident et modifié la formation tactique offerte. La version 2014 de la formation en bloc de la Division J comprendra une séance sur le déplacement tactique à l'extérieur en milieu urbain. La Section de la formation tactique à Ottawa a aussi proposé de traiter de la prise de décision au début des scénarios de DRAI et d'intégrer une section de rappel tactique aux exposés sur les ***** principes tactiques, les ***** erreurs tactiques et les quatre C en situation de stress élevé.
Un des facteurs préoccupants à examiner s'avère l'incapacité d'assurer la participation de tous les membres actifs à l'épreuve annuelle de qualification au tir. Certains des 24 membres de la GRC qui sont intervenus initialement lors de l'incident n'étaient pas qualifiés pour l'arme à feu qu'ils utilisaient. *****.
Le paragraphe 4.2.5.3 du Manuel des opérations stipule qu'un chef peut « déterminer judicieusement si l'on devrait limiter les fonctions du membre qui n'a pas satisfait à la norme minimale jusqu'à ce qu'il suive une séance de recyclage ».
Cette politique permet techniquement à un chef de service de décider si un membre peut demeurer en service actif s'il ne s'est pas requalifié. Les réalités de la GRC sont telles que la géographie ou d'autres circonstances peuvent avoir une incidence sur la capacité des membres à recevoir de la formation en temps opportun. Cependant, il faudrait évaluer les risques de continuer de permettre aux membres non qualifiés de rester en service actif. Même s'il est nécessaire de modifier la norme de façon à remplacer l'épreuve de « qualification » par une formation, la GRC doit faire tout en son pouvoir pour respecter la politique actuelle. Le nombre de membres qui étaient autorisés à porter une arme à feu malgré une qualification expirée est inacceptable.
Section 7 : Communications opérationnelles
Question du commissaire : Qu'en était-il de la communication entre membres, superviseurs, Groupe tactique d'intervention (GTI) et autres équipes d'intervention coordonnée? Qu'en était-il de l'opérabilité radio?
Les communications radio opérationnelles, y compris les transmissions voix-données, ont joué un rôle crucial dans le déroulement et le dénouement de l'incident. Il importe d'analyser les capacités opérationnelles et techniques mobilisées pour assurer la liaison entre les membres, les superviseurs, le GTI et d'autres équipes d'intervention coordonnée puisqu'elles ont permis de renseigner les membres sur la situation et de leur transmettre des directives. À défaut de communication directe, la communication radio, devenue le mécanisme de contrôle, a constitué un outil fondamental de coordination des éléments de l'intervention, à savoir la sécurité, les tactiques, la supervision et la logistique. De manière générale, la technologie de communication radio, de répartition et de localisation est gérée par la station de transmissions opérationnelles (STO), qui est responsable :
de la détermination de la situation des policiers de service et sur appel;
de la réception et de la répartition des plaintes;
du soutien opérationnel des policiers de service;
de la liaison entre les policiers, les services de police et la population.
D'autres systèmes radio indépendants non gérés par la STO ont été utilisés par des équipes spécialisées, comme le GTI.
Bien que le réseau de transmissions radio-données en place à Moncton présente des difficultés (expliquées plus loin dans la présente section), les problèmes résidaient surtout dans la discipline radio et l'absence de messages clairs et concis de la part des membres. Cette question est abordée en détail dans la partie sur l'analyse de la supervision, où sont formulées des constatations ainsi que des recommandations.
STO et systèmes radio
La Division J gère deux STO distinctes. La première STO se trouve dans le quartier général de la division à Fredericton et dessert tous les groupes et détachements de la GRC, excepté le Détachement de Codiac. Celui-ci est soutenu exclusivement par la seconde STO qui est un service municipal répondant aux besoins de la GRC de Codiac et du service d'incendie des collectivités de Riverview, de Dieppe et de Moncton. La STO de Codiac compte deux téléphonistes du 911, un répartiteur du service d'incendie et son répartiteur adjoint, ainsi qu'un répartiteur de la GRC et son répartiteur adjoint. Au total, six employés sont en service pendant chaque quart. Le répartiteur principal de la GRC communique avec les membres de la GRC au moyen de l'unique canal radio en direct contrôlé. Le répartiteur adjoint assiste le répartiteur principal lorsque ce dernier est débordé. Les répartiteurs ne parlent pas directement aux appelants. Tous les appels entrant à la STO sont à commande vocale et non des demandes de communication (RTT). Pour les RTT, il suffit que le membre active le microphone pour être identifié automatiquement; la STO l'appelle ensuite pour savoir ce dont il a besoin. L'identification numérique automatique (ANI) permet de connaître immédiatement l'identité du membre qui a activé le microphone. Il est à noter que le système radio de Codiac est dépourvu de cette fonctionnalité, ce qui rend impossible pour le répartiteur de savoir qui appelle, sauf si le membre s'identifie ou que le répartiteur reconnaisse sa voix. Sans fonction ANI, il est extrêmement difficile d'identifier un membre qui pourrait avoir besoin d'assistance. Durant la fusillade, des membres qui ont à certains moments utilisé le microphone à quelques occasions, mais n'ont pas été compris. Avec la fonction ANI, la STO aurait au moins pu savoir qui essayait d'établir la communication.
7.1 Il est recommandé que la STO de Codiac envisage l'adoption d'un système d'identification numérique automatique (ANI) afin de renforcer la sécurité des agents.
Évaluation technique du système radio du Détachement de Codiac
Il ressort de l'évaluation technique de la couverture radio que l'intensité et l'étalement du signal dans la ville de Codiac sont très bons. La station de répéteurs radio fournit une excellente couverture au centre de la région du détachement. À cet égard, il n'y a pas de problèmes à signaler pour le centre de Moncton, *****. La zone géographique où l'incident est survenu bénéficie d'une excellente couverture tant pour les radios mobiles que pour les radios portatives.
À l'extérieur de la ville de Moncton, *****, il existe des problèmes de réception qui, en dépit de leur absence dans le cas présent, auraient pu se manifester si l'incident s'était produit ailleurs dans la région du détachement.
7.2 Il est recommandé d'examiner la couverture radio du Détachement de Codiac à l'extérieur du centre de Moncton afin de corriger les lacunes à ce niveau.
Le réseau en place à Codiac permet le « chevauchement » des communications. Cette propriété a l'avantage de favoriser les transmissions urgentes et ainsi d'assurer la sécurité des agents. À l'inverse, si plusieurs membres utilisent le réseau simultanément, elle risque de donner lieu à des communications embrouillées et indéchiffrables. Les deux cas de figure se sont concrétisés le 4 juin en soirée. L'équipe d'examen a écouté des transmissions qui n'auraient pas été possibles si le système ne permettait qu'à un seul membre de parler à la fois. Cela dit, des transmissions importantes étaient inaudibles, car plusieurs membres essayaient d'utiliser la radio en même temps. Par conséquent, de précieux renseignements ont été perdus. Autres exemples : un membre a pu interrompre des transmissions en faisant la déclaration « clear the air » (libérez les ondes) lorsqu'il a dû prendre la parole à un moment critique. Par contre, quand quelqu'un a utilisé une radio portative UHF pendant qu'une radio de véhicule de police était utilisée, le système n'avait aucun moyen de prioriser les signaux. Alors, la STO a reçu des messages embrouillés. Cette situation s'est souvent produite au cours de l'incident.
Les communications radio des services généraux du Détachement de Codiac ne sont pas chiffrées. Elles sont transmises en mode analogique en UHF et en VHF seulement, et c'est le cas dans l'ensemble de la Division J. Certains groupes spécialisés peuvent, dans une certaine mesure, utiliser des radios chiffrées qui reposent sur une infrastructure différente. Principalement utilisées par les groupes en civil pour la surveillance, ces radios ne sont pas disponibles aux fins de services généraux ni contrôlées par la STO.
Les membres et la STO avaient des inquiétudes quant aux transmissions non chiffrées. Ils ont estimé qu'ils ne pouvaient pas relayer par radio certains renseignements importants de crainte que l'auteur de la fusillade ou les « chasseurs de nouvelles » ne les interceptent. La sécurité des intervenants et celle du public s'en est trouvée en danger. De nos jours, davantage de criminels utilisent la technologie pour surveiller les communications de la police, *****. Le manque de langage clair et simple, dont l'utilisation aurait contribué grandement à l'évaluation du risque, est directement attribuable à la volonté des membres et de la STO d'empêcher le public et l'auteur d'intercepter des renseignements critiques.
Actuellement, seules trois divisions contractantes possèdent des radios chiffrées à la disposition des patrouilleurs en uniforme. Outre les problèmes susmentionnés, l'absence de chiffrement soulève des préoccupations au sujet de la confidentialité.
7.3 Il est recommandé que la GRC considère la mise en place de systèmes radio chiffrés afin d'assurer l'efficacité opérationnelle, la sécurité des agents et la protection de la confidentialité.
Le Détachement de Codiac possède deux pylônes et deux types de fréquences radio, mais seul un a été utilisé. Cette approche s'est révélée problématique en raison du volume de communications et du nombre d'utilisateurs qui cherchaient à obtenir du temps d'antenne. Vingt-quatre membres participant à l'intervention initiale, le superviseur au détachement et les répartiteurs de la STO utilisant tous un seul canal, le système a vite fait d'être surchargé. Avoir réparti les utilisateurs sur différents canaux en fonction des rôles (p. ex. les membres assurant la sécurité du périmètre sur un canal et les intervenants, sur un autre) aurait permis une gestion plus efficace des communications radio et aux répartiteurs, un meilleur contrôle du réseau. Certains emplacements géographiques bénéficient d'une couverture accrue grâce à la station de répéteurs secondaire. Il serait possible de créer un lien, à partir de cette station, pour former un réseau homogène contrôlé par la STO au moyen d'une seule console radio en utilisant les deux répéteurs. La couverture radio s'en trouverait améliorée.
7.4 Il est recommandé de remettre définitivement les deux stations de répéteurs radio de Moncton en état afin d'assurer aux membres une couverture radio optimale tout en maintenant la communication avec la STO.
Bien des divisions possèdent un système de communication composé de canaux principaux, pour les urgences, et de canaux secondaires, pour les transmissions non urgentes (connexion au système, communications entre membres, etc.). Certaines provinces disposent de bandes d'« aide mutuelle » que d'autres organismes d'intervention d'urgence (services d'urgences de santé) et services de police peuvent utiliser pour communiquer au moyen d'un canal radio commun. Ce réseau n'existe pas à la Division J ni dans le Détachement de Codiac. Pourtant, la ville de Moncton a accueilli de nombreux événements d'envergure, comme des concerts ayant attiré des milliers de spectateurs. C'est le genre de situations où les problèmes ne sont pas exclus et où il pourrait être nécessaire de déployer rapidement un grand nombre d'intervenants.
7.5 Il est recommandé d'examiner minutieusement les canaux principaux et secondaires afin de conférer aux répartiteurs un meilleur contrôle du temps d'antenne sur le réseau.
Les membres ne disposent pas d'un guide de l'utilisateur décrivant l'emplacement des répéteurs radio et la configuration des canaux. Par conséquent, des groupes venus de l'extérieur de Codiac n'ont pas su quels canaux utiliser ni quel était le territoire de couverture de chacun.
7.6 Il est recommandé d'élaborer une politique qui prescrit la création d'un guide de l'utilisateur radio à l'intention des membres. Ce guide doit contenir une carte de la province indiquant les stations de répéteurs et les détachements, ainsi qu'une liste des canaux radio.
Les radios mobiles VHF du Détachement de Codiac possèdent une fonction ***** qui permet aux membres d'écouter plusieurs canaux simultanément. *****, la radio parcourt les canaux préprogrammés à la recherche d'activité et s'arrête au canal actif. Les radios mobiles sont souvent programmées ***** de stations VHF proches, ce qui permet aux utilisateurs d'apprendre, à la radio, ce qui se passe dans une zone de patrouille avoisinante. Si la radio est en mode ***** et que l'utilisateur active le microphone, la radio revient automatiquement à un canal d'origine préétabli. Cela pourrait causer de la confusion si l'utilisateur pense communiquer sur un canal alors qu'il s'agit d'un tout autre canal possiblement hors de portée. Les membres ne reçoivent pas de trousse de formation officielle ni de guide de l'utilisateur sur le fonctionnement de base du système radio.
Problèmes d'interopérabilité
*****
« Le manque d'interopérabilité technologique continue de représenter un obstacle au rapprochement des relations de travail entre les STO de Fredericton et de Codiac. La gestion et la supervision de ces dernières se sont révélées difficiles en raison des différents modèles utilisés par chacune d'elles au fil des ans. »
L'interopérabilité des deux STO doit être établie de sorte à leur permettre d'avoir mutuellement connaissance de la situation dans l'autre territoire. Cela s'applique tant à la communication radio qu'aux données sur le positionnement des véhicules de police.
La gend. Goguen, intervenant d'un district voisin à bord de son véhicule, a été dirigée, à son insu, vers la rue dans laquelle se trouvait le tireur. Elle avait reçu un appel sur le canal de Fredericton lui demandant de se rendre sur place. *****. Bien d'autres problèmes se sont manifestés en raison du manque de surveillance par la STO de Codiac des véhicules provenant de l'extérieur.
En 2007-2008, il y a eu des discussions au sujet d'un système de radiocommunication unique que tous les intervenants en cas d'urgence des provinces maritimes pourraient utiliser. Des études en ce sens ont été effectuées, et l'idée a reçu l'aval de plusieurs niveaux. Mais, des difficultés financières ont empêché la mise en œuvre du projet. Il était donc impossible pour les intervenants venus des divisions voisines d'établir une communication radio à moins qu'ils aient pu se procurer une radio portative de la Division J ou se trouver un partenaire de cette division. Ces ressources n'ayant pas été accessibles dans l'immédiat, ces intervenants auraient pu, sans le savoir, se diriger vers la « zone risquée ». *****.
Le système CIIDS est conçu pour assurer la sécurité des policiers grâce à la détermination de la situation, à la cartographie, *****, à l'intégration avec le système du CIPC, le SIRP et le PIP, aux indicateurs de durée et à la messagerie interne. Le système de Codiac se limite aux propres véhicules du détachement *****. De ce fait, la STO de Codiac n'a pas pu suivre les membres arrivés des divisions H et L, ce qui a exacerbé une situation déjà dangereuse. Ces membres ont dû se fier à la STO de leur division d'attache, qui n'avait pas connaissance de la situation et ne pouvait pas communiquer avec la STO de Codiac en raison de la surcharge des réseaux téléphonique et radio. Les STO des autres divisions de la région des Maritimes ont eu du mal à joindre leurs membres pour vérifier la situation toutes les ***** sur des cellulaires presque déchargés et à capacité intermittente à cause du volume de trafic sur les réseaux cellulaires surchargés.
La prochaine version 9 du CIIDS permettra de créer un service régional par l'entremise duquel les divisions H, J et L continueront de mener leurs activités habituelles et pourront, en cas d'incident, dépêcher facilement des ressources (équipes de patrouille) dans les secteurs de responsabilité de la STO. Des groupes transdivisionnaires pourront être affectés à différentes STO, et les membres auront accès à des renseignements cruciaux sur la sécurité des agents. Les STO pourront consulter des renseignements au dossier et les communiquer aux groupes intervenants lors d'incidents d'envergure. Les membres pourront faire le suivi de la situation auprès de la STO compétente.
7.7 Il est recommandé de développer un système radio et de transmission de données permettant la communication entre les membres de la GRC des divisions des Maritimes qui doivent travailler à l'extérieur de leur territoire de compétence.
Cartographie du système CIIDS et connaissance de la situation
Le système de visualisation cartographique inadéquat du système CIIDS, qu'utilisent la STO et le sous-officier des opérations, a entravé considérablement l'affectation des ressources. Il existe des systèmes Web gratuits qui fournissent de meilleures images satellitaires que le CIIDS. La STO et les superviseurs ne connaissant pas les caractéristiques du terrain, ils n'ont pas pu élaborer un plan et l'exécuter de façon optimale. La photo ci-dessous montre une carte des lieux de crime produite par le système CIIDS ainsi qu'une carte produite par un service de cartographie Web sécurisé du CNO, accessible aux centres divisionnaires des opérations d'urgence (CDOU) sur Infoweb. Le service de cartographie Web aurait conféré à la STO et au sous-officier des opérations un avantage de taille durant l'intervention.
La STO, le sous-officier des opérations, le commandant des interventions critiques ainsi que le CDOU auraient dû pouvoir échanger des données de position, notamment sur le périmètre, et autre information pertinente. Le groupe responsable, la Section du renseignement géospatial, compte un membre à Ottawa qui assume des fonctions opérationnelles et stratégiques. Ne pas avoir les capacités suffisantes ou le mandat d'affecter cette ressource au service de l'ensemble de la GRC crée une lacune. *****, mais nécessitent un investissement en ressources et l'interactivité technique avec d'autres systèmes de la GRC.
7.8 Il est recommandé d'équiper le système CIIDS d'un système de cartographie haute résolution, comme celui du service de cartographie Web du CNO, ayant la capacité de communiquer des renseignements aussi cruciaux que les données de périmètre et de position.
*****
Téléphonistes et répartiteurs de la STO de Codiac
*****, une employée municipale, était la principale répartitrice et coordonnatrice du périmètre initial. L'opération s'est déroulée de manière efficace. Il va sans dire que le flux d'information reçue à la STO durant l'incident était tel que sa gestion dépassait ce à quoi on s'attendrait d'une seule personne.
Un sous-officier des opérations travaillant au Détachement de Codiac s'est occupé d'appeler les membres et de prendre des dispositions pour assurer le service. Cela dit, ***** était la seule personne à pouvoir communiquer directement avec les membres de première ligne et avait la meilleure connaissance des nouveaux renseignements entrants. Elle assurait également la coordination avec le service de cartographie du système CIIDS. Aucun superviseur n'était de service à la STO, et aucun membre régulier ne s'y trouvait pour prêter assistance. Les systèmes téléphoniques surchargés, seuls les appels d'urgence 911 étaient pris.
7.10 Il est recommandé de doter les STO d'un sous-officier expérimenté qui coordonne les opérations en cas d'incidents critiques et offre des conseils opérationnels directement aux téléphonistes et aux répartiteurs.
Tous les employés travaillant à la STO pendant la première heure ont connu un niveau d'activité et reçu des quantités d'information sans précédent.
*****. Il est impératif que la STO de Codiac bénéficie de la formation fournie aux autres STO et que les procédures nationales soient mises en place. Contrairement à la STO de Fredericton, celle de Codiac ne relève pas directement de l'officier responsable des services de soutien de la Division J, mais plutôt du sous-officier responsable du détachement.
7.11 Il est recommandé de réorganiser la structure hiérarchique de la STO de Codiac afin de faire participer l'officier responsable des services de soutien à la prestation de la formation, à la fourniture d'équipement et aux considérations stratégiques.
Communication avec le GTI
Les ressources du GTI disposaient de leur propre répéteur UHF chiffré, installé et maintenu par un technicien radio qui accompagne le GTI. Tout problème radio survenu durant l'incident était imputé à la procédure et non au matériel. (Les questions de procédure sont abordées à la section 4 sur le déroulement de l'intervention.) Les équipes provenant d'autres divisions et services de police ont reçu des radios de la Division J. Les deux premiers membres du GTI de la Division J arrivés sur les lieux transportaient des radios portatives qui n'étaient pas encore chiffrées pour le mois de juin et qui ne leur permettaient donc pas de communiquer avec les autres membres du GTI.
La communication avec l'équipe de surveillance aérienne était parfois difficile, car les membres des services généraux à bord de l'aéronef n'étaient pas habitués aux protocoles de communication du GTI.
7.12 Il est recommandé que le GTI élabore un guide de référence rapide à l'intention des membres non formés par le GTI qui peuvent être appelés en renfort (et affectés au réglage du tir par avion et autres postes d'observation). Le technicien en télécommunications du GTI pourrait fournir ce guide et serait en mesure de former les membres aux protocoles radio du GTI.
Plan de continuité des activités, répartiteurs de la STO bilingues
Le soir du 4 juin 2014, le centre de décision national pour les STO a appris, par la Division J, que les employés de la STO de Codiac auraient besoin de relève le plus tôt possible pendant au moins deux semaines pour leur donner le temps d'assimiler ce qui s'était produit. La STO de Codiac est un centre opérationnel bilingue, alors il faudrait que les répartiteurs remplaçants maîtrisent et le français et l'anglais. Trouver ces remplaçants s'est avéré ardu puisque les répartiteurs bilingues à l'échelle du pays étaient indispensables dans leur poste d'attache. On a toutefois fini par en trouver, mais en nombre insuffisant pour permettre aux employés de profiter d'un repos adéquat. Les membres de la relève ont effectué des quarts de 12 heures, et plusieurs d'entre eux ont travaillé 12 jours d'affilée en plus des quarts effectués dans leur service d'attache avant le déploiement. Il s'agit d'une pratique inacceptable.
Protocole radio
Les événements du 4 juin 2014 ont clairement démontré qu'il est nécessaire que les membres emploient un langage clair. Le passage à un tel langage nécessitera l'application d'une norme claire et cohérente. Lorsque la situation est devenue chaotique, des renseignements inutiles ou impertinents étaient transmis, rendant la communication radio problématique.
Étant donné que plusieurs membres demandaient simultanément du temps d'antenne, les transmissions se chevauchaient, et de précieux renseignements étaient perdus. La situation a vite dégénéré, et, faute de communication claire, les membres n'ont pas pu évaluer le risque de manière informée. La connaissance de la situation revêt une importance capitale en temps de crise. Dans le cas présent, elle a été entravée par l'ambiguïté des communications verbales et par le fait que les superviseurs n'ont pas donné la consigne de décrire clairement les événements.
D'autres pays ont déjà adopté le langage clair et concis pour leurs systèmes radio. Les experts en linguistique ont étudié les communications policières en situation de crise et découvert que les transmissions initiales employant un langage clair et les transmissions courtes occupent moins de temps d'antenne, et que la terminologie uniforme améliore la discipline radio et permet à la STO et aux superviseurs de consigner des renseignements clairs.
Employer des termes qui en viennent immédiatement au fait, tels que « Le suspect a tiré sur le gend. X » au lieu de « Agent abattu », peut grandement influer sur la prise de décisions et améliorer la connaissance de la situation. L'ambiguïté de l'information sur les positions des membres intervenants a empêché d'autres membres d'établir des évaluations du risque informées, ce qui, en retour, a limité la capacité des superviseurs à gérer l'incident. Tenter de transmettre un message au moyen du code 10 et de l'alphabet phonétique est inefficace et peut prendre beaucoup de temps et s'avérer dangereux en situation de crise. Il faut plutôt employer des termes simples et concis, mais descriptifs, pour s'assurer de relayer l'information critique à ceux qui en ont besoin. Bien entendu, le chiffrement rend les transmissions encore plus efficaces et sûres.
7.13 Il est recommandé que la GRC instaure une politique qui permet l'emploi de langage clair au lieu des codes 10 en situations d'urgence.
Section 8 : Communication et médias
Question du commissaire : Comment la communication avec les médias s'est-elle déroulée? Quel rôle les médias sociaux ont-ils joué? Y avait-il des possibilités d'amélioration?
Pour répondre à cette question et cerner la portée locale et nationale du défi de la communication, l'équipe d'examen a demandé la contribution des Services nationaux de communication (SNC) et des Communications stratégiques de la Division J.
La présente section, qui couvre la période du 4 au 15 juin 2014, commence par les observations des Communications stratégiques de la Division J sur les communications internes et externes en lien avec la fusillade. Elle donne ensuite un aperçu des types de documents de communication rédigés ainsi que des voies de diffusion de l'information, et expose les recommandations proposées.
Au moment de l'incident, l'équipe des Communications stratégiques de la Division J comptait sept membres :
un directeur des Communications stratégiques;
un agent des relations avec les médias (ARM) intérimaire;
un conseiller en stratégies de communication à Moncton;
un conseiller en stratégies de communication à Fredericton;
un responsable Web et Nouveaux médias;
deux employés contractuels (un occasionnel et un nommé pour une période déterminée).
La ressource responsable des Nouveaux médias, qui est aussi gestionnaire d'équipement pour le GTI, n'était pas disponible car elle était mobilisée pendant les 29 premières heures. Plusieurs ressources n'étaient pas disponibles pour des raisons personnelles. *****.
Le responsable des Nouveaux médias travaillant avec le GTI, les Communications stratégiques de la Division J se sont retrouvées sans responsable Web. Par conséquent, les fonctions connexes ont été assumées par d'autres membres de l'équipe ou, dans certains cas, par Ottawa.
Les SNC ont dépêché un ARM et un conseiller en stratégies de communication sur les lieux le jour suivant la fusillade. Le premier est retourné à Ottawa le 10 juin, le lendemain des funérailles, tandis que le second est reparti plus tôt, le dimanche 8 juin, mais a été remplacé le jour-même par un homologue qui, lui, est resté à Moncton jusqu'au 16 juin. Le lundi 9 juin, le directeur des Communications stratégiques des SNC a été mobilisé pour aider aux préparatifs des funérailles et servir d'agent de liaison avec la Direction générale (DG).
Un conseiller en communications et un ARM de la Division H sont arrivés à la Division J le matin suivant la fusillade et sont retournés en Nouvelle-Écosse à l'issue de la conférence de presse tenue le 6 juin qui annonçait l'appréhension du tireur.
Le déploiement immédiat de ressources d'Ottawa a été utile, mais il a été difficile d'assurer une relève à long terme au personnel de la Division J. Les circonstances exigeaient un soutien ininterrompu aux communications pendant les 29 premières heures. Les jours suivants, des ressources ayant été affectées au comité organisateur des funérailles, et la principale équipe des communications a été obligée de s'en tenir aux éléments concernant l'incident et l'enquête en cours. Il y avait des préoccupations quant à l'épuisement du personnel si la situation durait plusieurs jours.
Après les funérailles, des efforts ont été consentis pour assurer une relève au personnel des Communications de la Division J. Le conseiller en stratégies de communication des SNC est demeuré sur place, et les appels des médias ont été dirigés vers la DG afin d'alléger le fardeau de la division. L'insuffisance du nombre de remplaçants est considérée comme une lacune étant donné que la planification d'urgence doit prévoir une relève plus nombreuse pour plus une longue période de temps post-incident. Pour éviter ce problème dans l'avenir, le directeur des Communications de la Division J a discuté avec les sections des communications d'autres divisions (E et H) sur des options de relève à envisager.
8.1 Il est recommandé que les SNC élaborent un plan qui servira de référence pour assurer une relève au personnel des communications divisionnaires en cas de situation de crise de longue durée. Ce plan doit tenir compte des besoins de chaque division.
Les Communications stratégiques de la Division J ont pour but « d'appuyer les activités opérationnelles visant à résoudre et à prévenir des crimes ». C'était leur principe directeur pendant toute la durée de l'incident. Pour réaliser leur but, elles se sont concentrées essentiellement sur les messages à diffuser dans la collectivité afin d'aider les premiers intervenants. Voici les questions prises en considération : Quelle information donner aux résidents pour assurer leur sécurité? Quelle information fournir pour assurer la sécurité des policiers? Quelle information fournir pour aider la GRC à appréhender le tireur? Quelle information pourra servir à prévenir d'autres décès ou blessures? Les Communications ont examiné ces considérations pour orienter leurs activités pendant les 10 premiers jours. Elles ont géré de manière stratégique les problèmes liés au ton des messages publiés dans les médias sociaux ainsi qu'aux bulletins d'actualité des médias traditionnels. La GRC a pu ainsi contrôler les messages et devenir la source privilégiée d'information exacte pour les médias et le public. Dans de nombreux commentaires sur les médias sociaux, les gens disaient attendre la confirmation officielle de la GRC avant de croire ou d'appuyer l'information publiée.
Il faut signaler que le directeur des Communications stratégiques de la Division J a appris la nouvelle de l'incident par les médias, et que le conseiller en communications stratégiques à Moncton l'a apprise sur les médias sociaux. Un message téléphonique a été laissé à la résidence de l'ARM de Codiac, mais rien d'autre n'a été tenté pour joindre ce dernier. Il est d'une importance capitale de communiquer immédiatement avec le personnel des Communications dans une situation de cette nature.
8.2 Il est recommandé d'élaborer des procédures opérationnelles normalisées pour s'assurer que le personnel des communications soit parmi les premiers prévenus lors d'événements graves.
Étant donné l'heure de l'incident (vers 19 h 20 le 4 juin), les médias traditionnels ne pouvaient pas relayer immédiatement l'information au public. Les chaînes radio de Moncton étaient soit passées à la programmation nationale, soit au mode automatisé (diffusion préenregistrée). Le journal quotidien ne sortait pas avant le lendemain matin, et sa version en ligne était réservée aux abonnés, ce qui signifie que le public n'y avait pas accès. Le téléjournal du soir était passé, et le prochain bulletin local n'était attendu que dans trois ou quatre heures. Les médias sociaux restaient donc le moyen le plus rapide et le plus efficace d'informer la population. Compte tenu de la gravité de l'incident, on s'attendait à ce que la nouvelle se répande vite et se sache par un large public. C'est exactement ce qui s'est produit : le nombre d'abonnés aux fils sur les comptes RCMPNB et GRCNB de Twitter et Facebook augmentait à un rythme stupéfiant pendant l'incident. Heureusement, la Division J utilisait les médias sociaux depuis cinq ans et s'était créé un public. L'équipe des Communications stratégiques possède de l'expérience des médias sociaux lors de divers incidents et savait avec quelle rapidité elle pouvait, grâce à ce moyen, toucher un très grand nombre de personnes.
Les sections des communications de la GRC utilisent régulièrement les médias sociaux (Twitter et Facebook). Dans le cas présent, ces derniers se sont avérés extrêmement utiles pour appuyer les communiqués et conférences et autres points de presse visant à transmettre de l'information directement au public. Ils ont aidé la Gendarmerie à établir sa crédibilité et à préserver sa réputation de source d'information officielle et fiable.
Comment s'est déroulée la communication avec les médias?
L'ARM de Codiac et le conseiller en stratégies de communication à Moncton étaient les deux ressources en la matière travaillant à Codiac pendant les 12 premières heures suivant l'incident. Le directeur de la Division J se trouvait au quartier général de Fredericton d'où il surveillait les besoins en matière de communication, assurait la supervision et communiquait avec les SNC. Comme il a été mentionné précédemment, quatre ressources supplémentaires ont été envoyées à Moncton. Deux ressources de la DG sont arrivées à Fredericton le 5 juin.
Il a été décidé tôt qu'un conseiller en stratégies de communication collaborerait avec le commandant des interventions pour accélérer le processus d'approbation des messages Twitter de la GRC. Pour aider le commandant des interventions dans cette tâche, le conseiller présentait le texte à faire approuver et demandait la permission de le publier.
Les sites des médias sociaux étaient inondés de messages et d'images montrant le tireur et du sang autour d'un véhicule. Une vidéo montrait même un policier recevoir une balle. Il était important que la GRC reconnaisse l'évidence, car il s'agissait d'information à laquelle de nombreux résidents de la zone en question auraient eu accès. Les premiers gazouillis indiquaient qu'un tireur fou se trouvait dans un quartier résidentiel, que les résidents devaient rester chez eux et que les autres devaient éviter le secteur. Il fallait souvent publier des mises à jour, car le tireur se déplaçait activement. L'information sur le nombre d'agents abattus a été diffusée une fois confirmée. Cette confirmation était essentielle pour dissiper les craintes que des citoyens avaient été la cible de tirs puisque tous les membres abattus ne portaient pas l'uniforme.
Les médias sociaux sont devenus le principal moyen de communication directe avec les citoyens de Moncton ainsi qu'avec les médias et les journalistes. Le bureau des relations avec les médias de Codiac et de la Division J recevait constamment trop d'appels qu'il était impossible de rappeler chaque journaliste. On a tenté de publier un nouveau message toutes les 30 minutes pour s'assurer que ceux et celles qui suivaient les médias sociaux recevaient des mises à jour opportunes.
La présence continue sur les médias sociaux durant cette crise a permis d'assurer la diffusion rapide d'information exacte et de mettre fin aux rumeurs. Elle a également eu un effet apaisant sur les citoyens, dont la sécurité n'a pas été menacée par un sentiment de crainte exacerbé. Les messages lançant un appel à tous ont permis au public d'apporter sa contribution sans nuire aux opérations policières et de savoir ce qu'il pouvait faire pour aider.
Un point de presse a été tenu le 5 juin à 0 h 30 à l'hôtel de ville de Moncton par l'ARM de Codiac, accompagné du maire de Moncton. La plupart de l'information fournie reprenait ce qui était publié dans les médias sociaux. Quant à l'organisation de cet événement médiatique, il manquait l'estrade, les drapeaux et la toile de fond. Dans l'avenir, les Communications stratégiques devront réévaluer la nécessité de tenir ce genre de points de presse. Les SNC devraient songer à créer une trousse de déploiement contenant une liste du matériel requis lors d'une conférence de presse.
À environ 11 h le jeudi matin suivant la fusillade, la première des nombreuses mises à jour à l'intention des médias a été donnée dans un local que la Division J a réussi à réserver dans un hôtel au centre-ville. Ont pris la parole le commandant de la Division J, l'officier responsable de Codiac, le maire de Moncton ainsi que le premier ministre du Nouveau-Brunswick, qui a demandé à s'exprimer à la dernière minute.
D'autres mises à jour réservées à la GRC ont suivi le 5 juin à 16 h 30 et le 6 juin à 8 h.
Lors des conférences de presse, aucun porte-parole n'était présent pour aborder l'aspect opérationnel de l'enquête. Étant donné la nature de l'incident, cette tâche ne devrait pas être laissée aux soins du commandant divisionnaire ni de l'officier responsable puisque ces derniers étaient déjà occupés à donner de l'information sur les membres abattus et blessés, et à gérer les répercussions émotionnelles sur la Gendarmerie et la collectivité. La présence d'un porte-parole des opérations aurait été très utile. Il faut noter qu'en raison du peu d'information reçue du CDOU, les Communications ont été incapables de préparer adéquatement une déclaration au sujet de l'incident ou de l'enquête en cours.
8.3 Il est recommandé, pour les conférences de presse tenues par suite d'incidents de cette nature, d'avoir un porte-parole qui présente l'aspect opérationnel de l'enquête pour rassurer la communauté en soulignant que la police prend les mesures nécessaires.
Les rencontres avec les participants avant et après les conférences de presse n'avaient pas lieu systématiquement et devraient faire partie de tout élément médiatique. Ainsi, un conseiller en stratégies de communication ou un ARM pourrait conseiller les participants et s'assurer qu'ils connaissent le sujet abordé avant la conférence et à son issue pour pouvoir fournir des commentaires.
Quel rôle les médias sociaux ont-ils joué? Y avait-il des possibilités d'amélioration?
Les médias traditionnels jouent certes un rôle important, mais sont relégués au second plan au profit des médias sociaux. Grâce aux téléphones intelligents et aux appareils mobiles, le public reçoit les informations directement de la source et ne se fie plus à ce que les médias traditionnels décident de lui relayer. C'est ce qu'atteste le nombre d'utilisateurs qui suivent le compte RCMPNB. Le soir du 4 juin, avant la fusillade, les comptes GRCNB et RCMPNB de Twitter et Facebook affichaient environ 18 000 abonnés. Durant l'incident, ce nombre a augmenté à un rythme tel que Twitter a failli fermer le compte RCMPNB. Dans les 48 heures suivantes, le nombre d'abonnés avait dépassé les 80 000.
Même s'il était attendu que les médias suivent et lisent les gazouillis, il était surprenant de les voir en diffuser sur leurs sites Web et à la télévision. Des impressions d'écran de ces gazouillis étaient publiées et utilisées comme citations attribuées à la GRC, ce qui a évité à cette dernière d'avoir à faire appel à un porte-parole.
Les médias sociaux reposent sur la participation. Pour la GRC, c'est un moyen d'offrir au public un lien direct vers son service de police, et, comme dans tout dialogue, on s'attend à ce qu'on accuse réception de toute question ou de tout commentaire formulé. La Division J manquait de ressources pour contrôler adéquatement les activités sur les médias sociaux, qu'il est important de surveiller pour différentes raisons, notamment pour prendre connaissance des suggestions du public, vérifier le ton et le contenu des commentaires, accuser réception des messages par souci de courtoisie.
8.4 Il est recommandé que les SNC trouvent des solutions logicielles afin de surveiller adéquatement les médias sociaux.
Il est aussi important de disposer du matériel adéquat pour publier des messages dans les médias sociaux. Même si le personnel des Communications peut accéder aux sites des médias sociaux à partir d'ordinateurs ROSS, ces sites ne fonctionnent pas toujours bien. Les Communications stratégiques utilisent un poste de travail autonome se trouvant dans un bureau. Le matériel en question ne doit pas se limiter à de l'équipement de bureau, il doit aussi être portatif. Durant l'incident, les employés des Communications ont dû utiliser leurs cellulaires personnels pour publier des mises à jour puisque les appareils BlackBerry de la GRC ne permettent pas l'accès aux sites des médias sociaux. Les SNC ont fourni des ordinateurs portatifs et des tablettes qui sont dépourvus de capacités en matière de données, et sont lourds et encombrants. La réception de données nécessite une carte modem, ce qui rend l'utilisation de l'appareil difficile et peu commode.
8.5 Il est recommandé d'équiper le personnel des Communications d'appareils mobiles fonctionnels et modernes pour lui permettre d'effectuer son travail et d'utiliser les médias sociaux de manière efficace.
Devant une situation aussi tragique, il est essentiel d'assurer des communications internes opportunes, que ce soit à l'échelon national ou local. Du 4 au 13 juin, la Division J a diffusé 33 communiqués généraux sur l'incident. La coordination des communications internes est considérée comme une lacune. Étant que le personnel des Communications devait gérer les communiqués externes, personne ne s'occupait des messages internes. Il était chargé de la rédaction de messages au nom du commandant divisionnaire et de l'officier responsable du Détachement de Codiac, tandis que tous les autres communiqués généraux étaient rédigés par l'expéditeur. Sur ce plan, la coordination avec Ottawa n'a pas été rationnalisée : certains communiqués nationaux et divisionnaires présentaient des similarités. Un seul point de contact entre la division et les SNC pourrait contribuer à accélérer les communications et à réduire la redondance.
Certains messages destinés au public ont également été envoyés à l'interne. Les employés apprenaient donc des informations par l'intermédiaire de comptes de médias sociaux personnels ou des médias. Les communiqués internes publiés à l'échelle de la division par GroupWise n'étaient pas nécessairement lus par les employés du Détachement de Codiac puisque ces derniers étaient en congé pendant deux semaines. Il fallait employer un autre moyen pour les informer.
L'incident peut se diviser en quatre volets de communication distincts :
Premier incident
Arrestation et enquête subséquente
Funérailles régimentaires
Événements suivant les funérailles
Étant donné l'envergure des funérailles régimentaires, il était essentiel d'affecter un représentant des Communications au comité organisateur. Mais le nombre de tâches confiées à une seule personne était démesuré sachant que le comité ne disposait que de quatre jours pour organiser les funérailles de trois membres.
À ce stade-ci, la coordination d'une diffusion en direct constituait le plus important volet de communication. Compte tenu du nombre de responsabilités confiées à la seule personne représentant les Communications au sein du comité organisateur, il fallait prévoir deux ressources supplémentaires. Cela permettrait à l'une d'assister aux séances de breffage et d'agir comme agent de liaison auprès du comité, et aux deux autres de s'occuper d'autres tâches. La question a été portée à l'attention du sergent major du corps qui reconnaît la nécessité d'avoir une ressource des Communications en liaison directe avec le chef du comité chargé des funérailles.
La coordination sur place de la diffusion des funérailles a été facilitée par le recours au chef de la Tribune de la presse parlementaire canadienne qui faisait office d'agent de liaison avec les médias radiotélévisés nationaux. Il avait l'expérience et les relations nécessaires à la coordination d'un tel événement dans un délai serré. Il faut prévoir une ressource en communications qui assure la liaison avec la GRC et voit à la satisfaction des besoins de cette dernière et de ceux des médias.
8.6 Il est recommandé que les SNC fournissent un point de contact ayant les compétences essentielles à la gestion de funérailles régimentaires (de l'intérieur ou de l'extérieur de la GRC), qui collaborera avec les Communications stratégiques.
Les médias sur place disposaient de peu d'information pour les aider dans les diffusions. Le personnel des Communications devait distribuer le programme des funérailles, et, bien qu'un membre retraité de la GRC était prêt à faire des commentaires en direct à la télévision nationale, peu d'information sur la GRC a été fournie (traditions et événements antérieurs où des membres ont été tués dans l'exercice de leurs fonctions).
Comme la Division J n'a pas de photographe officiel, il a fallu demander, juste avant le début des funérailles, à celui du premier ministre de prendre des photographies pour la GRC.
8.7 Il est recommandé qu'un photographe professionnel soit présent à toutes les funérailles régimentaires afin d'en conserver des images comme il se doit.
Les funérailles sont peut-être considérées comme la fin de la mission des Communications, mais elles ne représentent que l'aboutissement d'une autre étape importante. L'enquête se poursuivait, et un intense sentiment d'anxiété régnait toujours dans la collectivité. Il fallait ramasser les cadeaux de condoléances déposés autour du Détachement de Codiac, et la GRC devait remercier la population de son appui. Tout cela nécessitait le soutien des Communications.
Les Communications stratégiques ont également offert leur assistance aux familles des membres décédés. En étroite collaboration avec les représentants des relations fonctionnelles, l'équipe des Communications s'est mise à la disposition des familles pour les conseiller sur la façon de composer avec l'afflux des médias.
8.8 Il est recommandé d'informer les familles des membres tués dans l'exercice de leurs fonctions que les Communications sont prêtes à les aider en agissant comme agent de liaison entre elles et les médias, et qu'elles auront accès au site Web de la GRC pour y publier des messages ou des photos.
Les jours suivant les funérailles, les Communications ont poursuivi leur mission qui consistait à appuyer les membres sur le terrain dans l'enquête et à informer le public. Des messages de remerciement de la part du commandant divisionnaire et de l'officier responsable du Détachement de Codiac ont été publiés dans les médias sociaux, d'autres ont été repris textuellement par les médias traditionnels. Les auteurs de ces messages n'ont pas eu à accorder d'entrevues.
Dans le site Web de la Division J se trouve une page intitulée « Rétablissons les faits » où sont relatées les graves erreurs factuelles diffusées par les médias ou, dans le cas de la fusillade, les rumeurs et les insinuations entourant l'enquête. Manifestement, de nombreuses personnes donnaient leur opinion aux médias au sujet des événements du 4 juin. Un message a donc été publié pour informer le public qu'une enquête était en cours et lui rappeler que la GRC se basait sur des faits et non sur des rumeurs, et qu'il lui fallait du temps pour mener son enquête. Le message a réussi à mettre fin aux rumeurs et a obtenu le plein soutien de la collectivité sur les comptes RCMPNB des réseaux sociaux.
Les Communications stratégiques de la Division J ont été félicitées de leur travail exceptionnel tout au long de l'incident et ont mérité le prix officiel "The Connected Cops Social Media Event Management Award." Ce prix est décerné à l'agent ou à l'organisme d'application de la loi, de partout dans le monde, qui s'est servi des médias sociaux pour gérer une situation d'urgence ou touchant la sécurité publique, qu'elle soit imprévue ou connue, et agir sur son cours. Cet agent ou organisme a fait preuve de préparation, a mené ses opérations de manière stratégique et a appliqué les techniques de mobilisation par les médias sociaux pour communiquer efficacement de l'information sur la sécurité publique en situation d'urgence. Un représentant des Communications de la Division J s'est récemment rendu au Royaume-Uni pour recevoir le prix.
Rôle des Services nationaux de communication (SNC)
Les SNC et les Communications de la Division J se sont mobilisées dès les premiers signalements de coups de feu tirés sur des agents le 4 juin en soirée. Le personnel clé s'est tout de suite mis en relation pour déterminer l'aide requise.
Juste après la fusillade, la Division J a été inondée d'appels et de demandes d'entrevues en direct par les médias. Les ARM des SNC ont aidé à répondre aux appels. Le matin du 5 juin, les SNC ont désigné un ARM et un conseiller en stratégies de communication à envoyer à la Division J. Le 8 juin, la division avait besoin d'aide supplémentaire sur le terrain; alors, les SNC ont dépêché un directeur ainsi qu'un conseiller en stratégies de communication remplaçant. Quelques jours plus tard, les appels étaient redirigés vers la section des relations avec les médias de la DG.
À la DG, le personnel des SNC chargé d'appuyer la Division J a rempli un rôle opérationnel en utilisant les principes de commandement des interventions afin de donner des directives de façon continue aux employés et de distribuer régulièrement des listes de tâches.
Les employés des SNC étaient occupés à rédiger des messages à publier dans les médias sociaux et à utiliser par la DG, des communiqués pour les commandants divisionnaires à l'échelle du pays ainsi que des allocutions pour le compte de l'officier responsable du Détachement de Codiac. Ils rédigeaient les communiqués du commissaire, préparaient des infocapsules sur divers sujets à utiliser à la DG et dans la Division J, et ont identifié les experts en la matière qui allaient faire des commentaires durant les funérailles.
L'équipe des Nouveaux médias des SNC a publié des mises à jour et des analyses régulières dans les médias sociaux, et a fourni à la division un soutien technique Web. La Gestion des questions d'intérêt des SNC a préparé une liste de questions possibles et a collaboré avec les centres de décision en vue d'ébaucher des réponses préliminaires. Les SNC ont tenu une téléconférence avec l'ensemble des divisions pour les tenir au courant de la situation, leur fournir des directives, répondre aux questions et s'assurer que le message de la GRC était cohérent. Les SNC surveillaient le compte Facebook de la Division J et ont publié une bannière commémorative, tandis que la Division J a continué à publier de nouveaux messages.
Les Nouveaux médias des SNC ont collaboré avec les Services d'infrastructure des applications Web, Développement d'applications, Solutions d'entreprise, pour créer un outil en ligne qui a permis au public de soumettre des éléments de preuve sur photo et vidéo qui ont été traités dans le cadre de l'enquête en cours. Cet outil, qui constitue une avancée dans le domaine, a été présenté aux commandants divisionnaires à l'automne 2014 aux fins d'utilisation future.
C'était la première fois que l'équipe des Nouveaux médias surveillait les médias sociaux afin de fournir une analyse de l'activité en ligne pendant une longue période. La GRC garde le contact avec le public grâce à Facebook et Twitter, et l'information publiée dans les médias sociaux reprenait ce que la DG et la Division J publiaient sur leurs comptes, ainsi que les gazouillis publiés et repris sur Twitter par d'autres. L'analyse a également porté sur les mots-clic les plus couramment utilisés et les personnes les plus influentes sur Twitter.
Dans les médias sociaux, Twitter a été la plateforme dominante : les gazouillis relatifs à la fusillade représentaient en moyenne le double des messages de même nature publiés dans Facebook. La couverture médiatique de la fusillade a été immédiate et a donné lieu à une réaction exceptionnellement forte sur les médias sociaux à l'échelle internationale.
Voici les chiffres enregistrés dans toute la plateforme des médias sociaux :
146 581 messages entre les premiers signalements de coups de feu le 4 juin et 18 h le 5 juin;
199 414 messages entre 18 h le 5 juin et 18 h le 6 juin;
97 844 messages entre 18 h le 6 juin et 18 h le 8 juin;
12 796 messages entre 18 h le 8 juin et 18 h le 9 juin;
45 999 messages entre 18 h le 9 juin et 18 h le 11 juin;
3 249 messages les 12 et 13 juin.
8.9 Il est recommandé que les divisions assurent la surveillance des médias sociaux en temps réel, ce qui pourrait aider à repérer les risques opérationnels et à éclairer l'élaboration d'une stratégie de communication.
De faux comptes au nom du suspect ont été presque immédiatement créés sur les médias sociaux. Facebook supprimait tous ceux reconnus comme étant faux.
Entre le 4 juin au soir et le 6 juin au matin, les médias se sont centrés sur les opérations policières et les rumeurs au sujet du suspect et de ses motivations, tandis que des messages de condoléances étaient diffusés tout au long de cette période. La couverture par les médias traditionnels a diminué après l'annonce de l'arrestation du tireur et la divulgation de l'identité des agents abattus. Elle a repris en raison de la transmission en direct des funérailles, puis a baissé de nouveau.
Après les funérailles, les médias ont plutôt traité de la question de savoir si l'équipement de nos agents était adéquat, de l'enquête en cours et de la recherche d'éléments de preuve. Le nouvel outil en ligne que les Nouveaux médias des SNC ont contribué à élaborer a aussi suscité l'attention des médias.
La GRC ne peut pas communiquer à l'interne ou à l'externe des documents non traduits. Pour assurer une traduction rapide des communications, les Services de traduction doivent être disponibles en tout temps. Une entente sur les niveaux de service a été conclue en septembre 2014 afin de répondre à ce besoin.
Section 9 : Examen plus vaste de la politique
Question du commissaire : Les procédures, les tactiques et les politiques actuelles ont-elles été respectées? Des changements s'imposent-ils?
Le rapport fournit une analyse approfondie des tactiques et des procédures suivies durant l'incident. Il a déjà été fait mention des situations où les membres ont respecté ou omis de respecter la politique. Dans les cas où une politique faisait défaut, une recommandation ou un commentaire a été formulé dans ce sens. La présente section portera sur les modifications aux politiques de la GRC qui n'ont pas encore été abordées.
Dans la section traitant de formation et de compétences liées à la sécurité des agents, il est mentionné que le maintien et l'amélioration des compétences en maniement d'armes à feu nécessitent de la pratique et, bien entendu, des munitions.
La politique actuelle sur l'acquisition de munitions de la GRC à des fins personnelles pourrait empêcher les membres d'effectuer des exercices de pratique autonome. La politique prévoit l'achat des munitions d'exercice dans les magasins de la GRC, mais n'oblige pas ces derniers à garder en réserve des munitions supplémentaires pour la pratique. Il semble peu intéressant financièrement pour une division de fournir les munitions, car les frais de munitions destinées à la pratique personnelle doivent être payés à l'ordre du Receveur général et non à la division qui en a fait l'acquisition.
L'offre de munitions d'exercice varie considérablement d'un détachement et d'une division à l'autre. Au Détachement de Codiac, les munitions étaient disponibles dans une certaine mesure à ceux qui souhaitaient effectuer des exercices supplémentaires, mais il n'y avait pas de procédure officielle pour leur acquisition et leur distribution. À Codiac, le personnel chargé du contrôle des munitions ignorait que la politique prévoyait l'achat de munitions d'exercice.
Un détachement peut fournir à un membre des munitions pour fins de pratique au pistolet. Des munitions sont distribuées gratuitement par le commandant divisionnaire ou son délégué au moyen du formulaire 1990. Le membre doit produire une déclaration attestant qu'il utilisera les munitions à des fins de formation au maniement de pistolet pour répondre à des besoins opérationnels. Cela devrait aller de soi. Une telle déclaration minimise l'importance de maintenir ses compétences et peut associer un sentiment de honte ou de blâme au processus de demande. Même si un membre fait la demande de munitions par la voie officielle, rien n'oblige les magasins à acheter des munitions supplémentaires. Il n'existe pas de politique correspondante relative aux autres armes à feu de la Gendarmerie.
9.1 Il est recommandé que la GRC adopte un mécanisme amélioré pour permettre à ses membres d'obtenir des munitions d'exercice.
Les épreuves de tir de défense modernes ne font pas l'objet d'une politique de la GRC, mais peuvent aider les membres à améliorer leur précision, leur vitesse et leur maîtrise générale des armes à feu tout en les amenant à gérer le stress de l'épreuve.
9.2 Il est recommandé que soient examinées les politiques et les pratiques pertinentes pour s'assurer qu'il existe des contrôles adéquats et qu'aucune contrainte n'empêche les membres d'améliorer leurs compétences en maniement des armes à feu.
Section 10 : Armes à feu en la possession de l'accusé
Question du commissaire : Quels éléments d'information étaient connus de la police au moment de l'intervention et pendant l'évolution de l'incident, le cas échéant?
Justin Bourque avait cinq armes à feu sans restriction le 4 juin*****. Pendant tout le déroulement de l'incident, il a porté une carabine Winchester semi-automatique M305 de calibre .308 (7,62 x 51 mm), avec un chargeur à cinq cartouches et deux chargeurs prohibés à 20 cartouches, ainsi qu'un fusil à pompe de calibre 12, qu'il gardait en réserve et avec lequel il n'a pas fait feu.
Il avait en sa possession au moins 60 cartouches Winchester à balle demi-blindée de calibre .308 et 10 cartouches à chevrotines no 4 de calibre 12, achetées environ une heure avant l'incident. D'après les munitions qui se trouvaient dans sa carabine au moment de son arrestation, il avait aussi des cartouches à balle blindée. Quand Justin Bourque a quitté sa résidence, il avait 17 cartouches de carabine et quelques cartouches de fusil, auxquelles se sont ajoutées les munitions achetées le soir même. La cartouche Winchester de calibre .308 a été conçue à des fins militaires dans les années 50, mais elle est aujourd'hui l'une des munitions les plus couramment utilisées dans les carabines de sport pour le tir sur cible à longue distance et la chasse au gros gibier. Un gilet pare-balles souple ne protège pas contre les cartouches de ce genre, et Justin Bourque reconnaît l'avoir su. Il était conscient du fait que seul un gilet pare-balles rigide (GPBR) à plaques de céramique peut arrêter ces munitions. Il a échappé une boîte de 20 cartouches de carabine au lieu du meurtre du gend. Larche, soit près de la moitié des munitions qui lui restaient pour la carabine M305. Il n'a pas mentionné la perte de ces munitions lors de son entrevue avec la police.
*****. Les membres qui sont intervenus le 4 juin 2014 n'auraient eu aucune idée de l'identité du suspect ni des armes qu'il avait en sa possession, sauf qu'il s'agissait d'armes d'épaule, selon les vagues descriptions données par les personnes qui avaient composé le 911. Le type d'armes en cause aurait facilement pu être déterminé avec exactitude à partir des photos de lui qui ont été diffusées dans les médias peu après la fusillade.
La carabine M305 de fabrication chinoise que Justin Bourque a utilisée est une version semi-automatique de la carabine militaire M14 adoptée par l'armée américaine en 1959. Les versions de cette arme qui se vendent sur le marché civil portent plusieurs noms de modèle, mais l'appellation M14 est courante. Il s'agit d'une carabine d'assez grandes dimensions et plutôt lourde, prisée surtout des tireurs sur cible et des collectionneurs d'armes à feu militaires. Justin Bourque dit avoir eu connaissance d'une façon de modifier cette carabine pour lui donner une capacité de tir automatique, ce qu'il aurait tenté de faire, mais sans succès. Lors d'une entrevue réalisée après son arrestation, il a déclaré ne pas avoir poursuivi ses efforts pour rendre la carabine entièrement automatique parce qu'il savait qu'il aurait alors de la difficulté à la maîtriser et qu'il gaspillerait des munitions. Un de ses chargeurs était conçu pour recevoir cinq cartouches. Les deux autres, conçus au départ pour en recevoir 20 (le nombre standard pour ce genre d'arme), avaient été modifiés pour en contenir cinq au plus, comme l'exige la loi au Canada. Il semble que Justin Bourque ait retiré les dispositifs de modification des chargeurs pour qu'ils puissent de nouveau contenir 20 cartouches, les rendant de ce fait illégaux au Canada. Une foule de détaillants américains vendent en ligne des chargeurs à 20 cartouches au prix d'environ 20 $.
*****. Des trois carabines d'infanterie datant des années 40 et 50 qu'il avait en sa possession, la M305 serait généralement considérée comme la meilleure, mais il aurait facilement pu obtenir les mêmes résultats avec n'importe laquelle d'entre elles. Le fusil à pompe Remington 870 dont il s'était départi équivalait, sur le plan fonctionnel, au Mossberg 500 qu'il a choisi de garder, la seule différence apparente entre les deux tenant à la crosse ergonomique du Mossberg.
La question de savoir si l'information qui aurait pu être communiquée à la police avant le 4 juin aurait permis d'obtenir une ordonnance d'interdiction discrétionnaire est presque sans intérêt pratique. *****. Si l'une ou l'autre de ces infractions avait été signalée à la police, il aurait été possible de lancer une enquête qui aurait très bien pu mener à la saisie des armes que Justin Bourque avait acquises légalement, *****.
*****. Modifier le Code criminel pour rendre obligatoire la présentation d'un permis d'armes à feu valide avant qu'il puisse y avoir cession de munitions, sauf dans les situations où les munitions seront utilisées sous la supervision immédiate d'un détenteur de permis, pourrait décourager la cession de munitions à des personnes sans permis ou du moins faciliter les poursuites relatives à ce genre d'infraction.
Section 11 : Informations ou renseignements sur le tireur et possibilités de prévention
Question du commissaire : La police a-t-elle eu des occasions raisonnables d'intervenir auprès de l'accusé avant qu'il passe aux actes? Y a-t-il moyen de dépister tôt les autres personnes qui peuvent avoir des intentions semblables?
Contacts entre Justin Bourque et la police
Justin Bourque n'en était pas à son premier contact avec le Service régional de la GRC de Codiac au moment des événements du 4 juin 2014. *****.
Renseignements
Avant le 4 juin 2014, aucun renseignement ne donnait à penser que Justin Bourque puisse représenter un danger pour les autres. *****.
Surveillance de sources ouvertes
L'équipe de Recherche tactique sur Internet en soutien aux opérations (RTISO) de la GRC se sert de l'information de source ouverte tirée d'Internet pour produire des renseignements criminels susceptibles de donner lieu à une action et pour fournir des pistes d'enquête tangibles à l'appui des méthodes d'enquête traditionnelles. Elle prête main-forte à l'ensemble de la Police fédérale en effectuant des recherches passives dans les sources ouvertes accessibles sur Internet pour apporter un soutien direct aux enquêtes criminelles. Elle ne surveille pas les affichages en ligne des Canadiens autrement que dans le cadre de telles enquêtes.
L'équipe de RTISO a participé à l'enquête sur Justin Bourque en fournissant au Groupe des crimes majeurs un profil des activités en ligne de l'accusé *****, en recensant les témoins et les individus hostiles aux policiers, ainsi qu'en surveillant les affichages en ligne au sujet de la tuerie. Elle a découvert que la Justin Bourque avait une faible présence en ligne et n'a trouvé dans les médias sociaux qu'un compte Facebook à son nom. L'information dans son compte Facebook n'était accessible qu'en ouvrant une session et ne pouvait être obtenue à l'aide d'aucun moteur de recherche. Au moment de l'incident, Justin Bourque avait 60 personnes sur sa liste d'amis. Ces personnes auraient eu accès à la totalité ou à une partie de l'information dans son compte Facebook, selon les paramètres de confidentialité établis à leur égard. Dans son journal (timeline), il était question d'armes à feu, de contrôle d'armes à feu, de violence et de haine envers les policiers. Ces affichages étaient visibles par tout utilisateur de Facebook.
*****.
Intervention précoce et prévention
On pense souvent que la prévention du crime incombe uniquement à la police. Rien n'est plus faux. Les indications les plus claires du danger que pouvait représenter Justin Bourque pour la société sont venues des observations faites par les membres de sa famille, ses amis et ses connaissances. Les armes à feu le fascinaient depuis longtemps; il s'était mis récemment à en parler sans arrêt et avait passé bien des heures au champ de tir. Une fois son identité révélée par les médias, des personnes de son entourage ont téléphoné pour signaler qu'il tenait des propos hostiles aux autorités et à la police depuis quelques années. Le père de Justin Bourque a affirmé, *****, que son fils avait fait des remarques de ce genre dans les jours précédant la tuerie. Au cours d'une conversation qui avait eu lieu le 26 mai ou le 2 juin, Justin Bourque avait dit à son père qu'il en avait assez des autorités et qu'il croyait la police corrompue. Il avait alors soutenu qu'il n'allait plus se soumettre à la volonté des autorités et que la police ne le mettrait jamais en prison.
D'autres proches de Justin Bourque se sont dits inquiets de son état d'esprit. Au moins 60 « amis » Facebook peuvent avoir vu les affichages dans son compte. Beaucoup de personnes savaient qu'il possédait des armes à feu et certaines, qu'il possédait des chargeurs illégaux. *****. Aucun de ces intervenants n'a fait part de ses préoccupations à une autorité compétente comme la GRC ou un professionnel de la santé. Toutes ces situations auraient offert une possibilité d'intervention précoce et auraient, à tout le moins, donné lieu à une nouvelle vérification *****. Les autorités auraient ainsi pris connaissance du fait que *****, découverte qui aurait presque certainement donné lieu à une interdiction préventive de posséder des armes à feu.
Mobilisation communautaire
Les policiers ne sont pas les seuls acteurs capables de repérer les individus potentiellement dangereux pour la société et d'intervenir auprès d'eux. Comme il a déjà été mentionné, les premiers signes d'une telle prédisposition à la violence ne sont souvent vus que par les personnes les plus proches du sujet. D'autre part, l'information que peut détenir la police ne suffit pas toujours à la réalisation d'une analyse approfondie des risques. Pour mieux réussir à repérer tôt les personnes à risque, il est notamment essentiel de mobiliser le plus grand nombre d'intervenants possible, y compris la parenté du sujet, ses amis, ses collègues, le personnel policier, les organismes de services communautaires, les ministères gouvernementaux, ainsi que les professionnels de la santé et de l'éducation.
Division J
Pionnière de la mise en œuvre du tout nouveau modèle d'intervention et de déjudiciarisation à l'intention des jeunes (IDJ), la Division J est un chef de file reconnu en matière de mobilisation communautaire et de prévention du crime. Le modèle d'IDJ est un programme fondé sur des données concrètes, qui vise à traiter la délinquance chez les jeunes de 12 à 17 ans autrement qu'en les faisant passer par l'appareil de justice pénale. Prenant appui sur une méthode scientifiquement éprouvée, soit la formule RBR (risque, besoins et réceptivité), le modèle d'IDJ vise à écarter complètement de l'appareil de justice pénale les jeunes à risque faible ou nul et à diriger les jeunes à risque moyen ou élevé vers des services communautaires. Des outils de filtrage et d'évaluation éprouvés sont utilisés pour relever certains facteurs de risque précis qui figurent parmi les causes connues de la délinquance juvénile. Un policier renvoie les jeunes à une équipe spécialisée d'IDJ formée de membres civils et de policiers de la GRC. Cette équipe utilise un outil de filtrage sommaire pour relever la présence de facteurs de risque et dirige au besoin le jeune vers un comité multidisciplinaire d'IDJ formé de partenaires communautaires tels que des travailleurs sociaux, des cliniciens en toxicomanie et en santé mentale, des agents de probation, des éducateurs et d'autres fournisseurs de services. Ce comité effectue des évaluations multidimensionnelles approfondies et planifie les interventions, aiguillant le jeune vers les services communautaires pertinents selon ses besoins particuliers. L'objectif ultime est d'obtenir pour chaque jeune les bons services au bon moment, en tirant le meilleur profit des ressources policières et communautaires.
Certains organismes partenaires ont commencé à faire appel au comité multidisciplinaire dont ils font partie pour intervenir auprès de jeunes qui n'ont pas encore commis d'infraction criminelle. Résultat, davantage de jeunes passent par le processus de filtrage, ce qui augmente les chances d'intervenir tôt auprès de quelqu'un comme Justin Bourque, qui n'avait jamais été dénoncé à la police pour avoir commis une infraction criminelle. Pris isolément, les divers incidents survenus dans le passé de Justin Bourque auraient probablement donné lieu à une intervention minime de la part des autorités policières ou d'autres professionnels, mise à part l'interdiction possible de posséder des armes à feu. En revanche, s'ils avaient été examinés dans leur ensemble, surtout par une équipe multidisciplinaire, ils auraient presque certainement déclenché la prise de mesures préventives pour agir sur sa colère et son hostilité à l'égard des autorités.
Le ministère de la Sécurité publique du Nouveau-Brunswick a récemment adopté un modèle de déjudiciarisation plus robuste qui s'appuie sur les mêmes principes que le modèle d'IDJ et qui s'adresse tant aux jeunes qu'aux adultes. Ce nouveau modèle comportera une évaluation de la santé mentale et facilitera la transition des jeunes à l'âge adulte en assurant l'uniformité des services disponibles. Il s'agit là d'une démarche de plus qui augmentera les chances de repérer un autre jeune adulte troublé comme Justin Bourque.
Devant le succès que connaît le modèle d'IDJ au Nouveau-Brunswick, d'autres divisions ont entrepris de le mettre en œuvre sur leur territoire, dont les divisions H, L et B. Le modèle d'IDJ s'inscrit aussi dans un projet national de 25 M$ qui vise à transformer le régime de santé mentale destiné aux jeunes Canadiens de 11 à 25 ans, soit l'initiative de Recherche transformationnelle sur la santé mentale des adolescents (TRAM).
TRAM – ACCESS Canada
Le 13 juin 2014, le gouvernement fédéral annonçait, par l'intermédiaire des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le lancement d'ACCESS Canada, un réseau de recherche mis sur pied dans le cadre de l'initiative TRAM, que mènent en partenariat les IRSC et la Fondation Graham-Boeckh. La Division J a joué un rôle de premier plan dans la proposition gagnante qui a mené à la création d'ACCESS Canada, et son modèle d'IDJ figure au cœur de la transformation proposée. L'annonce se lit comme suit :
« L'objectif d'ACCESS Canada consiste à apporter, d'ici cinq ans, un changement positif dans les soins dispensés aux jeunes atteints de maladie mentale par l'utilisation de données de recherche. Au Canada, une personne sur cinq sera aux prises avec une maladie mentale au cours de sa vie. Cependant, les jeunes sont les plus vulnérables : 75 % des maladies mentales et des problèmes de santé mentale se manifestent avant l'âge de 25 ans, et plus de 50 % surviennent entre 11 et 25 ans. Ce sont malheureusement ces jeunes qui ont le moins accès à des soins de santé mentale, car les services actuels sont conçus pour les enfants plus jeunes et les adultes plus âgés.
« ACCESS Canada cherchera à combler cette lacune dans les soins de santé. Le réseau élaborera des stratégies qui veilleront à ce que davantage de jeunes obtiennent les services de santé mentale dont ils ont besoin. De plus, il mettra en application les données issues de la recherche au lieu d'intervention pour faire en sorte que les jeunes reçoivent les meilleurs traitements possible. En fin de compte, ACCESS Canada améliorera le sort des adolescents en transformant la manière dont on dispense les soins de santé mentale au Canada. »
La Division J de la GRC a codirigé ce projet pour le Nouveau-Brunswick et s'est taillée une réputation de chef de file national dans le domaine de la santé mentale chez les jeunes. L'appareil de justice pénale est souvent le mécanisme utilisé par défaut pour composer avec les personnes souffrant de problèmes de santé mentale. Aux policiers qui constituent le premier point de contact avec cet appareil, le modèle d'IDJ et le réseau ACCESS Canada offrent désormais de meilleures options d'aiguillage.
Dans le cas de Justin Bourque, aucune maladie mentale n'était en cause, mais il importe de souligner l'impossibilité de prédire les facteurs de motivation ou les causes profondes qui pourraient déclencher la prochaine fusillade de ce genre. Des problèmes de santé mentale ont en effet été constatés chez certains auteurs de tueries à grande échelle. Le modèle d'IDJ et le réseau ACCESS prévoient tous deux des mécanismes qui permettent aux personnes comme Justin Bourque d'obtenir des services. Tous les jeunes qui éprouvent des sentiments de colère ou d'hostilité envers les autorités ou qui ont une attitude antisociale ne sont pas forcément atteints de maladie mentale, mais il est tout à fait indiqué de les adresser aux services pertinents dans leur communauté, et il est parfaitement concevable qu'un jeune manifestant certains des comportements troublants observés par les proches de Justin Bourque puisse être aiguillé vers des services par l'intermédiaire du programme d'IDJ ou du réseau ACCESS. L'essentiel, c'est que le public soit mieux renseigné, qu'il soit mobilisé et que des mécanismes soient mis en place pour faciliter l'accès aux services.
Éducation du public, repérage précoce et accès facilité aux services
Le modèle d'IDJ et le réseau ACCESS misent tous deux sur la sensibilisation à la santé mentale pour accroître les capacités et le savoir communautaires au chapitre la prévention de la criminalité chez les jeunes et visent par ailleurs à établir des mécanismes pour faciliter l'accès aux services. Le projet du réseau ACCESS permettra de créer six nouveaux « lieux sûrs » pour les jeunes un peu partout au Nouveau-Brunswick afin de rapprocher les services en santé mentale des personnes qui en ont besoin. Ces lieux accueilleront des jeunes aux prises avec toutes sortes de difficultés. Pour arriver à repérer un Justin Bourque en puissance, il faut évaluer le plus grand nombre possible d'adolescents et de jeunes adultes qui éprouvent des problèmes. Plus il y a de jeunes qui ont accès aux services, meilleures sont les chances d'intervenir tôt en cas de besoin.
La sensibilisation peut aider à vaincre les préjugés entourant la santé mentale et produire sur l'ensemble de la population un effet susceptible de contribuer à la réduction des incidents de ce genre. Les enquêtes menées à la suite de fusillades de masse révèlent inévitablement, comme c'est le cas ici, que des personnes bien intentionnées avaient connaissance de certains faits dont la communication aurait peut-être permis d'éviter l'incident fatal. On entend souvent ces personnes dire « je ne pensais pas qu'il était sérieux » ou « je ne voulais pas m'en mêler ». On observe dans bien des cas une tendance à minimiser les choses de crainte que soit étiqueté l'individu au comportement inquiétant. En offrant des services libres de préjugés et adaptés aux jeunes, le réseau ACCESS peut éliminer les étiquettes souvent collées aux personnes qui ont besoin d'aide et contribuer ainsi à déprogrammer ce réflexe qu'ont les gens de vouloir se mêler de leurs affaires.
Le projet du réseau ACCESS a jusqu'ici reçu l'appui officiel des divisions J et H.
Évaluation des risques de violence (ERV)
La Division J a également fait équipe avec les arrondissements scolaires sur son territoire pour établir un protocole d'évaluation des risques de violence (ERV). La même démarche s'est faite dans d'autres secteurs relevant de la compétence de la GRC, où les professionnels appelés à travailler auprès d'enfants, y compris le personnel de la GRC, ont reçu une formation en ERV parrainée par les arrondissements scolaires de leur région. Quand le cas d'un jeune est porté à l'attention d'un professionnel du milieu scolaire en raison de la menace de violence qu'il peut présenter, une équipe multidisciplinaire se réunit pour évaluer cette menace et dresser un plan d'intervention. Aucun signalement de ce genre n'a eu lieu pour Justin Bourque, puisqu'il faisait ses études à domicile, et aucun problème n'a été soulevé à l'égard de son comportement pendant cette période. Par contre, pour la majorité des enfants qui fréquentent une école publique, l'ERV constitue un mécanisme de plus qui favorise le repérage précoce d'une éventuelle tendance à la violence.
La Division J fait figure de proue au plan national en ce qui touche l'établissement de pratiques exemplaires visant la prévention du crime et l'intervention précoce auprès des jeunes à risque. Pour mobiliser la population, il faut mener une démarche concertée et multidisciplinaire avec la participation d'un large éventail de partenaires gouvernementaux et communautaires afin de sensibiliser le public aux signes avant-coureurs de la violence. Il faut aussi faciliter l'accès aux services d'intervention dans les situations où sont repérées des personnes ayant besoin d'aide. L'initiative TRAM et le réseau ACCESS s'inscrivent dans un projet financé par le gouvernement, appuyé au privé par des chefs de file en matière de recherche en santé mentale et dirigé par la collectivité des cliniciens et des chercheurs. Ils offrent une occasion singulière de travailler en partenariat à l'échelle nationale pour le bien des jeunes du pays entier qui ont besoin de meilleurs services en santé mentale.
Il faut prendre au sérieux les menaces pour la sécurité publique, quelle qu'en soit la source, à plus forte raison dans les situations où l'on sait qu'un individu possède des armes à feu et que son intérêt à leur égard peut relever de l'obsession.
11.1 Il est recommandé à la GRC d'envisager d'élargir le soutien qu'elle accorde aux initiatives destinées aux jeunes atteints de maladie mentale.
Établissement de profils criminels
La Sous-direction des sciences du comportement (SDSC) de la GRC effectue régulièrement des évaluations de la menace à l'endroit de personnes soupçonnées de s'être engagées sur le chemin de la violence. Elle compte parmi son effectif plusieurs spécialistes de l'évaluation des menaces qui sont tenus de suivre un intensif programme de formation pratique. Après leur formation, ces spécialistes utilisent divers outils pour évaluer le niveau de menace que pose un individu. Ils se penchent sur divers types de menaces, y compris les menaces de violence en milieu scolaire, de violence générale, de violence envers des policiers, de violence en milieu de travail, de violence au foyer et de harcèlement criminel. Ils proposent également des stratégies et des tactiques pour atténuer ces menaces.
Différents outils d'évaluation s'offrent à eux selon la nature de la menace en cause. Ces outils ne sont toutefois pas conçus à des fins de repérage précoce; ils servent plutôt à évaluer le niveau de menace que pose un individu à l'égard d'une cible précise. Puisque Justin Bourque n'avait jamais été signalé à titre de menace potentielle, l'occasion ne s'est jamais présentée de faire appel aux experts de la SDSC pour que soit examiné son cas. Ces derniers doivent intervenir avant que la violence éclate pour jouer un rôle efficace.
Il est ressorti de l'examen que les capacités de la SDSC sont méconnues malgré la présentation d'exposés fréquents à leur sujet au Collège canadien de police et l'adoption d'une politique selon laquelle les menaces envers des membres de la GRC doivent être transmises à un spécialiste de l'évaluation des menaces. Chaque année, plusieurs évaluations sont effectuées à l'égard de menaces visant des membres, et les demandes de ce genre deviennent de plus en plus nombreuses. La SDSC estime toutefois que ses spécialistes de l'évaluation des menaces sont sous-utilisés.
Loup solitaire
L'attaque menée par Justin Bourque a été qualifiée de « loup solitaire ». Selon la définition de l'Institut COT pour la gestion de la sécurité et des crises (Instituut voor Veilgheids – en Crisismanagemt) des Pays-Bas, un loup solitaire est une personne qui se livre à des activités criminelles et qui :
agit seule;
n'appartient à aucun groupe ni réseau terroriste organisé;
n'agit pas sous l'autorité directe d'aucun chef ni d'aucune hiérarchie;
fait usage de tactiques et de méthodes de son propre cru, qu'elle met en œuvre elle-même et non sous les ordres directs d'autrui.
Cette définition est conforme à celles qu'appliquent d'autres organismes et est utilisée dans le cadre du Programme de sécurité nationale de la GRC.
Des évaluations de menaces criminelles pour la sécurité nationale menées récemment par la GRC font mention du danger que représentent les extrémistes agissant seuls. Comme l'ont brutalement montré les attaques commises à Oslo (Norvège) en juillet 2011, un individu motivé est capable de planifier et d'infliger des préjudices dévastateurs sans que les forces de l'ordre en aient vent au préalable. Des incidents mettant en cause des tireurs solitaires aux États-Unis et dans d'autres pays témoignent du pouvoir destructeur et de l'efficacité que peuvent avoir les attentats spontanés commis au moyen d'armes de faible calibre par un individu seul n'ayant suivi aucune formation ou presque. Certains auteurs de violences extrémistes ayant grandi sur le sol même du pays cible sont mus par un désir de vengeance ou de notoriété plutôt que par le souci de défendre une idéologie.
***** que les individus solitaires qui utilisent des armes à feu offertes dans le commerce ou des engins explosifs artisanaux de conception rudimentaire contre des cibles familières et peu protégées posent une menace évidente et immédiate, puisque les attentats de ce genre ne nécessitent pas un important travail de planification et de préparation. En outre, les extrémistes solitaires révèlent rarement leurs intentions à l'avance, ce qui réduit la possibilité pour les organismes d'application de la loi de les repérer et de prévenir leurs attentats. Ce genre d'acteur est bien plus difficile à repérer et à stopper qu'une cellule ou un groupe terroriste traditionnel.
Indicateurs potentiels
Les individus solitaires se cachent sous des traits divers, embrassent des idéologies de toute sorte et sont actifs partout dans le monde. Ils ne correspondent à aucun profil particulier, mais certaines caractéristiques sont courantes chez bon nombre d'entre eux. Celles qui figurent sur la liste suivante (utilisée au sein de la Police fédérale de la GRC) peuvent justifier un signalement et devraient éveiller des inquiétudes lorsqu'elles sont observées chez un individu :
Manifestation de comportements anti-gouvernement ou anti-religion, de préjugés raciaux ou de comportements perturbateurs qui sont apparents à l'entourage.
Utilisation des diverses formes de médias extrémistes qui existent. Les personnes qui souhaitent commettre des actes terroristes tirent souvent leur inspiration et leur formation de ces sources, qu'il s'agisse de livres, de DVD, de CD ou de forums ou de publications dans Internet.
Tendance à avoir de la difficulté à travailler avec les autres ou à les fréquenter socialement. Souvent, les loups solitaires vivent seuls, en marge de la société. Certains peuvent se joindre à un groupe extrémiste puis le quitter à cause de conflits. Ils peuvent adopter un mode de vie complètement nouveau et s'isoler de leurs pairs et de leur famille.
Publication de manifestes. La communication d'une idéologie extrémiste est une priorité pour certains loups solitaires qui veulent se faire entendre auprès du public.
Promotion accrue d'actes de violence envers la société et les systèmes gouvernementaux qui mène souvent à une nouvelle acceptation du recours à la violence comme moyen de faire passer un message.
Acquisition de quantités excessives d'armes ou d'explosifs.
Conviction persistante de corriger une injustice perçue. Il se peut qu'un loup solitaire ne se contente pas de parler de corriger un problème, mais qu'il intervienne par la force dans l'espoir de se faire le héros de sa cause.
Combien de ces indicateurs Justin Bourque présentait-il avant la tuerie? Il avait exprimé des vues hostiles au gouvernement et à la police. Il ne semble pas avoir suivi les courants de pensée exprimés dans les médias extrémistes, mais plutôt ceux de la droite politique américaine dans les médias sociaux. L'Improvised Munitions Handbook de l'armée américaine est le seul livre qui se trouvait dans sa résidence. Il avait de la difficulté à garder un emploi et a connu des conflits avec plusieurs superviseurs. Il avait quitté le foyer de ses parents et se considérait comme le mouton noir de la famille, mais il restait en contact avec ses proches, il avait un cercle d'amis et les gens de son entourage le décrivent comme une personne sociable. Ses écrits ne constituent pas un manifeste; il a surtout publié dans Facebook les paroles de chansons heavy metal et des affiches de propagande typiques des médias sociaux prônant l'opposition au contrôle des armes à feu et au gouvernement. Il avait commencé à acheter des armes à feu bien avant sa décision de s'attaquer à la police. Il estimait en effet combattre une injustice perçue.
On dit souvent que les démarches de planification entreprises par un loup solitaire offrent la possibilité aux forces de l'ordre de flairer un attentat imminent; est-ce que de telles démarches sont passées inaperçues dans le cas de Justin Bourque? En mai, il avait reçu un important remboursement d'impôt qu'il a utilisé en grande partie pour payer des comptes en souffrance. S'il avait été en train de préparer un affrontement avec la police à ce moment-là et qu'il avait utilisé l'argent pour acheter du matériel spécialisé (par exemple un gilet pare-balles) à cette fin, la police se serait intéressée à lui, en supposant qu'elle eût été mise au courant de la situation. Après avoir acheté 70 cartouches, *****. Jusque tard dans l'après-midi du 4 juin, rien ne donnait à penser qu'il pouvait avoir un projet précis en tête. Il n'y avait donc aucune démarche de planification à relever.
Motifs politiques et idéologie
Justin Bourque a décidé de tuer des policiers parce qu'il les considérait comme les exécutants d'un gouvernement trop puissant. Il avait exprimé ses opinions politiques sur Facebook et en avait fait part à ses proches. Tandis qu'il tuait des policiers, il a dit à des civils qu'il s'en prenait seulement à des « government officials » (des représentants du gouvernement) . Il a plus tard demandé : « bring me more cops » (amenez-moi d'autres flics ). Dans l'aveu qu'il a fait après son arrestation, il a parlé des facteurs politiques qui l'avaient motivé et de son idéologie.
Des enquêteurs de la Section des enquêtes de sécurité nationale ont été appelés à intervenir à la lumière des actions et des propos de Justin Bourque avant et pendant l'incident. Ils n'ont trouvé aucune information permettant de le relier à un groupe extrémiste et n'ont pas enquêté sur ses comportements du 4 juin dans une optique d'attentat terroriste. Le Programme des crimes majeurs de la Division J a traité l'affaire comme un homicide multiple et a mené l'enquête avec l'aide de ressources venant d'autres divisions. Trois accusations de meurtre au premier degré et deux accusations de tentative de meurtre ont été portées contre Justin Bourque.
Même quand la police ne découvre chez un suspect aucun lien antérieur avec un groupe extrémiste, elle doit envisager d'examiner ses actions sous l'angle de ses motifs politiques et de son idéologie.
Section 12 : Assistance post-traumatique offerte aux employés
Question du commissaire : À la lumière de l'assistance offerte aux employés et à leur famille après l'incident, y aurait-il des améliorations à apporter à ce chapitre?
La tuerie de Moncton est un incident traumatique qui a profondément marqué beaucoup de personnes. On entend par incident traumatique toute situation suffisamment bouleversante pour rendre inefficaces les mécanismes d'adaptation habituels d'un individu ou d'un groupe. Il s'agit généralement d'un incident soudain, qui provoque une forte réaction émotive et qui dépasse les limites ordinaires du vécu. De telles situations peuvent avoir une grande incidence psychologique, même sur des personnes expérimentées et bien formées.
La direction de la Division J a reconnu très tôt après la tragédie qu'il fallait prendre des mesures immédiates pour répondre aux besoins des employés et de leur famille.
Le personnel des Services de santé au travail (SST) de la Division J et le psychologue en chef du Programme national de santé au travail de la GRC, qui se trouvaient à Moncton, ont entrepris de coordonner une intervention immédiate. Ils se sont rendus à l'hôpital pour offrir un soutien aux familles des victimes. Des dispositions ont été prises pour mobiliser des ressources locales, du personnel de soutien des SST des divisions B, H et L, ainsi que des agents de soutien entre pairs possédant une solide expérience en assistance post-traumatique auprès d'employés et de leur famille.
Conformément au Guide des mesures à prendre au décès d'un membre, des représentants des relations fonctionnelles (RRF) des divisions J, L et H ont été dépêchés à Moncton pour offrir un soutien aux familles des défunts, de même qu'aux membres blessés et aux familles de ces derniers. Comme le prévoit le Guide, trois membres proches des défunts et de leur famille ont été chargés d'assurer la liaison avec les familles.
La surintendante (surint.) Marlene Snowman, chef du Détachement de Codiac, s'est immédiatement rendue à l'hôpital de Moncton pour voir les blessés. Elle a également entrepris de coordonner la prestation de services d'assistance aux employés du Détachement et aux familles de ces derniers, y compris les annonces à faire aux plus proches parents des victimes. Vu l'évolution rapide de la situation et le besoin d'assurer la sécurité aux différents endroits où s'étaient déroulés les événements, la surint. Snowman a eu du mal, au cours des premières heures, à obtenir l'information dont elle avait besoin pour déterminer avec certitude quels membres avaient été tués. Elle a attendu d'avoir parlé personnellement aux membres qui se trouvaient sur place avant de confirmer quoi que ce soit aux familles des membres tombés sous les balles. Les familles ont trouvé l'attente pénible, mais elles ont compris l'explication qui leur a été donnée plus tard, à savoir que si les réponses avaient tardé, c'était en raison de la difficulté de confirmer avec une certitude absolue ce qui s'était produit tant que le tueur était encore en liberté et que les lieux des fusillades demeuraient inaccessibles au personnel médical et à la plupart des membres.
Le lendemain, une équipe dirigée par les Services de santé de la Division J et composée de professionnels de la santé mentale et d'agents de soutien entre pairs de la GRC, tous formés à la gestion du stress après un incident critique (GSIC), s'est présentée à l'hôpital pour offrir un soutien aux familles des victimes. Outre l'établissement d'un plan de gestion de la santé psychologique des employés et de leur famille, la présence de cette équipe a permis d'offrir immédiatement des consultations d'urgence individuelles. L'équipe a par ailleurs animé une série continue de séances d'aide après un stress causé par un incident critique (SASIC) et de séances de premiers soins psychologiques dans les jours et les semaines qui ont suivi. Au cours d'une SASIC, on cherche à calmer la détresse, à faciliter la normalisation psychologique, à fournir des renseignements utiles sur la gestion du stress, à faire connaître les ressources d'aide externes et à rétablir la cohésion et le rendement du service dont les membres ont été touchés par un incident traumatique. Il ne s'agit pas d'une séance de psychothérapie ou de consultation, mais d'un processus de soutien collectif.
Après la capture du tireur, la haute direction a immédiatement accordé 14 jours de congé administratif à tout le personnel de Codiac. Cette décision se fondait sur deux facteurs : la reconnaissance de l'effet que pouvait avoir la tragédie sur la santé mentale des employés et le besoin de maintenir les services de police normaux prévus dans le contrat avec Codiac. Le congé administratif a permis aux membres qui étaient intervenus dans l'incident de préparer leurs déclarations et de rédiger leurs notes sans avoir à s'occuper de fonctions générales. Surtout, il a donné le temps nécessaire à la Division J pour fournir des services de santé mentale aux employés dès que possible sans réduire le niveau de service attendu dans la communauté. Les employés ont ainsi pu participer à des SASIC, à des consultations individuelles et à des échanges de soutien entre pairs et passer du temps avec leur famille sans la pression supplémentaire de devoir se présenter au travail à travers tout le reste. La haute direction voyait ces mesures comme des éléments essentiels à la guérison des employés et à la pleine reprise des activités opérationnelles à Codiac dans les plus brefs délais possible.
Les services d'assistance post-traumatique offerts aux employés et à leur famille par l'intermédiaire des Services de santé de la GRC et d'autres programmes s'inscrivent principalement dans une philosophie de GSIC. La GSIC est un modèle efficace d'intervention d'urgence qui vise à atténuer les répercussions des incidents traumatiques sur les employés et leur famille. Les programmes en la matière sont coordonnés par les médecins-chefs de chaque division. Les services d'évaluation et de traitement suivants ont été et continuent d'être offerts aux employés touchés et à leur famille :
Évaluation obligatoire des membres touchés par un psychologue agréé.
Accès direct au praticien médical ou psychologique de leur choix au Canada, y compris à des consultations individuelles, collectives, conjugales ou familiales.
Services d'aide aux pairs fournis avec la participation de professionnels de la santé et d'agents qualifiés de soutien par les pairs, y compris d'intervenants en GSIC.
Accès aux Services d'aide aux employés de Santé Canada, qui fournissent à titre contractuel des services de consultation à court terme, d'évaluation et d'aiguillage, tant aux employés de la GRC qu'à leurs conjoints et personnes à charge. Deux cliniciens de Santé Canada ont été disponibles sur place pendant deux jours.
Soins professionnels continus d'ordre psychologique ou médical après l'incident pour les employés touchés.
Pour faciliter la prestation de services de soutien, un endroit sûr a été mis à la disposition des employés et des familles touchés afin qu'ils puissent se réunir entre eux, ainsi qu'avec des conseillers et des agents de soutien par les pairs. Le 6 juin 2014, des dispositions ont été prises pour fournir les services de soutien depuis un immeuble de l'Université Crandall à Moncton, qui convenait parfaitement à la tenue des séances d'information et des SASIC destinées aux employés directement touchés par l'incident et aux familles de ces derniers. Pour des raisons de sécurité et de confidentialité, deux membres réguliers ont été chargés de surveiller l'entrée de l'immeuble. Cette mesure a été bien accueillie et s'imposait pour assurer la confidentialité des rencontres et pour donner un sentiment de sécurité aux employés et aux familles touchés. Les services ont d'abord été offerts en anglais seulement, mais au bout de quelques jours, l'équipe fournissait un service bilingue.
Après la tuerie, de nombreux membres d'autres divisions de la GRC se sont rendus à Moncton pour remplir diverses fonctions, y compris assurer la relève à Codiac et participer à l'enquête. Certains ont assisté à des séances d'aide pendant leur séjour. Ceux qui ne l'ont pas fait ont été recensés et font l'objet d'un suivi par le bureau des SST de leur division d'attache.
Le centre d'aide a exercé ses activités dans un contexte administratif complexe. Les participants aux SASIC appartenaient à différentes catégories d'employés et la facturation des services a fait intervenir plusieurs assureurs, ce qui a créé des problèmes de gestion. Les séances de consultation collective ont accueilli des employés de toutes les catégories ainsi que leurs familles, mais elles ont été facturées globalement et aucune ventilation des frais n'est possible. Il faudra établir des directives nationales quant à la gestion future des services de ce genre. Les intervenants qui en ont été chargés dans cette situation particulière ont su trouver des solutions et méritent que leur ténacité à cet égard soit reconnue. Beaucoup de personnes autres que des membres réguliers contribuent de façon importante à la prestation des services de police et elles doivent aussi pouvoir recevoir un soutien post-traumatique dans le cadre d'un programme établi à cette fin. On fait peser sur elles un stress indu quand on leur dit, à elles ou à leur famille, qu'elles ne sont pas assurées pour les services dont elles ont besoin.
Les employés municipaux qui avaient été directement touchés par l'incident ont eu le sentiment de ne pas avoir droit aux mêmes services que les autres. En se présentant au centre d'aide le matin suivant la tuerie, les employés de la station de transmissions opérationnelles (STO) ont été troublés de voir que leurs noms ne figuraient pas sur la liste qui y était affichée. Les semaines suivantes ont également vu surgir des questions concernant les congés de maladie de ces employés. Ces questions n'ont eu aucune incidence sur les membres et elles ont fini par se régler, mais le temps qu'on apporte les correctifs requis, les employés visés ont inutilement subi un stress supplémentaire pendant une période déjà bien assez difficile. Il est recommandé d'entreprendre une discussion avec les municipalités à ce sujet avant que survienne une autre crise. Les employés des STO savent que la moindre erreur de leur part peut mettre en danger la vie des policiers qu'ils sont appelés à seconder. En raison de ce poids, ils développent un lien étroit avec ces derniers et se soucient énormément de leur sécurité. Ils devraient sentir qu'ils sont des membres à part entière de l'équipe.
Le psychologue de la Division J a fourni des soins continus aux familles des membres décédés et à d'autres non-membres touchés par l'incident. La prestation d'un tel soutien ne faisant toutefois pas partie des fonctions de base des Services de santé de la GRC, il s'agit d'une activité qui dépasse l'éventail des services offerts et les capacités du personnel disponible.
Le programme des Services de santé de la GRC assure un soutien aux membres réguliers et aux membres civils de l'organisation, mais pas aux familles de ces membres ni aux autres catégories d'employés. Une protection est également offerte aux employés de la fonction publique, aux personnes à charge et aux employés municipaux ou contractuels pour la prestation de soins psychologiques; cette protection s'inscrit toutefois dans un programme distinct, ce qui peut créer un sentiment d'inégalité chez les employés. À ces personnes s'ajoutent les intervenants qui n'ont aucune assurance par l'intermédiaire de la GRC, mais que l'incident peut avoir touchés à divers degrés; c'est le cas des gendarmes auxiliaires, des autres bénévoles et de certains employés contractuels.
Bien qu'il n'existe aucun mécanisme officiel pour compléter le soutien offert aux personnes qui tombent dans l'un ou l'autre de ces groupes, les Services de santé de la Division J ont fourni certaines formes d'assistance sur demande en cas de besoin. De plus, par l'intermédiaire de l'officier responsable du Détachement de Codiac, le service des ressources humaines de la Ville de Moncton a organisé une assistance semblable pour tous les employés municipaux dans le cadre de son programme d'aide aux employés, afin que les employés en question aient droit à un soutien comparable à celui qu'offrait la GRC et qu'ils soient inclus dans les interventions visant l'ensemble de l'équipe, ce qui est essentiel pour composer avec les éventuelles retombées psychologiques d'un incident comme celui-ci.
Cette assistance a également été étendue au Corps des commissionnaires et aux gendarmes auxiliaires du Détachement de Codiac, quoique pas immédiatement après l'incident. Il faudra se pencher plus longuement sur cette question dans une perspective nationale, car il se peut que toutes les municipalités ne réagissent pas de la même façon ni aussi rapidement.
Au cours des semaines qui ont suivi l'incident, le personnel de Perfectionnement et Renouvellement (PR) a rencontré les membres qui en avaient exprimé le désir afin de déterminer comment ils entrevoyaient leur avenir, sachant que certains demanderaient à être mutés ailleurs à leur retour au travail. Un comité regroupant l'officier responsable du Détachement de Codiac ainsi que des représentants de PR et des Services de santé s'est ensuite réuni pour passer en revue les résultats de ces rencontres et établir des priorités en reconnaissance du besoin immédiat de dresser un plan sur trois à cinq ans pour chaque membre interviewé. Il s'agit là d'une décision importante prise dans le souci du bien-être des employés.
Avant la date fixée pour le retour au travail, l'officier responsable du Détachement de Codiac a tenu une assemblée générale à l'intention des employés municipaux. Le représentant syndical, celui des Ressources humaines et le maire de Moncton étaient présents. Une autre assemblée générale a eu lieu pour les membres réguliers et les membres civils le même jour, sous le regard du commandant divisionnaire, de l'officier responsable des enquêtes criminelles, de l'officier responsable du Détachement de Codiac et de plusieurs officiers brevetés. Ces rencontres ont suscité de fortes émotions, mais elles étaient nécessaires, et elles ont contribué à la communication de l'information et au processus de guérison.
Quand les membres étaient prêts à reprendre le travail, ils ont subi une évaluation psychologique officielle pour déterminer leur aptitude à faire face aux changements qui les attendaient au Détachement, y compris la présence d'employés de relève qu'ils ne connaissaient pas nécessairement et l'absence d'un grand nombre de collègues. Cette évaluation a comporté un entretien avec un psychologue.
En collaboration avec la clinique des traumatismes liés au stress opérationnel du Nouveau-Brunswick dont les services avaient été retenus par voie contractuelle, la Division J a élaboré un questionnaire efficace qui est envoyé à l'ensemble de ses membres toutes les deux semaines pour qu'ils y répondent à titre volontaire. Les réponses sont analysées afin de déterminer si l'état de santé psychologique du membre visé a changé depuis le dernier questionnaire et une infirmière en santé du travail fait rapidement un suivi. Ce service, assuré par les SST de la GRC, n'est pas offert aux employés de la fonction publique, aux employés municipaux ou aux familles des employés.
Les membres du Détachement de Codiac ont également pu participer à une séance de discussion avec des policiers ayant vécu des incidents semblables, soit des agents retraités qui avaient connu les meurtres par balle de policiers de Moncton en 1974 et des membres en service actif touchés par la tuerie de Mayerthorpe et la fusillade de Hay River. Environ 30 membres du Détachement de Codiac y ont assisté, de même que le commandant de la Division J. D'après les commentaires recueillis à son sujet, cette rencontre a permis à tous d'échanger sur les stratégies possibles pour composer avec les séquelles d'un incident traumatique.
Dans l'ensemble, les services d'assistance fournis aux employés et aux familles touchés après l'incident étaient bien coordonnés et adaptés aux besoins des personnes visées.
Il faut souligner que l'efficacité de ces services est attribuable au dévouement des intervenants qui ont fait le nécessaire pour en assurer la prestation. Les Services de santé de la Division J et le psychologue en chef étaient sur place et ont pu contourner beaucoup d'obstacles qui auraient compliqué les choses s'ils n'avaient pas été là pour s'en occuper. Il y a lieu de procéder à un examen national des politiques et des procédures visant les incidents de cette nature afin de simplifier les modalités établies, surtout en ce qui concerne les services d'assistance post-traumatique à fournir aux différentes catégories d'employés et aux familles.
Recommandations
12.1 Il est recommandé d'élaborer un guide national pour définir les rôles et les responsabilités des gestionnaires et des intervenants chargés de mettre en œuvre une stratégie d'assistance à la suite d'un incident traumatique et pour leur donner des conseils à cet égard, y compris en ce qui concerne l'établissement d'un plan de déploiement rapide et échelonnable et le besoin d'envisager des mesures à long terme en préparation à des événements importants comme le premier anniversaire de la tragédie.
12.2 Il est recommandé de mettre à jour le Guide des mesures à prendre au décès d'un membre en portant attention aux éléments suivants : présentation de comptes rendus opérationnels aux familles; visite possible du lieu de travail des membres décédés avec leur famille; gestion des fleurs, des cartes et des cadeaux; communication de renseignements sur le service commémoratif de la Division Dépôt et sur le service commémoratif des policiers et des agents de la paix à Ottawa.
12.3 Il est recommandé que l'équipe de gestion du stress après un incident critique (GSIC) soit composée de psychologues expérimentés ayant connaissance du travail policier, d'agents de soutien par les pairs expérimentés de la GRC, d'aumôniers de la GRC et d'infirmières, tous formés en GSIC.
12.4 Il est recommandé d'élaborer un plan prévoyant des mesures de suivi continu à intervalles déterminés pendant la première année suivant un incident et dans le cadre des évaluations périodiques de santé des membres directement concernés. Il y aurait lieu d'envisager l'utilisation du questionnaire mentionné dans la présente section de l'examen.
12.5 Il est recommandé d'entreprendre un examen des modalités régissant la prestation de services d'assistance post-traumatique aux personnes touchées, notamment les employés municipaux, les gendarmes auxiliaires, les bénévoles et les familles des différents intervenants.
12.6 Il y aurait lieu d'envisager des mesures pour faire en sorte que les membres incapables de retourner au travail soient tenus au courant des informations pouvant les concerner.
12.7 Il est recommandé qu'un psychologue s'entretienne avec les employés avant leur retour au travail pour les préparer aux changements qui les attendent par suite de l'incident traumatique.
12.8 Il est recommandé qu'une équipe de GSIC n'ayant pas participé à l'opération tienne une séance de soutien post-intervention pour le personnel chargé des séances d'aide tenues dans le cadre de l'opération. Cette séance devrait avoir lieu une fois l'opération terminée, de préférence avant que les intervenants retournent dans leur service d'attache.
12.9 Quand un employé est tué dans l'exercice de ses fonctions, il y a déclenchement de mécanismes de rémunération qui entraînent l'envoi automatisé de messages et de lettres à sa famille au sujet de l'annulation de certaines prestations. Ces processus automatisés manquent de délicatesse et causent un stress indu à la famille. Il est recommandé de procéder à leur examen afin que soient évitées de telles situations.
12.10 Après le décès d'un membre de la GRC, sa famille doit remplir beaucoup de paperasse et satisfaire à diverses exigences de procédure. Il est recommandé de désigner un agent de liaison pour l'aider à remplir tous les documents requis.
12.11 Quand un membre est tué ou qu'il subit une blessure physique ou un traumatisme psychologique et qu'il n'est par conséquent pas en mesure de s'occuper des réclamations relatives aux rendez-vous de son conjoint ou de ses enfants, ces derniers n'ont pas accès à la protection offerte par son assurance et doivent se fier à une assurance privée. Dans certains cas, cette assurance ne prévoit le remboursement que de cinq à sept heures de services psychologiques par année. Il est recommandé d'apporter des correctifs pour éliminer le fardeau que ce financement insuffisant fait peser sur la famille des membres.
Section 13 : Mise en œuvre des recommandations formulées à la suite de l'incident de Mayerthorpe
Question du commissaire : Est-ce que certaines des recommandations ou des leçons dégagées de l'incident de Mayerthorpe présentent un intérêt particulier pour ce dossier?
Au départ, l'équipe d'examen devait uniquement se pencher sur les liens que présente l'incident de Moncton avec les leçons et recommandations dégagées de la tuerie de Mayerthorpe (Alberta), qui avait coûté la vie à quatre membres de la GRC en 2005, mais elle a aussi passé en revue les recommandations faisant suite au meurtre de deux membres à Spiritwood (Saskatchewan) en 2006. Cet incident présente d'importants points communs avec la situation vécue à Moncton, ce qui le rend particulièrement pertinent.
L'équipe d'examen s'est intéressée aux différents travaux concernant ces deux incidents antérieurs : enquêtes médico-légales, enquête de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, rapports de l'Équipe d'enquête sur les situations comportant des risques (EESR) et examens menés par des officiers indépendants. Tous ces travaux avaient donné lieu à des recommandations en fonction desquelles les centres de décision nationaux de la GRC ont par la suite revu leurs programmes. Le présent examen portait sur la suite donnée aux recommandations visant les politiques nationales, la formation et l'équipement. Il ne suffit pas de tirer des leçons d'une tragédie; il faut ensuite corriger efficacement les faiblesses constatées. La Gendarmerie a le devoir de prendre les mesures voulues pour protéger ses membres, et ce, sans tarder, non seulement pour des raisons légales, mais pour respecter son engagement moral à l'égard de ces personnes qu'elle expose au danger.
Certaines des recommandations issues des incidents antérieurs ne présentaient aucun lien avec la tuerie de Moncton, mais d'autres étaient pertinentes, et elles sont présentées ci-dessous.
C'est le cas des changements suivants apportés aux politiques de la GRC et à ses programmes de formation :
Sécurité générale des lieux de crime
Dans le rapport publié en 2011 à la suite de son examen de l'incident de Mayerthorpe, le juge Pahl a recommandé que la GRC envisage d'établir des politiques nationales sur la protection des éventuels lieux de crime. La GRC a modifié en conséquence sa politique sur la sécurité générale des lieux de crime le 23 avril 2014. L'incident survenu à Moncton s'est déroulé en plusieurs endroits, mais aucune indication ne porte à croire que les membres étaient conscients de la nouvelle politique ou qu'ils l'ont appliquée.
Coordonnateurs de l'évaluation des menaces dans les détachements
À la suite de son examen de l'incident de Mayerthorpe, le juge Pahl a recommandé que chaque détachement désigne un membre (et non un employé d'une autre catégorie de personnel) pour remplir la fonction de coordonnateur de l'évaluation des menaces. La GRC a modifié sa politique à cet égard en mars 2013. La nouvelle politique confie la responsabilité de l'analyse et de la tenue des dossiers sur les menaces au Groupe des analyses criminelles ou au Groupe de la réduction de la criminalité du détachement, ou encore au responsable désigné de la coordination de l'évaluation des menaces. Comme il a déjà été mentionné, Justin Bourque n'aurait pas pu être repéré dans le cadre d'activités d'évaluation des menaces puisque ni sa famille ni ses amis n'avaient porté son cas à l'attention de la police ou de professionnels de la santé mentale.
Déploiement du Groupe tactique d'intervention (GTI)
En 2008, le surintendant (surint.) Head a recommandé, à la suite de son examen indépendant de l'incident de Mayerthorpe, que les responsables du Programme des incidents critiques des Services de police communautaires, contractuels et autochtones (SPCCA) examinent les pratiques nationales quant au déploiement des GTI et établissent des lignes directrices ou une politique afin d'assurer le respect des normes de service appropriées dans toutes les régions. La GRC a par la suite modifié sa politique sur le déploiement des GTI.
Il existe maintenant, pour les situations en cours de déroulement, un protocole structuré selon lequel le chef de détachement ou de service ou son représentant communique avec la station de transmissions opérationnelles (STO), qui se charge de mettre le commandant des interventions critiques (CIC) de garde en contact avec le détachement ou le service demandeur. La décision de recourir ou non au GTI est prise par le CIC, après discussion avec le détachement ou le service demandeur. Une fois la décision prise de déployer le GTI ou toute autre ressource de soutien, l'ordre est donné par téléphone cellulaire ou par téléavertisseur. En raison de l'abandon progressif du téléavertisseur, de nouvelles technologies sont en voie de mise en œuvre afin d'assurer la transition sans heurts à une méthode de déploiement offrant une efficacité égale ou supérieure. Le processus de déploiement est revu de temps à autre afin de vérifier que la technologie la plus efficace est utilisée pour mobiliser les CIC, les GTI, les équipes de négociation en situation de crise (ENSC) et les groupes des interventions médicales d'urgence (GIMU), entre autres ressources. Dans le cas de l'incident survenu à Moncton, le déploiement du GTI s'est fait conformément à la politique en vigueur.
Groupe des interventions médicales d'urgence (GIMU)
À la suite de son examen de l'incident de Mayerthorpe, le juge Pahl a recommandé que tous les GTI comptent au moins un membre formé aux interventions médicales d'urgence. La GRC a donc modifié sa politique sur les interventions médicales d'urgence en 2011. Depuis 2013, chaque GTI compte au moins un membre qui a suivi une formation de trois jours sur la gestion tactique des blessés. Cette formation avancée porte sur des techniques telles que le pansement de blessures et l'application de tourniquets. Le CIC de garde détermine s'il y a lieu de déployer un GIMU. Dans le cas de l'incident survenu à Moncton, un GIMU était rattaché au GTI, mais il n'a pas traité les membres blessés.
Coups de feu accidentels
L'officier qui a mené l'examen indépendant à l'égard de l'incident de Mayerthorpe a recommandé que les responsables du Programme des incidents critiques des SPCCA élaborent une politique nationale sur les coups de feu tirés accidentellement par un membre de GTI pendant une formation ou une intervention. Aucune modification n'a été apportée à la politique applicable de la GRC, en vigueur depuis le 30 mars 2007, car elle précise que « le membre qui décharge délibérément ou accidentellement une arme à feu lors d'un événement autre que ceux autorisés à l'art. 2.3. et à l'art. 2. du chap. 4.9., doit en signaler immédiatement les circonstances à son chef ». La GRC prend très au sérieux les coups de feu tirés accidentellement et traite chaque cas de ce genre comme une fusillade impliquant un membre. Les membres des GTI étant assujettis à cette politique, aucune politique supplémentaire n'a été élaborée expressément à leur intention. Comme on le mentionne dans la section sur la formation, il y a eu décharge accidentelle d'un fusil au cours de l'incident survenu à Moncton. Le coup de feu en question a par la suite fait l'objet d'une déclaration et d'une enquête.
Port de l'uniforme
L'EESR qui s'est penchée sur l'incident de Mayerthorpe a recommandé que des directives semblables à celles énoncées dans la politique de la Division K soient établies à l'échelle nationale. Cette politique prévoit ce qui suit : [traduction] « chaque membre porte une arme de poing lorsqu'il est de service, à moins qu'il soit affecté à des fonctions administratives ou d'identité judiciaire à temps plein. Le membre régulier ou le gendarme spécial qui remplit des fonctions en civil doit porter les vêtements et l'équipement de protection individuelle que le commandant juge convenable. Le membre qui travaille en civil doit avoir accès au même matériel d'intervention que celui qui travaille en uniforme. » La politique actuelle et les exigences relatives à la tenue de service no 1 sont abordées dans les sections du présent rapport qui concernent l'équipement et les initiatives générales visant les politiques. Bien que la politique susmentionnée n'ait pas été un facteur dans la demande d'intervention initiale faite à Moncton, quelques membres se sont rendus sur les lieux de l'incident ou au bureau sans tout leur matériel.
Évaluation des risques
À la suite de son examen de l'incident de Mayerthorpe, le juge Pahl a recommandé qu'une méthode normalisée d'évaluation des risques soit élaborée pour les opérations planifiées à haut risque. Une liste de vérification normalisée pour l'évaluation des risques a été établie et est accessible à tous les membres dans le Manuel des opérations. Cette liste a été publiée sous forme de politique nationale le 23 avril 2014. Comme elle vise les opérations planifiées, elle ne s'appliquait pas à l'incident de Moncton.
Coups tirés de l'intérieur d'un véhicule de police
L'enquête sur la conformité au Code canadien du travail réalisée à la suite de l'incident de Spiritwood a donné lieu à la conclusion suivante : [traduction] « À la suite de l'enquête sur les blessures par balle infligées aux policiers du Détachement de Spiritwood de la GRC le 7 juillet 2006, une incohérence a été constatée entre, d'une part, les versions 4 et 6 du manuel écrit de l'instructeur de tir du Groupe de formation aux armes à feu, et, d'autre part, l'opinion professionnelle du serg. Nick Roy, instructeur de tir et analyste de programmes de formation, quant à la procédure visant l'emploi d'une force meurtrière immédiate en dernier recours. *****. L'employeur examinera et modifiera au besoin le programme de formation visant les situations où il est nécessaire d'employer une force meurtrière immédiate en dernier recours depuis l'intérieur d'un véhicule. » La GRC a par conséquent modifié sa politique sur le tir de coups de feu depuis l'intérieur d'un véhicule de police.
Le programme de formation de la Division Dépôt a été modifié de façon que les instructeurs abordent la nécessité de prendre en compte l'ensemble des circonstances de chaque cas avant de décider s'il convient de procéder ainsi. Le gend. Ross a tiré par le pare-brise de son véhicule, en conformité avec la politique.
Modèle d'examen par un officier indépendant
L'officier indépendant qui a examiné l'incident de Mayerthorpe a recommandé que la Section des politiques opérationnelles des SPCCA crée un modèle national pour la réalisation d'examens par un officier indépendant et y intègre des liens vers la politique applicable. Cette recommandation a fait l'objet d'un suivi qui n'a cependant jamais abouti à sa mise en œuvre. L'auteur du présent rapport estime qu'un tel modèle serait utile à titre de point de départ, pourvu qu'il puisse être adapté aux circonstances particulières de chaque incident.
Modifications apportées à l'équipement
La mise en œuvre de certaines recommandations a nécessité l'exécution de recherches approfondies et la détermination d'un modèle de financement, ce qui a requis la présentation d'analyses de rentabilisation et l'obtention des approbations voulues auprès de cadres supérieurs en vue d'importants achats d'équipement. Conformément aux procédures d'acquisition du gouvernement fédéral, les analyses de rentabilisation devaient reposer sur des données solides et défendables. Elles devaient également démontrer que la solution proposée permettrait d'optimiser la prestation de service dans le souci du bien-être des employés et de la saine gestion financière. La nécessité de respecter ces exigences a compliqué le processus d'acquisition et retardé considérablement la distribution de l'équipement recommandé au personnel de première ligne. Cette lenteur à obtenir l'équipement requis, surtout les carabines de patrouille et les gilets pare-balles rigides (GPBR), a soulevé beaucoup de préoccupations chez les membres de la GRC et au sein de la population. Beaucoup de personnes trouvent que la distribution de ces articles aux membres de première ligne de la GRC prend trop de temps. Des membres ont exprimé leurs inquiétudes à ce sujet en entrevue, soulignant que les incidents graves survenus à Mayerthorpe et à Spiritwood avaient clairement fait ressortir la nécessité d'adopter une arme de plus longue portée et un GPBR à protection améliorée. Le 4 juin 2014, les membres du Détachement de Codiac n'avaient pas accès à des carabines pour les fonctions policières générales.
Gilets pare-balles
L'EESR qui s'est penchée sur la tuerie de Mayerthorpe a recommandé que les membres se voient offrir la possibilité de porter un gilet pare-balles offrant une protection balistique accrue lorsqu'ils s'estiment en présence d'une menace justifiant une telle précaution. La question de l'équipement protecteur a aussi été mentionnée lors de l'enquête sur la conformité au Code canadien du travail qui a fait suite à l'incident de Spiritwood. La GRC s'est conformée à cette recommandation et un contrat a été attribué en vue de l'acquisition de GPBR. Le contrat prévoyait, pour chacune des trois années suivant l'exécution de la commande initiale, la possibilité de passer une commande subséquente de 1 000 GPBR. Certaines difficultés se sont manifestées relativement au distributeur, mais au moment de la rédaction du présent rapport, il y avait environ 5 000 GPBR dans les divisions. Le 4 juin 2014, chaque véhicule de police du Détachement de Codiac contenait ***** GPBR (parfois encore dans l'emballage d'origine). L'acquisition de ces GPBR remonte à 2013. La GRC s'était conformée aux recommandations en la matière. La familiarisation des policiers avec cet article vital de leur équipement a déjà été abordée. Pendant l'incident de Moncton, là où *****, ils ont dû décider lequel d'entre eux porterait le GPBR. Ce genre de situation ne devrait jamais se produire, puisque chaque membre devrait avoir accès à un GPBR. Le Détachement de Codiac procède actuellement à l'acquisition d'un GPBR pour chacun de ses membres.
Carabine de patrouille de la GRC
L'examen complet des activités de recherche, d'acquisition et de distribution nationale de la carabine de patrouille est un travail qui dépasse le cadre du présent rapport. La question a toutefois été mentionnée explicitement par les participants à l'intervention du 4 juin, les premiers d'entre eux qui s'étaient rendus sur les lieux de l'incident n'ayant pas disposé d'une carabine de patrouille. Pour cette raison, l'équipe d'examen abordera certains aspects des démarches qui ont mené à l'adoption de cette arme.
Le commissaire adjoint (comm. adj.) Al MacIntyre avait été chargé au départ d'effectuer l'examen indépendant de l'incident de Mayerthorpe, responsabilité qui a par la suite été confiée au surint. Tim Head le 20 mai 2005. Dans ses recommandations préliminaires, le comm. adj. MacIntyre n'a pas mentionné explicitement le besoin de faire approuver d'autres armes à feu ou d'en faire l'acquisition, mais il a proposé que la Division K envisage de mettre en œuvre un programme d'intervention contre les tireurs actifs (PICTA) semblable à celui du Lower Mainland de la Colombie-Britannique, compte tenu de la croissance observée aux alentours de la région métropolitaine d'Edmonton.
Il a souligné que le PICTA du Lower Mainland était formé de membres de GTI jouissant d'un accès immédiat à de plus puissantes armes à canon long, puisqu'ils avaient en tout temps avec eux l'équipement de base du GTI et une arme d'assaut. Il a par ailleurs fait valoir qu'un PICTA assurait la capacité de mener une intervention tactique avec des armes à canon long beaucoup plus rapidement et permettait de réagir immédiatement à un incident en attendant la mobilisation et l'arrivée des autres membres du GTI. Les observations du comm. adj. MacIntyre ne faisaient pas explicitement mention de la distribution de carabines de patrouille aux membres remplissant des fonctions policières générales, mais elles mettaient certainement en relief le besoin de faire intervenir rapidement du personnel bien armé en cas de situation impliquant un tireur fou, et elles ont par conséquent leur place dans la discussion sur l'incident survenu à Moncton. Ces observations soulignaient l'insuffisance des armes à feu utilisées au sein de la GRC pour l'exercice de fonctions policières générales. Après la publication du rapport issu de ce premier examen indépendant de la tragédie de Mayerthorpe, les gend. Robin Cameron et Marc Bourdages ont été tués à Spiritwood par un individu armé d'une carabine. Le 29 août 2007, le comm. adj. Darrell McFadyen, alors commandant de la Division F, a reçu une promesse de conformité volontaire, signée le lendemain, qui prévoyait l'accomplissement des démarches suivantes au plus tard le 29 octobre 2007 :
« À la suite de l'enquête sur les blessures par balle infligées aux policiers du Détachement de Spiritwood de la GRC le 7 juillet 2006, il a été déterminé que l'équipe de récupération avait été exposée à un risque du fait que les policiers entrant dans la zone de tir avaient une puissance de tir inférieure à celle du suspect, qu'ils étaient incapables de repérer ce dernier et que l'équipement protecteur à leur disposition était insuffisant. L'employeur effectuera une évaluation des risques liés aux activités de récupération à haut risque confiées à des policiers dans les situations où un GTI ne peut pas intervenir rapidement, en tenant compte notamment des facteurs suivants : les types d'armes à feu que peuvent utiliser les suspects; les types d'armes à feu dont disposent les policiers; les types d'appareils de vision diurne et de vision nocturne dont disposent les policiers; l'équipement de protection balistique qui peut être requis; les délais acceptables pour l'intervention d'un GTI en région rurale. De plus, l'employeur prendra des mesures de prévention pour pallier les risques recensés lors de cette évaluation, conformément à l'article 19.5 du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail. »
Les incidents de Mayerthorpe et de Spiritwood sont venus s'ajouter au nombre croissant de situations impliquant des tireurs fous qui se produisaient en Amérique du Nord et en Europe. Ces fusillades touchant des membres de la GRC et cette apparente multiplication des cas de tireurs fous ont attiré l'attention sur l'insuffisance des armes à feu mises à la disposition du personnel de première ligne de la GRC et ont déclenché un long processus d'étude, d'acquisition et de distribution visant à fournir une carabine de patrouille aux membres sur le terrain.
Au début de 2007, les SPCCA ont informé la haute direction de la GRC de la nécessité d'évaluer les armes à canon long pouvant convenir aux besoins de la GRC et de se pencher notamment sur les avantages de la carabine semi-automatique par rapport au fusil.
Les SPCCA ont également précisé que « les armes à canon long alors approuvées par la GRC devaient être actualisées afin que les membres soient convenablement outillés pour faire face aux incidents à haut risque mettant en cause des suspects fortement armés, par exemple des tireurs fous ».
Quand le juge en chef adjoint Pahl a publié son rapport sur la tuerie de Mayerthorpe le 3 mars 2011, le besoin d'équiper les membres de carabines de patrouille avait déjà été reconnu et le processus d'acquisition était en cours. Voici un extrait de ce rapport : [traduction] « Les membres de la GRC doivent être convenablement armés. Le fait de mettre des carabines de patrouille à la disposition des membres qui remplissent des fonctions policières générales leur offrirait une capacité d'intervention supérieure à celle qu'ils ont actuellement avec les fusils et les pistolets. Je suis persuadé que la GRC continue à évaluer et à renforcer sa capacité de réagir aux menaces, qui évoluent elles-mêmes constamment. »
Le 4 juin 2014, la Division J disposait d'un certain nombre de carabines et ses membres avaient commencé à suivre le cours de certification concernant le maniement de cette arme. Aucun des premiers intervenants appelés sur les lieux de l'incident de Moncton n'avait accès à une carabine ni n'avait reçu une formation de la GRC sur son maniement. Les ***** carabines acquises pour le Détachement de Codiac étaient toutes utilisées à des fins de formation.
Comme il a déjà été mentionné, il est reconnu que la GRC doit se conformer aux procédures d'acquisition du gouvernement fédéral, faire des recherches, produire des analyses de rentabilisation et déterminer des modèles de financement avant de procéder à l'approbation et à la distribution sur le terrain d'un article aussi important et aussi coûteux qu'une carabine. Chaque division doit aussi passer par diverses voies, dont la Mise à jour annuelle des niveaux de référence, pour faire approuver le financement d'une telle initiative par ses partenaires contractants. Cela dit, le délai nécessaire à la mise en œuvre du projet relatif aux carabines de patrouille, y compris la distribution des armes aux membres et la formation de ces derniers à leur utilisation, a été beaucoup trop long. En octobre 2014, il y a encore des membres de première ligne de la GRC qui n'ont pas accès à une carabine de patrouille et qui n'ont pas suivi la formation connexe.
13.1 Il est recommandé à la GRC de prendre des mesures immédiates pour accélérer la distribution des carabines de patrouille à l'échelle de l'organisation. Ces mesures doivent comprendre une augmentation importante et permanente de la capacité de formation de la Gendarmerie.
L'enquête relative au Code canadien du travail qui a fait suite à l'incident de Spiritwood a donné lieu à la recommandation suivante au sujet des véhicules de police :
« À la suite de l'enquête sur les blessures par balle infligées aux policiers du Détachement de Spiritwood de la GRC le 7 juillet 2006, il a été déterminé que l'installation d'un pare-brise et de fenêtres avant faits de vitre à l'épreuve des balles dans les véhicules de la GRC pourrait éviter des blessures à ses membres. L'employeur effectuera une évaluation des risques liés aux coups de feu tirés en direction et à proximité de véhicules de la GRC, en se penchant notamment sur les éléments suivants : les risques (gravité, fréquence et durée d'exposition) présents dans divers environnements, y compris dans les secteurs urbains, les secteurs ruraux, les détachements, les régions et les divisions; l'équipement de protection dont dispose ou qu'utilise actuellement la collectivité internationale de l'application de la loi à l'intérieur des véhicules, y compris les vitres pour pare-brise et fenêtres avant, les boucliers fixes ou portatifs pour portes avant et les cloisons séparant les sièges avant de la banquette arrière; les types de tirs en cause et le niveau de protection balistique qu'ils exigent. De plus, l'employeur prendra des mesures de prévention afin de pallier les risques recensés lors de cette évaluation, conformément à l'article 19.5 du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail. »
La GRC a effectué des recherches *****. Cependant, le groupe national du Recours à la force a récemment pris connaissance d'une nouvelle technologie plus légère grâce à laquelle il pourrait y avoir moyen d'équiper les véhicules de police de panneaux de porte ou de boucliers pliants à l'épreuve des balles. Ces options sont à l'étude en vue de leur éventuelle mise en application.
Autres recommandations issues des enquêtes sur les incidents de Mayerthorpe et de Spiritwood qui ont été abordées ailleurs dans le présent rapport :
L'enquête relative au Code canadien du travail qui a fait suite à l'incident de Spiritwood a donné lieu à la recommandation suivante, qui fait écho aux conclusions formulées dans le présent rapport :
[Traduction] « À la suite de l'enquête sur les blessures par balle infligées aux policiers du Détachement de Spiritwood de la GRC le 7 juillet 2006, il a été constaté qu'aucun système ne permet aux policiers de déterminer la direction dans laquelle ils circulent et l'endroit où ils se trouvent lorsqu'ils sont à l'intérieur d'un véhicule de la GRC, ni d'être repérés lorsqu'une intervention d'urgence est requise pour leur porter secours en cas d'incapacité. L'employeur effectuera une évaluation des risques liés à la capacité des policiers de déterminer la direction dans laquelle ils circulent et l'endroit où ils se trouvent ainsi que de se faire repérer lorsqu'une intervention d'urgence est requise pour leur porter secours en cas d'incapacité. De plus, l'employeur prendra des mesures de prévention pour pallier les risques recensés lors de cette évaluation, conformément à l'article 19.5 du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail. »
La GRC a affirmé s'être conformée à cette demande. Les capacités des postes de travail mobiles (PTM) dans les véhicules de police et la formation sur la communication entre les membres et la STO ont été jugées suffisantes. *****. De plus, la STO locale n'arrivait pas à suivre les déplacements des membres qui utilisaient un PTM différent ou qui venaient d'une autre division. *****.
Le rapport de situation comportant des risques qui a été rédigé à la suite de l'incident de Mayerthorpe renferme les recommandations suivantes, qui font écho aux conclusions formulées dans le présent rapport [traduction] :
Radiocommunications — Il est recommandé de tout mettre en œuvre, lors de la conception de futurs systèmes de radios portatives, afin d'accroître la portée de ces systèmes, de sorte que les membres puissent appeler des secours lorsqu'ils sont à l'extérieur de leur véhicule, où qu'ils se trouvent à la Division K.
Fréquence de la requalification au tir — Il est recommandé à la GRC d'encourager ses membres à s'exercer plus souvent au tir et d'envisager des façons d'accroître la fréquence de la requalification en la matière.
13.2 Il est recommandé à la GRC d'effectuer une analyse rigoureuse des procédures d'approbation et d'acquisition (y compris les travaux de recherche-développement connexes) qui se rapportent à l'équipement ayant une incidence sur la sécurité du policier. La détermination de l'autorité compétente chargée de la direction tels projets, la formation d'équipes de projet dotées de ressources convenables et l'établissement des échéances à respecter doivent faire partie des éléments abordés dans cette analyse.
Recommandations
Chaque jour, les membres de la GRC aux quatre coins du pays s'exposent personnellement à des risques pour protéger les collectivités qu'ils servent, acceptant d'office les dangers inhérents au métier de policier. Il ne faut donc ménager aucun effort pour leur offrir ce qu'il y a de mieux en fait d'équipement, de formation et de soutien.
Je fais les recommandations suivantes au commissaire de la GRC dans l'espoir qu'elles contribueront à la sécurité des membres et qu'elles amélioreront la qualité des services de soutien offerts à tous les employés de l'organisation et aux membres de leur famille.
Les gendarmes Fabrice Gevaudan, Dave Ross et Doug Larche ont donné leur vie dans l'exercice de fonctions qui les passionnaient vraiment. Ils avaient la réputation d'être le genre de policiers que souhaitent voir arriver à leur rescousse le simple citoyen en détresse ou le collègue en attente de renforts. Leur désir de protéger le public et d'épauler leurs confrères les a incités à réagir rapidement et à affronter le danger.
Leur sacrifice ne sera jamais oublié, ni de leur famille, ni de la population canadienne, ni de la Gendarmerie royale du Canada. Ce sont de véritables héros.
Dans le corps du rapport, les recommandations sont présentées en caractères gras dans la section dont elles font partie. En voici la liste complète.
*Pour bien comprendre le contexte dans lequel s'inscrit chaque recommandation, prière de consulter la section pertinente du rapport.
1.1 Il est recommandé de fournir aux membres un complément de formation sur la position dominante armée.
3.1 Il est recommandé que les membres soient munis d'un cellulaire et d'un téléphone satellite lorsqu'ils sont en service et que cet équipement fasse partie de la tenue de service no 1.
3.2 Il est recommandé que la GRC examine la façon dont elle forme les superviseurs de première ligne en matière de commandement et de contrôle au cours d'incidents critiques.
3.3 Il est recommandé que la GRC donne aux superviseurs une formation afin qu'ils soient mieux préparés à assurer la gestion et la supervision pendant un incident critique jusqu'à ce que le commandant des interventions critiques (CIC) prenne la relève.
3.4 Que la GRC étudie des moyens de mettre en œuvre un mode opératoire commun (MOC) pour qu'une surveillance puisse être assurée simultanément par les superviseurs de première ligne, le CIC, le Centre divisionnaire des opérations d'urgence (CDOU) et le Centre national des opérations (CNO). *****.
3.5 Que le Système de gestion des mesures d'urgence et le service de cartographie Web du CNO soient mis à la disposition de chaque division, et que les politiques, la formation et la supervision nécessaires soient établies pour en assurer l'utilisation par le CDOU et le CIC durant les incidents critiques, les événements majeurs et les catastrophes.
3.6 Il est recommandé que, où il n'en existe actuellement pas, chaque division établisse une politique et un protocole dans le cadre d'un plan d'opérations d'urgence pour identifier les points d'entrée et de sortie et les voies de transport majeures aux fins d'alerte et de surveillance en situation de crise.
4.1 Il est recommandé de recourir au train ou au camion à plate-forme pour le transport de véhicules tactiques blindés (VTB) sur de longues distances.
4.2 *****.
4.3 *****.
4.4 Il est recommandé que des exercices annuels d'opérations tactiques de nuit avec le Service de l'air soient mis au point et que les membres du GTI y participent pour maintenir leurs acquis.
4.5 Il est recommandé que des stroboscopes infrarouges soient installés sur tous les VTB pour qu'ils puissent être identifiés au moyen d'un indicatif d'appel précis pendant les opérations comprenant une surveillance aérienne.
4.6 Il est recommandé que des agents qui ne font pas partie d'un GTI soient désignés et formés pour conduire des VTB afin de permettre aux membres du GTI de se concentrer sur leurs tâches principales.
4.7 Il est recommandé que soit dressée une liste normalisée de l'équipement dont ont besoin les membres de GTI et que cet équipement soit acquis afin qu'il soit distribué à toutes les équipes du programme des GTI.
4.8 Si on fait appel au Service de l'air pendant une situation urgente de grande ampleur, il est recommandé que des représentants du Service de l'air ayant la formation appropriée soient affectés au poste de commandement à titre d'agents de liaison pour y assurer un soutien.
4.9 *****.
5.1 Il faudrait que la politique soit modifiée pour stipuler que si un membre des services généraux est qualifié pour utiliser une arme à canon long, il doit s'assurer lorsqu'il est de service qu'une telle arme, s'il y en a une de disponible, se trouve dans le véhicule de police.
5.2 Il faut que les armes à feu soient rangées avec suffisamment de munitions.
5.3 Que tous les membres de la GRC assistent à une séance d'information et à une démonstration sur l'utilisation appropriée du gilet pare-balles rigide (GPBR).
5.4 Que les fusils soient dotés de bretelle pour en faciliter l'utilisation et en améliorer la sécurité.
5.5 Que les procédures d'entretien et d'entreposage de toutes les armes et munitions du détachement fassent l'objet d'un examen obligatoire de l'assurance de la qualité au sein d'un service.
5.6 Que durant les incidents de grand stress ou à risque élevé, un superviseur donne des instructions claires concernant l'utilisation de l'équipement.
6.1 Il est recommandé que les formateurs et les superviseurs tiennent compte de la façon dont les préjugés cognitifs réduisent l'efficacité de la formation et qu'ils examinent comment atténuer l'effet de ces processus de pensée naturels et universels.
6.2 Il est recommandé que les épreuves de qualification au tir de la GRC comprennent des volets effort physique et repositionnement et communication tactiques, et qu'elles s'accompagnent d'une formation pratique dynamique par scénarios, d'une formation sur l'évaluation des risques évolutive et de rappels sur les capacités des armes à feu, même au-delà des distances de qualification.
6.3 Il est recommandé d'offrir des documents de formation traitant de la différence entre couverture et dissimulation et présentant des exemples des capacités de pénétration des balles des diverses armes à feu.
6.4 Il est recommandé que la formation sur le déploiement rapide pour action immédiate (DRAI) soit adaptée de façon à inclure divers environnements ***** ainsi que les éléments prise de décision, planification, communication, gestion des biens et supervision pour s'assurer que les membres évaluent constamment les risques, et que la formation du personnel des stations de transmissions opérationnelles (STO) sur la coordination et l'intervention en cas d'incidents à risque élevé soit effectuée en même temps que la formation sur le DRAI pour renforcer le réalisme du scénario.
7.1 Il est recommandé que la STO de Codiac envisage l'adoption d'un système d'identification numérique automatique (ANI) afin de renforcer la sécurité des agents.
7.2 Il est recommandé d'examiner la couverture radio du Détachement de Codiac à l'extérieur du centre de Moncton afin de corriger les lacunes à ce niveau.
7.3 Il est recommandé que la GRC considère la mise en place de systèmes radio chiffrés afin d'assurer l'efficacité opérationnelle, la sécurité des agents et la protection de la confidentialité.
7.4 Il est recommandé de remettre définitivement les deux stations de répéteurs radio de Moncton en état afin d'assurer aux membres une couverture radio optimale tout en maintenant la communication avec la STO.
7.5 Il est recommandé d'examiner minutieusement les canaux principaux et secondaires afin de conférer aux répartiteurs un meilleur contrôle du temps d'antenne sur le réseau.
7.6 Il est recommandé d'élaborer une politique qui prescrit la création d'un guide de l'utilisateur radio à l'intention des membres. Ce guide doit contenir une carte de la province indiquant les stations de répéteurs et les détachements, ainsi qu'une liste des canaux radio.
7.7 Il est recommandé de développer un système radio et de transmission de données permettant la communication entre les membres de la GRC des divisions des Maritimes qui doivent travailler à l'extérieur de leur territoire de compétence.
7.8 Il est recommandé d'équiper le système CIIDS d'un système de cartographie haute résolution, comme celui du service de cartographie Web du CNO, ayant la capacité de communiquer des renseignements aussi cruciaux que les données de périmètre et de position.
7.9 *****.
7.10 Il est recommandé de doter les STO d'un sous-officier expérimenté qui coordonne les opérations en cas d'incidents critiques et offre des conseils opérationnels directement aux téléphonistes et aux répartiteurs.
7.11 Il est recommandé de réorganiser la structure hiérarchique de la STO de Codiac afin de faire participer l'officier responsable des services de soutien à la prestation de la formation, à la fourniture d'équipement et aux considérations stratégiques.
7.12 Il est recommandé que le GTI élabore un guide de référence rapide à l'intention des membres non formés par le GTI qui peuvent être appelés en renfort (et affectés au réglage du tir par avion et autres postes d'observation). Le technicien en télécommunications du GTI pourrait fournir ce guide et serait en mesure de former les membres aux protocoles radio du GTI.
7.13 Il est recommandé que la GRC instaure une politique qui permet l'emploi de langage clair au lieu des codes 10 en situation d'urgence.
8.1 Il est recommandé que les Services nationaux de communication (SNC) élaborent un plan qui servira de référence pour assurer une relève au personnel des communications divisionnaires en cas de situation de crise de longue durée. Ce plan doit tenir compte des besoins de chaque division.
8.2 Il est recommandé d'élaborer des procédures opérationnelles normalisées pour s'assurer que le personnel des communications soit parmi les premiers prévenus lors d'événements graves.
8.3 Il est recommandé, pour les conférences de presse tenues par suite d'incidents de cette nature, d'avoir un porte-parole qui présente l'aspect opérationnel de l'enquête pour rassurer la communauté en soulignant que la police prend les mesures nécessaires.
8.4 Il est recommandé que les SNC trouvent des solutions logicielles afin de surveiller adéquatement les médias sociaux.
8.5 Il est recommandé d'équiper le personnel des Communications d'appareils mobiles fonctionnels et modernes pour lui permettre d'effectuer son travail et d'utiliser les médias sociaux de manière efficace.
8.6 Il est recommandé que les SNC fournissent un point de contact ayant les compétences essentielles à la gestion de funérailles régimentaires (de l'intérieur ou de l'extérieur de la GRC), qui collaborera avec les Communications stratégiques.
8.7 Il est recommandé qu'un photographe professionnel soit présent à toutes les funérailles régimentaires afin d'en conserver des images comme il se doit.
8.8 Il est recommandé d'informer les familles des membres tués dans l'exercice de leurs fonctions que des services de communications sont disponibles pour les aider comme agent de liaison entre elles et les médias, et qu'elles auront accès au site Web de la GRC pour y publier des messages ou des photos.
8.9 Il est recommandé que les divisions assurent la surveillance des médias sociaux en temps réel, ce qui pourrait aider à repérer les risques opérationnels et à éclairer l'élaboration d'une stratégie de communication.
9.1 Il est recommandé que la GRC adopte un mécanisme amélioré pour permettre à ses membres d'obtenir des munitions d'exercice.
9.2 Il est recommandé que soient examinées les politiques et les pratiques pertinentes pour s'assurer qu'il existe des contrôles adéquats et qu'aucune contrainte n'empêche les membres d'améliorer leurs compétences en maniement des armes à feu.
11.1 L'examen recommande à la GRC d'envisager d'élargir le soutien qu'elle accorde aux initiatives destinées aux jeunes atteints de maladie mentale.
12.1 D'élaborer un guide national pour définir les rôles et les responsabilités des gestionnaires et des intervenants chargés de mettre en œuvre une stratégie d'assistance à la suite d'un incident traumatique et pour leur donner des conseils à cet égard, y compris en ce qui concerne l'établissement d'un plan de déploiement rapide et échelonnable et le besoin d'envisager des mesures à long terme en préparation à des événements importants comme le premier anniversaire de la tragédie.
12.2 De mettre à jour le Guide des mesures à prendre au décès d'un membre en portant attention aux éléments suivants : présentation de comptes rendus opérationnels aux familles; visite possible du lieu de travail des membres décédés avec leur famille; gestion des fleurs, des cartes et des cadeaux; communication de renseignements sur le service commémoratif de la Division Dépôt et sur le service commémoratif des policiers et des agents de la paix à Ottawa.
12.3 Que l'équipe de gestion du stress après un incident critique (GSIC) soit composée de psychologues expérimentés ayant connaissance du travail policier, d'agents de soutien par les pairs expérimentés de la GRC, d'aumôniers de la GRC et d'infirmières, tous formés en GSIC.
12.4 Il est recommandé d'élaborer un plan prévoyant des mesures de suivi continu à intervalles déterminés pendant la première année suivant un incident et dans le cadre des évaluations périodiques de santé des membres directement concernés. Il y aurait lieu d'envisager l'utilisation du questionnaire mentionné dans la présente section de l'examen.
12.5 D'entreprendre un examen des modalités régissant la prestation de services d'assistance post-traumatique aux personnes touchées, notamment les employés municipaux, les gendarmes auxiliaires, les bénévoles et les familles des différents intervenants.
12.6 D'envisager des mesures pour faire en sorte que les membres incapables de retourner au travail soient tenus au courant des informations pouvant les concerner.
12.7 Il est recommandé qu'un psychologue s'entretienne avec les employés avant leur retour au travail pour les préparer aux changements qui les attendent par suite de l'incident traumatique.
12.8 Qu'une équipe de GSIC n'ayant pas participé à l'opération tienne une séance de soutien post-intervention pour le personnel chargé des séances d'aide tenues dans le cadre de l'opération. Cette séance devrait avoir lieu une fois l'opération terminée, de préférence avant que les intervenants retournent dans leur service d'attache.
12.9 Quand un employé est tué dans l'exercice de ses fonctions, il y a déclenchement de mécanismes de rémunération qui entraînent l'envoi automatisé de messages et de lettres à sa famille au sujet de l'annulation de certaines prestations. Ces processus automatisés manquent de délicatesse et causent un stress indu à la famille. Il est recommandé de procéder à leur examen afin que soient évitées de telles situations.
12.10 Après le décès d'un membre de la GRC, sa famille doit remplir beaucoup de paperasse et satisfaire à diverses exigences de procédure. Il est recommandé de désigner un agent de liaison pour l'aider à remplir tous les documents requis.
12.11 Quand un membre est tué ou qu'il subit une blessure physique ou un traumatisme psychologique et qu'il n'est par conséquent pas en mesure de s'occuper des réclamations relatives aux rendez-vous de son conjoint ou de ses enfants, ces derniers n'ont pas accès à la protection offerte par son assurance et doivent se fier à une assurance privée. Dans certains cas, cette assurance ne prévoit le remboursement que de cinq à sept heures de services psychologiques par année. Il est recommandé d'apporter des correctifs pour éliminer le fardeau que ce financement insuffisant fait peser sur la famille des membres.
13.1 Il est recommandé à la GRC de prendre des mesures immédiates pour accélérer la distribution des carabines de patrouille à l'échelle de l'organisation. Ces mesures doivent comprendre une augmentation importante et permanente de la capacité de formation de la Gendarmerie.
13.2 Il est recommandé à la GRC d'effectuer une analyse rigoureuse des procédures d'approbation et d'acquisition (y compris les travaux de recherche-développement connexes) qui se rapportent à l'équipement ayant une incidence sur la sécurité du policier. La détermination de l'autorité compétente chargée de la direction tels projets, la formation d'équipes de projet dotées de ressources convenables et l'établissement des échéances à respecter doivent faire partie des éléments abordés dans cette analyse.
Annexes
Annexe A : Lettre de nomination du commissaire et mandat d'examen
Le 27 juin 2014
Monsieur Alphonse MacNeil
*****
Objet : Lettre de nomination et mandat d'examen
Examen interne – Fusillade de Moncton
Meurtres et tentatives de meurtre d'agents de la GRC
Moncton (Nouveau-Brunswick), 4 juin 2014
No de dossier : 2014-646828
Monsieur,
Je suis heureuse que vous ayez accepté le rôle d'examinateur des événements entourant les meurtres et les tentatives de meurtre d'agents de la GRC qui ont eu lieu à Moncton le 4 juin dernier. Comme vous le savez, le tireur solitaire, Justin BOURQUE, a été arrêté et fait l'objet d'accusations criminelles relativement aux décès de trois membres : le gend. David Joseph ROSS, le gend. Fabrice Georges GEVAUDAN et le gend. Douglas James LARCHE. Il a également été accusé de tentatives de meurtre sur le gend. Éric Stéphane J. DUBOIS et la gend. Marie Darlene GOGUEN au cours du même incident.
Le soir du 4 juin 2014, le Service régional de la GRC de Codiac a répondu à un appel concernant un homme suspect armé de carabines qui se promenait dans un quartier résidentiel. Au fur et à mesure que des membres arrivaient sur les lieux, Justin BOURQUE a ouvert le feu sur eux. Il a finalement été arrêté par une équipe de membres du Groupe tactique d'intervention le 6 juin.
Je vous demande d'entreprendre un examen interne de cet incident. Votre mandat général consistera à dégager les faits relatifs aux points suivants et à formuler des recommandations au besoin :
- Tactiques employées et intervention effectuée à la suite du premier appel (En tenant compte de la façon dont les membres ont été dépêchés et coordonnés à la suite de cet appel, est-ce que des améliorations peuvent être apportées à la formation, aux politiques ou à d'autres secteurs de la GRC? Peut-on recommander des améliorations aux tactiques employées compte tenu des faits qui étaient connus à ce moment?)
- Prise de décisions et évaluation des risques à la suite du premier appel (Avons-nous eu l'occasion de réévaluer l'appel et notre intervention au tout début de celle-ci?)
- Supervision durant tout l'incident (D'après la façon dont les interventions ont été supervisées, des éléments devraient-ils être améliorés?)
- Le déroulement de l'intervention (De quelle façon l'intervention coordonnée et du GTI a-t-elle été gérée en fonction de l'évolution de la situation?)
- Équipement et armes (Quel était l'état de disponibilité de l'équipement et des armes et ont-ils été utilisés?)
- Formation des membres et compétences en sécurité du policier (Y a-t-il des lacunes dans la formation offerte actuellement aux membres? Y a-t-il de nouvelles exigences en matière de formation qu'il serait raisonnable d'imposer à la GRC à la suite de cet incident?)
- Communications opérationnelles (Qu'en était-il de la communication entre membres, superviseurs, Groupe tactique d'intervention [GTI] et autres équipes d'intervention coordonnée? Qu'en était-il de l'opérabilité radio?)
- Communication et médias (Comment la communication avec les médias s'est-elle déroulée? Quel rôle les médias sociaux ont-ils joué? Y avait-il des possibilités d'amélioration?)
- Examen plus vaste de la politique (Les procédures, les tactiques et les politiques actuelles ont-elles été respectées? Des changements s'imposent-ils?)
- Armes à feu en la possession de l'accusé (Quels éléments d'information étaient connus de la police au moment de l'intervention et pendant l'évolution de l'incident, le cas échéant?)
- Informations ou renseignements sur le tireur (La police a-t-elle eu des occasions raisonnables d'intervenir auprès de l'accusé avant qu'il passe aux actes? Y a-t-il moyen de dépister tôt les autres personnes qui peuvent avoir des intentions semblables?)
- Assistance post-traumatique offerte aux employés (À la lumière de l'assistance offerte aux employés et à leur famille après l'incident, y aurait-il des améliorations à apporter à ce chapitre?)
- Mise en œuvre des recommandations formulées à la suite de l'incident de Mayerthorpe (Est-ce que certaines des recommandations ou des leçons dégagées de l'incident de Mayerthorpe présentent un intérêt particulier pour ce dossier?)
Le commissaire adjoint Byron Boucher, des Services de police contractuels et autochtones de la Direction générale (Ottawa), sera votre principal point de contact pour cet examen. Vous pourrez visiter tous les endroits où l'incident s'est déroulé si vous le jugez utile. Vous pourrez également examiner les documents relatifs à l'enquête et d'autres documents, ainsi qu'interviewer des membres ou des témoins, à condition que vos démarches n'entravent ni l'enquête criminelle ni les enquêtes que mènent actuellement à l'égard de cet incident l'agent de santé et de sécurité d'Emploi et Développement social Canada et l'Équipe d'enquête sur les situations comportant des risques de la GRC. Nous collaborerons avec vous afin de fournir d'autres ressources s'il y a lieu.
Vous devrez présenter un rapport provisoire dans les 45 jours et un rapport final assorti de recommandations dans les 90 jours suivant le début de votre examen. S'il vous faut plus de temps, veuillez prendre les dispositions nécessaires avec le commissaire adjoint Boucher.
Vous serez rémunéré selon les conditions de votre contrat et vos dépenses seront remboursées selon les politiques applicables. Mon bureau assumera tous les frais associés à votre examen.
Janice Armstrong, sous-commissaire
Annexe B : Équipe d'examen et collaborateurs
Les membres de l'équipe d'examen ont apporté à cette dernière des compétences acquises dans plusieurs domaines du travail policier, y compris les services généraux, les enquêtes sur les crimes majeurs, le renseignement criminel, la délinquance chez les jeunes, les groupes tactiques d'intervention, la formation, les tactiques, le recours à la force, l'équipement, le commandement d'interventions critiques, la planification et la gestion des urgences, la gestion de projet, les opérations interorganismes, la supervision, le leadership, le changement transformationnel, les relations avec les employés, les communications stratégiques, l'analyse de politiques, la recherche et la rédaction de rapports.
Commissaire adjoint Alphonse MacNeil (à la retraite)
Chantal Dugas, employée de la fonction publique, Service de l'air de l'Atlantique
Caporal Mike Sims, Équipe de soutien des demandes d'autorisation juridique, Division H
Sergent Dwayne Kelly, Gestion des mesures d'urgence, Division H
Surintendant Timothy Head, officier des Opérations, Kelowna, Division E
David Bartlett, membre civil, Politiques stratégiques et Relations extérieures, Direction générale
Sergent d'état-major David Lowry, représentant des relations fonctionnelles, Division nationale
Inspecteur Rick Shaw, Intervention et déjudiciarisation auprès des jeunes de l'Atlantique
Lia Scanlan, membre civile, Groupe des communications stratégiques, Division H
Collaborateurs
L'équipe d'examen tient à remercier les nombreux collaborateurs de la GRC et de l'extérieur qui ont partagé leurs connaissances et leur savoir-faire en ce qui concerne les 13 questions abordées dans le présent rapport.
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