Répercussions en matière de protection de la vie privée de l'analyse génétique
L'analyse génétique est l'un des domaines peut-être le mieux connu des technologies biomédicales et qui évolue le plus rapidement; cette technique pourrait avoir des répercussions profondes en matière de protection de la vie privée pour le public canadien. L'analyse génétique consiste à prélever des substances corporelles de suspects ou de volontaires, à analyser les échantillons et à les comparer à des preuves biologiques - peau, cheveux et poils, sang ou sperme trouvés en rapport avec un crime. L'ADN du suspect est ensuite comparé à l'ADN trouvé sur les lieux du crime. Les résultats permettent soit d'éliminer le suspect soit d'établir avec une grande certitude une correspondance entre les deux échantillons.
L'analyse génétique constitue de l'avis général le progrès le plus important pour l'identification des criminels depuis la dactyloscopie. Cette technique relativement nouvelle et incertaine au début des années 90 est maintenant très médiatisée, en particulier dans les cas dramatiques où elle produit des preuves d'innocence et de condamnation injuste. La tendance subtile vers la saisie et la conservation de données génétiques sur un segment de plus en plus large de la population reçoit toutefois moins de publicité.
Le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada appuie fortement l'utilisation des preuves génétiques pour identifier des criminels, innocenter des suspects et disculper des individus condamnés à tort. Le Commissariat rejette toutefois la notion que des outils d'enquête judiciaire, comme la Banque nationale de données génétiques, pourraient se transformer en fichier national d'identificateurs biologiques des citoyens. L'entreposage dans la Banque non seulement des résultats mais aussi des échantillons eux-mêmes est particulièrement préoccupant. La conservation d'une banque d'échantillons sur un segment de la population pourrait conduire à un détournement du rôle de la Banque, autrement dit l'utilisation des renseignements pour une toute autre fin que celle pour laquelle ils ont été recueillis. Certains pourraient prétendre par exemple que les échantillons contiennent une foule de données qui pourraient être utilisées pour d'autres recherches scientifiques légitimes que l'analyse génétique. Ces prétentions se fondent en majeure partie sur l'argument selon lequel il existe un intérêt public impérieux pour la recherche et qu'il serait trop coûteux, impossible ou peu pratique de recueillir les renseignements d'autres sources. D'après les rapports d'autres juridictions, la pression augmente en vue de faire effectuer une deuxième analyse des échantillons, afin de pouvoir ajouter des marqueurs génétiques, comme la race, le sexe, les caractéristiques physiques, les troubles psychiatriques possibles, aux données d'identification auxquelles sont limitées actuellement les banques de données génétiques.
Les preuves génétiques ont été utilisées pour la première fois au Canada en 1988, mais il n'existait aucune loi autorisant les policiers à prélever des échantillons d'ADN de suspects avant 1995, date de la modification par le Parlement du Code criminel en vue de permettre l'obtention d'échantillons en exécution d'un mandat. Peu de temps après, le solliciteur général a amorcé des consultations concernant la création d'une banque nationale de données génétiques destinée à faciliter les enquêtes sur les crimes. La Banque nationale de données génétiques contient actuellement des échantillons et des résultats d'analyses génétiques de substances corporelles trouvées sur des lieux de crime et provenant de délinquants condamnés pour une gamme d'infractions avec violence.
Le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada a demandé instamment que la banque de données génétiques soit limitée aux résultats des analyses et qu'elle exclue les échantillons biologiques. Il a également recommandé de limiter aux crimes de violence la gamme d'infractions pour lesquelles des échantillons susceptibles de produire des preuves génétiques futures pourraient être prélevés.
Lors de son adoption en 1998, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques comprenait la plupart des recommandations faites par le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada. Les analyses et les échantillons eux-mêmes sont entreposés, mais uniquement pour permettre une deuxième analyse en raison des progrès technologiques intervenus. La politique du Service des laboratoires judiciaires énonce clairement que les échantillons ne peuvent être utilisés qu'à des fins d'identification judiciaire. La gamme d'infractions, bien que plus vaste que le Commissaire à la protection de la vie privée le jugeait nécessaire, n'est pas aussi vaste que certains l'auraient voulu. Nombre des recommandations ont néanmoins été acceptées, de sorte que la loi incorpore des mesures importantes de protection de la vie privée, notamment l'interdiction (précisée dans des modifications ultérieures) d'utiliser les substances corporelles à d'autres fins qu'une analyse génétique. Les modifications adoptées en 1999 exigeaient également que le commissaire de la GRC présente chaque année au solliciteur général un rapport sur le fonctionnement de la Banque nationale de données génétiques. Le solliciteur général doit ensuite déposer le rapport devant le Parlement.
L'adoption de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et de ses modifications subséquentes a réglé les principales préoccupations du Commissariat concernant le prélèvement des échantillons. Le Commissariat appuie donc fortement la Banque nationale de données génétiques. La participation du Commissariat au Comité consultatif de la banque nationale de données génétiques en est la preuve.
Une partie du mandat du Comité consultatif consiste à surveiller la mise en application de l'esprit de la Loi afin d'assurer la protection des droits des Canadiens en matière de vie privée.
Le Comité consultatif aimerait connaître vos préoccupations en matière de protection de la vie privée concernant la Banque nationale de données génétiques. Veuillez transmettre vos communications à l'adresse suivante : Secrétariat du Comité consultatif (ou quiconque le Comité désigne à cette fin).
Si vous voulez porter plainte en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, veuillez communiquer avec :
Le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada
- 112, rue Kent
Ottawa (Ontario) K1A 1H3 - Téléphone : 1-613-995-8210
- Nº sans frais : 1-800-282-1376
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